Vie de Benjamin Franklin, écrite par lui-même - Tome II
autre».—«Il est à toi, répliqua le Sauvage. Mais mon frère, ne rêvons plus ; car tes songes valent mieux que les miens, et tu me ruinerois».—(Note du Traducteur.)].»
Après avoir conféré quelque temps entr'eux, les Sachems et les guerriers des six Nations, répondirent à sir William Johnson, qu'ils acceptoient la proposition des nouvelles limites ; et sir William fit parvenir leur réponse au bureau des lords commissaires du commerce et des colonies.
Soit qu'il y eût un changement dans l'administration, qui avoit formé le projet d'obtenir un acte du parlement pour régler le commerce avec les Indiens, et pour reculer la ligne des limites, soit par quelqu'autre cause que nous ignorons, on ne s'en occupa plus jusqu'à la fin de l'année 1767. Alors, la négociation relative aux limites fut reprise.
Cependant, entre les années 1765 et 1768, beaucoup d'habitans de la Virginie, du Maryland et de la Pensylvanie, allèrent s'établir sur les montagnes ; et les six Nations en furent si irritées, qu'en 1766, elles massacrèrent plusieurs de ces colons, et déclarèrent la guerre aux colonies du centre de l'Amérique septentrionale. Pour les appaiser et prévenir une calamité générale, on fit partir du fort Pitt, un détachement du quarante-deuxième régiment d'infanterie, avec ordre de ramener les Anglais qui s'étoient établis à la Crique de la Pierre-Rouge [Redstone creek.].—Mais les efforts et les menaces de ce détachement furent vaines, et il retourna au fort sans avoir pu exécuter ses ordres.
Les six Nations se plaignirent alors davantage de ce qu'on s'emparoit de leurs terres sur les montagnes. Le 7 décembre 1767, le général Gage écrivit à ce sujet au gouverneur de Pensylvanie, et lui manda :—«Vous êtes témoin du peu d'attention qu'on a fait aux diverses proclamations qui ont été publiées ; vous savez que le soin qu'on a pris, cet été, d'envoyer une partie de la garnison du fort Pitt, pour faire abandonner les établissemens des montagnes, n'a presque servi de rien. Nous apprenons que les colons sont retournés à la Crique de la Pierre-Rouge et sur les bords de la rivière de la Fraude [Cheat river.], en plus grand nombre qu'auparavant.»
Le 5 janvier 1768, le gouverneur de la Pensylvanie envoya un message à l'assemblée générale de la province avec la lettre du général Gage.
—Le 13 du même mois l'assemblée ayant délibéré sur les plaintes des Indiens, répondit au gouverneur.—«Pour faire cesser les causes du mécontentement des Indiens, et établir une paix durable entr'eux et les sujets de sa majesté, nous pensons qu'il est absolument nécessaire qu'on fixe promptement les limites, et qu'on les satisfasse pour la partie de leur territoire, qui se trouvera en-deçà de la ligne de démarcation. Par ce moyen, ils ne se plaindront plus qu'on envahit leurs propriétés, et les habitans de nos frontières auront assez de pays pour s'établir et pour chasser, sans se mêler avec ces peuples.»
Le 19 janvier 1768, M. Galloway, orateur de l'assemblée de Pensylvanie et le comité de correspondance de cette assemblée, écrivirent à Richard Jackson et à Benjamin Franklin, agens de Pensylvanie à Londres, pour leur faire part des querelles des colons avec les Indiens.—«Les Indiens, disoient-ils, se plaignent vivement du délai qu'on a mis à établir les limites, et de ce que, quoiqu'ils n'aient encore rien reçu pour les terres, qu'ils sont convenus de céder à la couronne, les Anglais y forment chaque jour de nouveaux établissemens.»
Au mois d'avril 1768, l'assemblée de Pensylvanie voyant qu'une guerre avec les Indiens devenoit presqu'inévitable, parce que ce peuple n'avoit pas vendu les terres des montagnes où l'on formoit des établissemens ; et croyant en outre qu'on recevroit bientôt des ordres d'Angleterre relativement aux limites, résolut d'employer la somme de mille livres sterlings en couvertures, etc. d'en faire présent aux Indiens de l'Ohio, afin de modérer leur ressentiment jusqu'à ce que la cour prît d'autres mesures. Le gouverneur de Pensylvanie étant alors informé que George Croghan devoit bientôt faire un traité avec les Indiens, par l'ordre du général Gage et de sir William Johnson, envoya au fort Pitt, son secrétaire et une autre personne, en qualité de commissaires de la province, pour offrir aux Indiens le présent des Pensylvaniens.
Le 2 mai 1768, les députés des six Nations, qui s'étoient rendus au fort Pitt,
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