11 Septembre... 1973
radicaux de sa coalition qu'en soutenant
les forces opposées à l'établissement d'un régime marxiste-léniniste". Ce
texte révèle l'une des principales craintes de la Maison blanche : il faut
éviter que le gouvernement socialiste soit pris comme "un modèle"
dans le reste de l'Amérique latine. Les États-Unis adoptent une "attitude
froide" [21] dans leurs relations bilatérales avec le Chili, tandis qu'ils font tout pour
miner le gouvernement de Salvador Allende, en exerçant des pressions
économiques et en organisant son isolement diplomatique.
Le programme du gouvernement de Salvador Allende
repose, en premier lieu, sur l'existence d'un secteur étatique dominant. Il
prévoit la nationalisation des entreprises opérant dans les secteurs qui
conditionnent le développement économique et social du pays : la production et
la distribution d'énergie électrique, le transport ferroviaire, aérien et
maritime ; les communications ; la production et la distribution du pétrole et
de ses dérivés ; la production de gaz liquéfié ; la sidérurgie ; le ciment ; la
pétrochimie et la chimie lourde ; la cellulose et le papier.
À côté du secteur public, un autre ensemble est
constitué par les petites et moyennes entreprises, dont l'activité est régulée
par une planification générale et auxquelles l'État apporte une assistance
technique et financière.
Enfin, un troisième groupe est constitué par des
sociétés d'économie mixte, combinant capitaux publics et privés.
L'application
de ce programme est difficile, faute de majorité au parlement. Les prochaines
élections législatives ne sont prévues qu'en mars 1973. L'Unité populaire ne
peut espérer renforcer sa position à la Chambre des députés avant cette date.
En dépit de ces difficultés, les socialistes
parviennent à imprimer leur marque sur la société chilienne. Entre 1970 et 1972,
318 entreprises sont nationalisées. Pour étatiser le secteur bancaire, le
gouvernement négocie d'abord avec les banques étrangères. Il parvient à un
accord, qui consiste à acheter les filiales en utilisant des crédits accordés
par les maisons-mères. Les banques privées nationales sont acquises par le
biais d'achats d'actions. Au total, 11 d'entre elles, sur 23, deviennent la
propriété de l'État, mais Allende et son équipe échouent à étatiser les
établissements les plus importants. Ils conservent, cependant, le contrôle de
la banque centrale, la Banque nationale du Chili.
Ces réalisations font partie de la révolution avec "empanadas [22] et vin rouge" promise par l'Unité populaire pendant sa campagne
électorale. Mais elles se heurtent aux contre-mesures de l'opposition, qui
organise la pénurie et le désordre. Les chefs d'entreprise refusent de livrer
leurs produits. Les aliments et les biens de première nécessité viennent à
manquer, tandis que les manifestations, les grèves et les attentats se
multiplient. De nombreuses personnalités sont assassinées.
Selon l'historien chilien Armando de Ramón :
"Une fois au pouvoir, on a réalisé qu'il n'était pas possible de répondre
à toutes les attentes de la population, et les empanadas et le vin ont
été réservés pour plus tard. Les changements dans la structure de la terre,
dans la propriété des industries ou des banques et le contrôle des prix ont
entraîné, contrairement à ce qui était souhaité, un déclin de la production qui
a contribué à produire une inflation élevée, une pénurie de biens et,
finalement, l'apparition du marché noir [23] ".
Des divergences commencent à apparaître au sein de
la coalition gouvernementale. Les radicaux de gauche prétendent que la
politique de l'Unité populaire est dirigée contre la classe moyenne et oublie
"que tout le développement social du Chili, particulièrement au cours de
ce siècle, a été le produit de l'effort opiniâtre du Parti radical pour
démocratiser le pays, en incorporant de plus en plus de conquêtes sociales pour
tout le peuple sans exclusion [24] ".
Le Parti radical finit par se retirer du gouvernement.
La rupture avec le Parti démocrate chrétien
survient lors des élections législatives partielles du 18 juillet 1971, où doit
être renouvelé le siège d'un député de Valparaiso. Le Parti démocrate chrétien
demande ce poste à l'Union populaire, qui refuse. Dépité, il s'allie au Parti
national.
Mais le gouvernement souffre surtout de
l'agitation organisée dans la rue. La
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