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1914 - Une guerre par accident

1914 - Une guerre par accident

Titel: 1914 - Une guerre par accident Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Georges Ayache
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d’un roman d’espionnage d’Erskine Childers, The Riddle of the Sands .
Devenu rapidement un best-seller, l’ouvrage décrivait comment le Reich
préparait en grand secret l’invasion de l’Angleterre à partir des îles
Frisonnes. Le retentissement de cet ouvrage de fiction avait d’ailleurs
entraîné à l’époque une réorganisation des défenses de la côte est de
l’Angleterre.
    Le Premier Lord de l’Amirauté se situait en outre dans la
lignée de ses prédécesseurs. Comme eux, il en tenait pour le «  two-power
naval standard  », une expression savante désignant une idée assez
simple : la flotte anglaise, première au monde, devait être aussi
importante que la somme des forces des deux autres plus grandes puissances
navales, quelles qu’elles fussent.
    Cela n’empêchait pas Churchill d’entreprendre à la hussarde
des changements qui bousculaient cette vénérable institution qu’était la Royal
Navy. Dès son arrivée à l’Amirauté, il avait poussé vers la sortie sans trop
d’égards le vénérable amiral Arthur Wilson, un homme deux fois plus âgé que
lui. Il mit sur pied un état-major de guerre qu’il songeait confier à l’amiral
Fisher dont il comptait faire en même temps un Premier Lord naval. Sir John
Arbuthnot Fisher était une légende. « Le plus grand marin depuis
Nelson », prétendaient les admirateurs de celui qui se présentait lui-même
comme « impitoyable, implacable et inflexible ».
    Bien sûr, Fisher avait aussi ses détracteurs et ils étaient
influents. Churchill dut en rabattre et nommer à sa place un amiral assez
terne, Francis Bridgeman. Il désignerait néanmoins pour le seconder le prince
Louis de Battenberg. Le choix était judicieux. Battenberg – dont les
descendants transformeraient le patronyme en Mountbatten – était membre de
la famille royale. D’origine germanique, l’homme était jalousé, dans la
Kriegsmarine aussi bien que dans la Royal Navy. Au cours de manœuvres à Kiel,
un officier de Tirpitz avait eu l’impudence de lui reprocher de servir l’Empire
britannique. L’officier en question dut se souvenir longtemps de la réplique
princière :
    — Monsieur, lorsque je me suis engagé dans la Royal
Navy en 1868, l’empereur d’Allemagne n’existait pas [82] …
    Churchill parvint à « pacifier » l’Amirauté. Il le
fit à sa manière, vite et fort. Trop parfois, au goût de certains. Un jour, à
l’issue d’une conférence de stratégie, un des amiraux présents eut le malheur
de s’emporter et de reprocher au Premier Lord de déroger aux traditions de la
marine britannique. Churchill avait répliqué froidement, sur ce ton rogue qui
lui était familier :
    — Les traditions ? Je vais vous dire, moi, en quoi
elles consistent : rhum, sodomie, fouet [83] …
    Loin d’être germanophobe, Churchill avait tout de même du
mal à comprendre la mentalité germanique. Pourquoi les Allemands
s’obstinaient-ils à vouloir rivaliser avec les Anglais sur les mers ?
Depuis une dizaine d’années, ils construisaient des cuirassés à un rythme
effréné. À raison de deux puis de trois unités par an. À cette cadence-là, la
flotte de guerre allemande dépasserait la flotte britannique au plus tard vers
1920. Et ceci était juste inacceptable pour les sujets de Sa Majesté dont lord Salisbury
avait si finement résumé la mentalité : « La force de l’Angleterre ne
dépend pas de ses liens avec d’autres puissances. Elle réside dans ses falaises
de craie et dans sa flotte [84] . »
    Le véritable instigateur de cette course aux armements était
le grand amiral Alfred von Tirpitz. Dans le passé, il avait été
l’instigateur de plusieurs lois navales très agressives que le Reichstag avait
votées comme un seul homme. La dernière remontait à 1912. Plus grave encore, il
avait relevé le défi des dreadnoughts , ces cuirassés de nouvelle
génération qui étaient considérés comme des armes de guerre redoutables.
L’Allemagne construisait désormais quatre bâtiments de ce type par an !
    Le langage des diplomates de la Wilhelmstrasse pouvait bien
se faire mesuré. Les actes des militaires allemands parlaient d’eux-mêmes.
Churchill ne cessait de tirer la sonnette d’alarme auprès du cabinet Asquith.
En février 1912, il ne s’était pas opposé à ce que le secrétaire à la
Guerre, lord Haldane, effectue une mission exploratoire à Berlin. Mais,
alors que son collègue était encore en

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