11 Septembre... 1973
première manifestation
antigouvernementale se déroule le 1er décembre 1971. C'est un rassemblement de
ménagères qui protestent contre la pénurie. La "marche des casseroles
vides" mobilise un très grand nombre de femmes et dégénère en un
affrontement avec les militantes du Mouvement de la gauche révolutionnaire, un
groupe situé à la gauche de l'Union populaire. A compter de ce jour, les
opposants prennent l'habitude de faire résonner des casseroles depuis chez eux,
tous les soirs, à la même heure.
De grandes discussions agitent les principaux
partis de l'alliance, où s'opposent les éléments modérés et radicaux, qui ont
de plus en plus de mal à travailler ensemble. De son côté, le Parti démocrate
chrétien s'unit définitivement avec le Parti national au sein d'une
organisation commune, la Confédération démocratique, créée en 1972. La droite a
désormais les moyens de censurer les ministres de l'Union populaire au
parlement. Le pays est divisé en deux blocs antagonistes et irréconciliables.
Hostile à toute évolution structurelle, hormis à
la nationalisation du cuivre, en 1971, l'opposition commandite des attentats
contre les installations de service public et pratique une obstruction
parlementaire totale et permanente. Elle s'oppose en particulier à la réforme
agraire engagée par Eduardo Frei et appliquée par l'Union populaire et les
militants du Mouvement de la gauche révolutionnaire.
En août 1972, les unions patronales organisent une
grève de 24 heures, qui est suivie à la fois par la Confédération de la
production et du commerce, la Société nationale d'agriculture, la Société de
promotion manufacturière, la Chambre de commerce et la Confédération des
petites entreprises. En septembre, elles se donnent pour but de renverser le
gouvernement d'Allende. La Fédération des conducteurs de camions, taxis et bus
exige, grève et blocage des routes à l'appui, une hausse des tarifs, un
meilleur approvisionnement en pièces détachées et en véhicules neufs. Allende
réplique en dénonçant l'existence du plan de renversement. En octobre, le chaos
s'installe. Le mécontentement s'amplifie quand le gouvernement annonce son
intention de privatiser la papeterie de Puente Alto. Non sans cynisme,
l'opposition proteste contre cette mesure au nom de "la liberté de la
presse".
À bout d'argument, le gouvernement assigne en
justice les dirigeants la Fédération des camionneurs. Mais ce geste ne fait que
durcir le blocage et accentuer la pénurie. Le Parti démocrate chrétien, l'Ordre
des médecins et la Fédération des étudiants se joignent au mouvement.
Face à l'ampleur de la crise et pour tenter de se
concilier l'opposition, le gouvernement démissionne en bloc le 1er novembre
1972, pour être remplacé par un cabinet composé en partie de militaires. Le
poste de ministre de l'Intérieur est attribué au général Carlos Prats,
commandant en chef de l'Armée de terre, dont la charge est confiée,
temporairement, au général Augusto Pinochet Ugarte. L'amiral Ismael Huerta est
nommé aux Travaux publics et aux Transports. Le général de brigade aérienne
Claudio Sepúlveda devient ministre de l'Industrie minière.
Les grèves cessent immédiatement. Les grévistes
acceptent tout ce que le gouvernement leur a proposé au cours semaines
précédentes. L'arrêt de travail a duré 26 jours. Le jour où le nouveau
gouvernement prête serment, le 2 novembre, le journal Le Monde commente
les événements : "Les militaires ont accepté de collaborer directement
avec Allende. Mais qu'ont-ils demandé en échange ? Ils ont probablement exigé
qu'on ne les oblige pas à "faire de la politique". Cela signifie-t-il
qu'Allende va oublier la "transition vers le socialisme" qui figure à
son programme ? Même si le général Prats, comme on peut l'espérer, exerce sa
charge de ministre de l'Intérieur d'une manière "technique" et non
"politique", il est symptomatique que sa promotion se produise au
moment même où est approuvée la loi qui permet aux forces armées d'avoir les
pleins pouvoirs pour interdire toute possession d'armes, quelles qu'elles
soient".
Parallèlement, l'opposition entre en campagne pour
tenter de remporter les élections législatives de mars 1973 et d'obtenir la
majorité des deux tiers requise par la Constitution pour destituer Allende.
Mais en dépit du chaos, de la pénurie et de la violence, elle ne parvient à
réunir que 54,6% des voix. Avec 43,5% des
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