1944-1945-Le triomphe de la liberte
l’automne 1944 alors
que tueries et massacres, exterminations de dizaines de milliers de déportés se
poursuivirent pendant des mois, jusqu’au printemps 1945.
La responsabilité en incombe-t-elle à Eisenhower ?
Interrogés après la fin de la guerre, les généraux
allemands – Westphal, Blumentritt – soulignent qu’en
septembre-octobre 1944, le choix du point d’attaque était moins important que
le fait de concentrer tous ses efforts pour faire aboutir cette attaque.
« La situation générale du front occidental était
extrêmement mauvaise, écrit Westphal. Une lourde défaite en un point quelconque
de ce front, qui présentait des brèches en de si nombreux points qu’il ne
méritait même pas ce nom, aurait pu mener à la catastrophe si l’ennemi
exploitait ses chances avec habileté. Un danger particulièrement aigu provenait
du fait que pas un seul pont sur le Rhin n’avait été miné. Il fallut des
semaines pour réparer cette omission. […] Jusqu’à la mi-octobre, l’ennemi
aurait pu percer n’importe où avec facilité, puis il aurait pu franchir le Rhin
et pénétrer profondément en Allemagne sans rencontrer d’opposition. »
Le général Blumentritt ajoute :
« Berlin et Prague auraient été occupés par les
Occidentaux avant l’arrivée des Russes. »
42.
Les Russes ?
Churchill, en cet automne 1944, ne pense qu’à eux, à cette
armée Rouge qui est restée immobile sur la rive est de la Vistule pendant que
les Polonais insurgés se faisaient massacrer dans les ruines de Varsovie.
Cette armée Rouge qui est le glaive de Staline et qui
découpe les Balkans, l’Europe centrale au mieux des intérêts de la Russie et du
communisme.
Quel serait le jugement de l’Histoire si l’Angleterre
n’avait sacrifié tant d’hommes, versé son sang, sa sueur et ses larmes pour
arracher l’Europe des griffes du nazisme que pour la livrer aux tueurs de Katyn
et aux spectateurs cyniques de la destruction de Varsovie ?
Qui a conscience de cette menace russe ?
Les généraux américains, et le premier d’entre eux
Eisenhower, n’ont qu’une vision limitée au théâtre des opérations militaires.
Roosevelt est soucieux de sa réélection en novembre 1944, et s’imagine être le
seul à pouvoir négocier avec Staline.
Churchill s’emporte, s’impatiente.
Il confie à la fin du mois de septembre 1944, de retour de
Québec où il a rencontré le président des États-Unis :
« Tout pourrait s’arranger si je parvenais à gagner
l’amitié de Staline. Après tout, le président Roosevelt est stupide de penser
qu’il est le seul à pouvoir traiter avec Staline. Je peux parler avec Staline
d’homme à homme et je suis sûr qu’il se montrera raisonnable. »
Il s’interrompt, mâchonne son cigare, le front creusé par de
profondes rides :
« Sinon, il y aura des conséquences sanglantes à
l’avenir. Staline est un homme anormal. »
Puis Churchill se reprend, vante les qualités de Staline,
« ce grand et rude chef de guerre, un homme au courage et à la volonté
inépuisables, qui parle franchement et même carrément, qui possède ce sens de
l’humour salvateur… Je crois lui avoir fait sentir que nous étions dans cette
guerre de bons et fidèles camarades ».
Churchill peut se rendre à Moscou, négocier en tête à tête
sur l’avenir de l’Europe.
« Je vais courtiser Staline comme un homme courtiserait
une jeune fille. Mais après la guerre, je ne veux pas rester seul en Europe
avec l’Ours ! »
Or la fin de la guerre est proche et l’armée Rouge déferle.
Il faut agir vite, alors que, pour la première fois depuis 1940, Churchill sent
que la lassitude gagne le peuple anglais. Assez de sueur, de sang, de
larmes ! Mais tout semble recommencer, en pire.
Les V1, ces bombes volantes – doodlebugs –,
s’abattent sur Londres, au rythme de 70 engins par jour !
À compter du 8 septembre, les V2 s’ajoutent aux V1,
creusant d’immenses et profonds cratères. Chaque V2 est bourré d’une tonne
d’explosifs.
V1 et V2 provoquent en quelques mois (jusqu’en mars 1945)
9 000 tués et 25 000 blessés. Et les dommages matériels
sont considérables.
Cette guerre ne finira donc jamais ?
Churchill sent le désarroi, la lassitude de son peuple.
Aller à Moscou, s’entendre avec Staline, c’est redonner, à
la veille de l’ultime effort, de l’élan à la coalition, du
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