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Victoria

Victoria

Titel: Victoria Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Joanny Moulin
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commencées par Louis XVI, accélérées par Bonaparte au temps du blocus continental, dont l’actuel empereur des Français fait vivement poursuivre les travaux. Dès son retour, la reine demande à son gouvernement de faire un état des lieux des défenses sur la côte sud du royaume et de les renforcer sans délai.
    Pour l’anniversaire d’Albert, le 26 août, Victoria lui offre une statuette en argent de Lady Godiva. Elle a commandé l’ouvrage à Pierre-Émile Jeannest, un sculpteur français de chez Eklington & Co, orfèvres à Birmingham. Lady Godiva est la légendaire épouse de Leofric, un comte anglo-saxon du XI e  siècle. Pour obtenir l’abolition d’un impôt injuste que son mari imposait au peuple, Lady Godiva traversa la ville nue sur son cheval, avec sa longue chevelure pour seul voile de sa pudeur. Depuis le XVII e  siècle, la ville de Coventry rejoue annuellement la scène, célébrant la « sauveuse du peuple » par une parade fort décriée pour son indécence. Un ample tapis de selle, doré comme les harnais, porte l’écusson de Coventry. Sur le socle, un bas-relief montre « Tom le voyeur », qui fut frappé de cécité pour avoir épié la dame nue. L’esthétique moyenâgeuse rappelle le poème d’Alfred Tennyson :
    Elle chevaucha donc, vêtue de chasteté :
    L’air pesant tout autour d’elle écoutait ses pas.

43
    À l’automne 1857, la retraite annuelle de la famille royale à Balmoral se passe dans l’angoisse, assombrie par les incertitudes de la grande révolte des cipayes. « Nous sommes, écrit Albert à Stockmar, torturés par les événements en Inde, qui sont réellement épouvantables. » Palmerston, avec l’exaspérante légèreté qui le caractérise, persiste contre toute raison à ne pas paraître prendre les choses au sérieux. Il dit ne pas pouvoir trouver les troupes nécessaires.
    « C’est une hypothèse, lui répond Victoria, ce n’est pas un argument. Essayez et vous verrez. Si vous ne réussissez pas, et que la mesure est nécessaire, il vous faudra trouver les moyens de la réussite. Si vous créez les difficultés vous-même, bien sûr, vous ne pouvez pas réussir. »
    Car il s’obstine à envoyer des renforts petit à petit, se plaignant qu’il n’a pas assez d’argent. À leurs bureaux contigus, Victoria et Albert passent de longues journées à étudier les cartes. La reine exhorte son gouvernement à élaborer rapidement une stratégie concertée.
    « Nos troupes sont sûres d’être victorieuses contre les cipayes en terrain découvert, si les effectifs ne sont pas trop disproportionnés, s’ils ne sont pas trop mal commandés ou diminués par la fatigue et la maladie. Les actions militaires doivent avoir de l’ensemble, et cela ne pourra guère se faire que si une armée est formée à Calcutta, assez forte pour marcher à partir de là sur les régions du pays qui se sont révoltées. Nos renforts, en arrivant au compte-goutte, risquent de se faire tailler en pièces s’ils sont envoyés à la rescousse de colonnes isolées. »
    La situation semble devoir être aggravée par une crise économique. Aux États-Unis, les compagnies de chemin de fer s’effondrent sous le poids de leurs dettes, entraînant dans leur chute les banques qui spéculaient sur leur expansion. Une panique financière touche l’Écosse, l’Irlande, puis c’est la Banque d’Angleterre qui ne peut plus faire face. On suspend la loi qui indexe l’émission des billets sur l’étalon-or. Le Parlement se réunit pour voter les résolutions nécessaires, mais ses débats ne sont pas très éclairants.
    « Une longue période de prospérité, écrit Albert à Stockmar, a rendu les banquiers, les spéculateurs et les capitalistes imprudents, et maintenant ils se voient désagréablement rappelés à l’ordre par des lois naturelles qu’ils ont violées, mais qui n’en demeurent pas moins souveraines. »
    Enfin, vers la fin de l’année, les nouvelles de l’Inde s’améliorent. À Lahore, le haut fonctionnaire Sir John Lawrence est parvenu à désarmer les troupes rebelles indécises. Il a négocié un accord avec l’émir d’Afghanistan Dost Muhammad Khan. En s’appuyant sur la fidélité des populations sikhes, il a rallié le Penjab à la cause britannique et levé une nouvelle armée. Grâce à ces renforts, Dehli a été reprise dès le 20 septembre.
    Fort de cette nouvelle, Lord Canning a trouvé des bataillons à Bombay, Madras et

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