Une histoire du Canada
(devenue l’Île-du-Prince-édouard) et le Cap-Breton (ils étaient prêts à abandonner le Cap-Breton, même si cette perte aurait refoulé la nouvelle-France derrière un écran d’îles et de bases britanniques). ils ne renoncent toutefois pas à la Louisiane, ni aux forts de l’intérieur des terres, de sorte que la stratégie impériale de 1701 peut être maintenue.
Le traité comporte des ambiguïtés. On y trouve une carte représentant les frontières de l’acadie, à laquelle les Français donnent l’interprétation la plus restrictive possible, c’est-à-dire désignant la partie continentale de la nouvelle-écosse seulement. Les habitants français de 62
UnE HIsTOIRE dU Canada
l’ancienne acadie, devenue la nouvelle-écosse, peuvent y demeurer et rester catholiques, « dans la mesure où les lois de la Grande-Bretagne le permettent ». C’est au tour des Britanniques de se montrer ambigus, car la loi britannique décourage, le terme est faible, la présence catholique.
Catholiques ou pas, les Britanniques veulent voir les acadiens demeurer en nouvelle-écosse, car, sans leurs fermes, la position des rares soldats britanniques dans la région est, de fait, précaire. de leur côté, les pouvoirs français pressent les acadiens de se rendre dans les territoires français qui restent, surtout dans l’île du Cap-Breton. en réalité, la plupart des acadiens résistent à cette pression, peu portés qu’ils sont à abandonner leurs terres pour se lancer dans l’aventure d’une nouvelle colonisation.
ils avisent toutefois les pouvoirs britanniques des strictes limites de leur allégeance à la couronne britannique : ils ne combattront pas la France s’il se déclare une nouvelle guerre. Consternés, les Britanniques acceptent ces conditions – de manière conditionnelle, en fait, pour aussi longtemps qu’ils y seront obligés6.
Un inTERmèDE pAciFiqUE
La paix entre la France et la Grande-Bretagne dure trente ans, quoique les Britanniques se lancent dans des combats contre presque tout le monde durant cette période. Le gouvernement français reconnaît sa défaite militaire et le fait que la politique belliqueuse de Louis Xiv a été vaine. La France a besoin de temps pour récupérer sous le règne de son successeur, Louis Xv, devenu roi à l’âge de cinq ans à la mort de son grand-père en 1715.
en nouvelle-France aussi, la paix est la bienvenue. Les avantages stratégiques qui ont donné la victoire à la Grande-Bretagne en 1713
sont toujours les mêmes. Les Britanniques ont une économie plus vaste, davantage de revenus disponibles et une flotte beaucoup plus importante que les Français. en cas de nouvelle guerre, la nouvelle-France serait isolée par voie maritime, par un ennemi en mesure de choisir le moment et le lieu de son attaque, pour autant que cela demeure sur l’océan. ayant besoin d’approvisionnements constants en provenance de France, dépendant du transport des fourrures vers l’europe, la nouvelle-France n’a guère d’autre choix que de profiter des avantages de la paix et de prier pour qu’ils se maintiennent.
La paix ne présente toutefois des avantages qu’en apparence.
L’immigration étant restreinte, la population de la nouvelle-France double tous les trente ans. La colonisation progresse à partir du fleuve, avec de 4•lesguerrespourlaconquêTedel’amérique(1) 63
longues et étroites exploitations agricoles dans les rangs ordinaires ou les concessions. Parallèles au fleuve, des chemins relient les fermes entre elles.
Les maisons ressemblent à celles de l’ouest de la France, surtout à celles de normandie. Parfois, les colons construisent des habitations faites de grosses colonnes de bois verticales, avec de l’argile ou de la blocaille pour combler les vides, une technique de construction courante en France.
sans doute ont-ils été les premiers en amérique du nord à construire des cabanes en bois rond – faites de rondins horizontaux avec remplissage d’argile, la cabane en bois rond qu’on retrouve partout en amérique du nord anglophone, mais qui ne fait son apparition dans les colonies anglaises qu’au dix-huitième siècle7. La maison pièce sur pièce ou en bois rond est et demeurera le principal type d’habitation rurale en nouvelle-France et au Québec.
Les bourgades de nouvelle-France sont plus susceptibles d’être construites en pierre au dix-huitième siècle. Fréquents, les incendies détruisent la plupart de
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