Vies des douze Césars
même venir chez lui les sénateurs et les magistrats, et leur remit les comptes de l’empire. (2) Mais, faisant réflexion que, s’il redevenait simple particulier, il s’exposerait au péril, et qu’il y aurait de l’imprudence à abandonner la république entre les mains de plusieurs, il se décida à garder le pouvoir ; et l’on ne sait ce qu’il faut louer le plus, ou l’événement, ou sa résolution. (3) Ce projet qu’il manifestait quelquefois, il l’a consigné dans un édit en ces termes : « Puissé-je affermir la république dans un état de sécurité et de splendeur ! Je serai assez récompensé, si sa bonne organisation passe pour être mon ouvrage. et si je puis me flatter, en mourant, de l’avoir établie sur des fondements durables. » (4) Il accomplit lui-même son vœu en faisant tous ses efforts pour que personne n’eût à se plaindre du nouvel ordre de choses. (5) La beauté de Rome ne répondait point à la majesté de l’empire : elle était exposée aux inondations et aux incendies. Il l’embellit tellement, qu’il se vanta avec raison d’avoir trouvé une ville de briques et d’en avoir laissé une de marbre. (6) Il pourvut également à sa sûreté pour l’avenir, d’après tous les calculs de la prudence humaine.
XXIX. Les transformations de Rome
(1) Il fit exécuter un grand nombre de travaux publics. Voici les principaux : le Forum et le temple de mars Vengeur, le temple d’Apollon sur le mont Palatin, le temple de Jupiter Tonnant au Capitole. (2) Les deux places publiques où l’on rendait la justice ne pouvant plus suffire à la foule des plaideurs, il en fit faire une troisième. Telle fut l’origine du Forum. Avant que le temple de Mars fût achevé, il se hâta de publier et d’ordonner que ce lieu serait destiné au jugement des affaires criminelles, et à la désignation des juges par la voie du sort. (3) Il avait fait vœu de construire le temple de Mars pendant la guerre de Macédoine qu’il avait entreprise pour venger la mort de son père. Il ordonna que ce serait dans ce temple que le sénat délibèrerait sur les guerres et les triomphes ; que ceux qui se rendraient dans les provinces avec un commandement partiraient de cet édifice ; et que ceux qui reviendraient vainqueurs y porteraient leurs trophées. (4) Il éleva le temple d’Apollon dans l’endroit de sa maison du mont Palatin qui avait été frappé de la foudre, et où les augures avaient déclaré qu’Apollon désirait une demeure. Il y ajouta un portique et une bibliothèque grecque et latine. C’est là que, sur ses vieux jours, il assemblait souvent le sénat et dénombrait les décuries de juges. (5) Dans son expédition chez les Cantabres, pendant une marche de nuit, la foudre, en effleurant sa litière, avait écrasé l’esclave qui le précédait pour l’éclairer. Échappé à ce danger, il consacra un temple à Jupiter Tonnant. (6) On lui doit encore d’autres édifices qui ne portent point son nom, mais celui de ses neveux, de sa sœur ou de sa femme, comme le portique et la basilique de Lucius et de Caius, les portiques de Livie et d’Octavie, et le théâtre de Marcellus. (7) Souvent il engageait les principaux citoyens à décorer Rome, chacun selon ses facultés, ou par de nouveaux bâtiments, ou par des réparations. (8) Aussi y en eut-il beaucoup de construits par diverses personnes. C’est ainsi que Marcius Philippus érigea le temple de l’Hercule des Muses ; L. Cornificius, celui de Diane ; Asinius Pollion, le vestibule de la Liberté ; Munatius Plancus, le temple de Saturne ; Cornelius Balbus, un théâtre ; Statilius Taurus, un amphithéâtre ; enfin M. Agrippa, un grand nombre de beaux monuments.
XXX. Ses lois de police. Ses dons aux temples
(1) Auguste divisa Rome par sections et par quartiers. Les magistrats annuels furent chargés de tirer au sort la garde des sections, et le soin des quartiers fut confié à des inspecteurs, choisis dans le voisinage. (2) Il établit contre les incendies des sentinelles qui veillaient pendant la nuit. Pour prévenir les inondations du Tibre, il en élargit et en nettoya le lit qui depuis longtemps était encombré de ruines et rétréci par la chute des édifices. (3) Afin de rendre l’accès de Rome plus aisé, il se chargea de réparer la voie Flaminienne jusqu’à Ariminum, et voulut que chaque citoyen honoré d’un triomphe employât à la construction des autres routes, les fonds
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