1941-Le monde prend feu
la
rencontre du bon Dieu », confie le conseiller de Roosevelt Harry Hopkins.
« Je me demande si le président va m’aimer », s’est
interrogé plusieurs fois Churchill qui veut séduire Roosevelt, le convaincre de
faire un pas de plus vers l’entrée en guerre.
Le président Roosevelt est arrivé à bord du cuirassé Augusta. Le dimanche 10 août au matin, la rencontre commence par un service
religieux émouvant et grandiose.
« Aucun des participants, raconte Churchill, n’oubliera
jamais le spectacle de cette assemblée massée sur le pont arrière du Prince
of Wales. »
Là, sont réunis autour des deux hommes d’État les amiraux, les
équipages.
« La symbolique de l’ Union Jack et de la Bannière
étoilée flottant côte à côte, les chapelains britanniques et américains se
relayant pour réciter les prières, les rangs serrés des marins américains et
britanniques entremêlés, utilisant les mêmes livres de prières, prononçant les
mêmes implorations, chantant les mêmes hymnes familiers, chaque parole remuait
les cœurs. Ce fut un grand moment à vivre… »
Parmi ces hommes d’équipage, combien allaient mourir ?
Churchill a choisi les hymnes. Il chante avec les marins.
En avant, soldats
du Christ
Marchez à la
guerre
Avec la croix
de Jésus
Qui vous
précède
Christ le
Maître et le Roi
Vous conduit
contre l’ennemi
En avant, à
la bataille
Unis derrière
son étendard !
Le 12 août, Churchill et Roosevelt signent la Charte
de l’Atlantique qui énonce des principes généraux (libre détermination des
peuples, abandon de l’usage de la force, etc.) définissant la démocratie
libérale, en lutte contre la tyrannie. C’est l’ Ouest – l’Occident –
qui est défini.
« J’avais cru, dira Staline à Anthony Eden – le
ministre des Affaires étrangères anglais – quelques semaines plus tard, que
la Charte de l’Atlantique était dirigée contre les puissances qui visent
l’hégémonie mondiale. Il semble maintenant que la Charte était dirigée contre l’Union
soviétique. »
Eden élude, évoque la détermination de Churchill à conclure
une « grande alliance » avec les États-Unis et l’URSS, mais il ne
peut cacher les réticences du président des États-Unis.
Car Roosevelt s’est dérobé devant un engagement précis. Et, à
son retour aux États-Unis, a déclaré que « rien n’avait changé… que les
États-Unis n’étaient pas plus près de la guerre ».
Et le principe de la conscription n’a été voté qu’à une voix
de majorité par le Congrès, le 12 août. C’est la mesure des réserves de l’opinion
américaine devant la perspective d’une participation au conflit.
Il est vrai que la Russie est entrée dans la guerre et
Churchill a aussitôt montré, lui, l’antibolchevique résolu, sa volonté « d’apporter
toute l’aide possible à la Russie et au peuple russe ».
Et l’invasion de la Russie écarte le danger d’un débarquement
des Allemands dans les îles Britanniques, et cela au moins pour quelques
semaines…
Churchill confie à son secrétaire :
« Si Hitler envahissait l’enfer, je mentionnerais au
moins le diable en termes favorables à la Chambre des communes. »
Mais ce « diable » de Staline est exigeant.
Il remercie Churchill pour ses discours chaleureux, son
enthousiasme, sa compassion, mais il n’est pas homme à se contenter d’entendre
le Premier Ministre déclarer : « Le péril de la Russie est notre
péril… Redoublons donc d’efforts et frappons à l’unisson avec tout ce qu’il
nous reste de vie et de puissance. »
Staline réclame des armes et, alors que les armées de Hitler
menacent en cet automne 1941 Leningrad et Moscou, insiste pour que l’Angleterre
ouvre un « second front » à l’ouest de l’Europe pour détourner
quelques divisions allemandes du front russe.
Comment Churchill pourrait-il satisfaire Staline alors que l’Angleterre
manque d’hommes, que les convois sont soumis aux attaques des sous-marins, ces
diaboliques U-Boots, que de nouveaux dangers se profilent ?
En Asie, les Japonais qui ont occupé l’Indochine française
menacent Singapour.
À Tokyo, le Premier ministre, le prudent Konoyé, a
démissionné et a été remplacé, à la mi-octobre 1941, par le général Tojo, partisan
d’une expansion japonaise dans toute l’Asie du Sud-Est.
Comment y résister sinon en alertant
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