Une histoire du Canada
colonies le droit d’élire une assemblée. Le gros problème est que, à l’exception de quelques centaines de personnes, tous les habitants du Québec sont catholiques.
Pour les quelques centaines de protestants, il va de soi qu’eux seuls devraient avoir le droit de vote et le monopole d’une future assemblée, et occuper toutes les fonctions publiques. Les gouverneurs qui se succèdent, Murray (1760–1766) puis Carleton (1768–1778) adoptent un point de vue différent. Comment peuvent-ils parvenir à maintenir l’ordre, faire appliquer les lois et lever des impôts dans un système discriminatoire envers presque tous les habitants de la province ?
James Murray, fils cadet d’une famille de la noblesse écossaise, trouve à redire à l’attitude des marchands britanniques immigrants, qu’ils viennent des colonies américaines ou directement de Grande-Bretagne : c’est un tas de « camelots licencieux », grommelle-t-il. il est convaincu que leurs intérêts ne concordent pas avec les siens, pas plus qu’avec ceux de l’ensemble de la colonie. Londres a vent des objections envers son style de gouvernement, qui offrent à ses opposants politiques l’occasion de lui faire perdre son poste. Les marchands fondent de grands espoirs en son successeur, le lieutenant-gouverneur Guy Carleton, mais ce dernier finira lui aussi par les décevoir.
selon le point de vue adopté pendant les siècles ultérieurs, le gros problème du Québec après 1960 est le sort réservé aux Canadiens français, simplement appelés les « Canadiens » : leur place en politique, au sein de la société et dans l’économie. nombre d’intervenants économiques à l’époque sont aussi des intervenants politiques, et ils cherchent à influencer le gouvernement britannique afin de servir leurs propres intérêts.
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en réalité, cependant, il n’y a pas grand-chose à dire ni à faire à propos de l’économie. La nouvelle-France était soutenue par les subventions françaises, sa structure sociale renforcée par des infusions d’or français et d’honneur français, de même que la perspective d’emplois de guerre pour sa haute bourgeoisie. On ne sera pas surpris d’apprendre que la plupart des membres de cette dernière repartent en France en quête d’un agent payeur auquel ils sont habitués. Quant aux marchands de nouvelle-France, certains repartent, d’autres restent, mais, inévitablement, les liens commerciaux dont ils dépendent changent avec le passage de la nouvelle-France d’un empire à l’autre et, par conséquent, d’une source de capitaux et de marchés à l’autre. dans un monde mercantile – c’est-à-dire régi par les théories du mercantilisme – cela est tout simplement considéré comme naturel.
Les gouverneurs submergent Londres de leurs opinions sur le Québec, ses habitants, son économie et ses perspectives. Les dépêches en provenance de Québec sont étudiées à la loupe par des ministres qui doivent les intégrer à leur propre cadre de référence et les ajuster aux réalités politiques de la Grande-Bretagne qui, pendant les années 1760 et 1770, connaît l’instabilité politique du fait que le roi, George iii, nage dans l’hésitation, présidant ses gouvernements, pratiquant l’interférence mais ne parvenant pas à exercer son contrôle.
La question du Québec préoccupe énormément les ministres et fonctionnaires de la capitale britannique au début des années 1770, alors que le gouvernement en arrive lentement, après bien des hésitations, à un consensus sur la marche à suivre. Finalement, en 1773, le gouvernement, sous la direction de lord north, prend son courage à deux mains et rédige un acte qui a quatre conséquences : la levée des restrictions concernant les catholiques du Québec, l’autorisation pour ces derniers d’occuper des fonctions publiques ; l’extension des frontières de la province de manière à inclure tout le territoire britannique au sud de la baie d’Hudson, à l’est du Mississippi et au nord de l’Ohio ; la reconnaissance du droit civil (mais non criminel) français ; et la création d’une administration par un gouverneur et un conseil nommé, sans assemblée élue cependant.
de ces quatre points, le plus important, et de loin, sur le plan politique est le premier, non pas en raison de ses répercussions au Québec, mais parce qu’il crée un précédent auquel on
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