Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
1944-1945-Le triomphe de la liberte

1944-1945-Le triomphe de la liberte

Titel: 1944-1945-Le triomphe de la liberte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
Vom Netzwerk:
et
militaire, n’est rien d’autre qu’une nation qui a été battue en 1940 et qui a
accepté de collaborer.
    Pour bien marquer la différence, lorsque Staline lève son
verre, en présence de De Gaulle, il ne boit qu’à la santé de Roosevelt et de
Churchill et il tient ce dernier informé des conversations avec de Gaulle.
     
    De Gaulle constate qu’il est ignoré de la foule russe et
qu’on ne fait rien pour faire connaître quels sont sa place et son combat.
    La France Libre vaut moins que les Polonais du Comité
National de Lublin.
    On organise pour lui et son ministre des Affaires
étrangères, Georges Bidault, une visite du métro de Moscou, et on les laisse
être bousculés, comme de quelconques voyageurs dont on écrase les pieds. Et
sans doute veut-on ainsi faire comprendre à de Gaulle qu’il ne représente
qu’une petite puissance, encore engluée dans sa défaite.
     
    Quant aux négociateurs russes, ils sont brutaux, aux limites
de l’impertinence et de la vulgarité.
    « Ça manque d’élégance, ça manque de courtoisie, c’est
un régime brutal, inhumain », commente Bidault.
     
    De Gaulle reste impassible, lors des entretiens avec
Staline – les 2, 6 et 8 décembre 1944 –, mais il rend coup pour
coup.
    Lors de la réception qu’il offre dans les locaux de
l’ambassade de France, il s’adresse à Alexander Werth, le correspondant du Sunday
Times , lui parle de sa visite à Stalingrad.
    « Ah ! Stalingrad, dit-il, c’est tout de même un
peuple formidable, un très grand peuple.
    — Les Russes, ah, oui, approuve Werth.
    — Mais non, je ne parle pas des Russes, je parle des
Allemands. Tout de même, avoir poussé jusque-là [5]  ! »
     
    À aucun moment, il ne se laisse démonter, ne cachant pas son
dégoût des scènes d’ivrognerie auxquelles se livrent les Russes, et le premier
d’entre eux, Staline, qui boit directement au goulot des bouteilles de
champagne et menace ses diplomates de les faire fusiller…
    Mais de Gaulle a l’intuition que les Russes, tout en
essayant d’arracher des concessions, signeront à la fin ce pacte
franco-soviétique, et soutiendront la France face aux Anglo-Américains.
    Le communiste Maurice Thorez, gracié, vient d’arriver en
France et, lors du premier meeting qu’il a tenu, il a déclaré :
    « Mener la guerre jusqu’au bout, jusqu’à Berlin, voilà
la tâche unique du moment, la loi pour tout Français… »
    Sans aucun doute, Maurice Thorez applique la politique de
Staline comme il l’a fait en 1939, en soutenant le pacte germano-soviétique, en
désertant et en passant ces années de guerre en Russie…
     
    Donc de Gaulle ne se laisse pas impressionner par le jeu
brutal de Staline. Il a percé à jour le tyran.
     
    Il exige de loger à l’ambassade de France, un bâtiment
dévasté par les bombardements, sans chauffage. Mais cette « vie de
camp » vaut mieux que la « maison des hôtes de l’URSS » rue
Spiridonovka, « truffée de microphones ».
     
    Première réunion au Kremlin. Voici Staline. Si petit,
replet, le teint jaune, la voix ténue, à peine perceptible.
    De Gaulle s’assied en face de lui, de l’autre côté d’une
grande table à tapis vert.
    Staline commence à tracer des figures géométriques au crayon
rouge sur sa feuille de papier. De Gaulle le dévisage. L’homme exprime la
fourberie, l’obstination, la dissimulation.
    « Communiste habillé en maréchal, dictateur tapi dans
sa ruse, conquérant à l’air bonhomme. »
     
    Staline se tait. Et pourtant de Gaulle a le sentiment que
tout va être dit, dès cette première rencontre. Il va parler clair.
    « La frontière géographique et militaire de la France,
dit de Gaulle, est constituée par le Rhin, et l’occupation de cette ligne est
nécessaire à sa sécurité. »
    Staline plisse les yeux, ne s’engage pas. La France a-t-elle
abordé cette question à Londres et à Washington ? demande-t-il.
    On parle des frontières de l’URSS. Là, Staline est précis.
Il veut que les frontières de la Pologne subissent un déplacement de l’est vers
l’ouest : sa frontière avec l’Allemagne sera sur l’Oder et la Neisse.
    En somme, les Russes ont fixé seuls ce qui se passera à
l’est et vont discuter de ce qui doit intervenir à l’ouest, commente de Gaulle.
     
    On déjeune à la Spiridonovka.
    « Ce doit être bien difficile de gouverner un pays
comme la France, dit Staline.
    — Oui, et pour le faire je ne puis

Weitere Kostenlose Bücher