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4 000 ans de mystifications historiques

4 000 ans de mystifications historiques

Titel: 4 000 ans de mystifications historiques Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gérald Messadié
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traites et fut récompensé par de fausses lettres de Marie-Antoinette, rédigées par le complice de La Motte, Rétaux de Villette, et même par une rencontre nocturne dans le parc du château, avec une comédienne qui jouait le rôle de Marie-Antoinette. Rohan n’y vit que du feu. La naïveté du cardinal n’eut d’égale que sa sottise.
    Le collier avait entre-temps changé de mains. La Motte s’en était emparée sous couleur de le remettre à la reine. Rohan se trouva à court de fonds et les deux Hongrois allèrent demander le solde à Marie-Antoinette, excipant du contrat paraphé de fausses signatures. Le pot aux roses fut découvert et les intrigants, parmi lesquels on compta le faux comte et pseudo-mage Cagliostro, « conseiller » de Rohan, furent démasqués. L’indignation du couple royal fut à son comble. La Motte avait été arrêtée, marquée au fer rouge et condamnée à la prison à vie à La Salpêtrière, ses complices (sauf Rétaux de Villette, en fuite à Londres où il était allé vendre les pierres). Les époux royaux exigèrent que Rohan fût traduit en justice. Il le fut et dut abandonner ses charges.
    *
    Les procès avaient démontré que Marie-Antoinette était totalement étrangère à la monumentale magouille où l’on s’était servi de son nom. Ils eurent l’effet inverse. L’affaire du collier avait passionné l’opinion ; elle y fouetta la malveillance à l’égard du trône. Le clergé, étourdiment, y joua son rôle : traîner un cardinal en justice, mais quelle arrogance ! Comme s’il ne connaissait pas le personnage. Pour tout le monde, Rohan était innocent et, en dépit de sa complicité dans une opération où, de toute évidence, un cardinal et grand aumônier n’avait que faire, le Parlement suivit l’opinion et l’acquitta. Pendant les quelques heures qu’il passa à la Bastille, le 29 mai 1785, dix mille personnes allèrent manifester autour de la prison, criant : « Vive le Parlement ! Vive le cardinal innocent ! »
    Selon l’opinion publique, la vraie coupable était la reine, pour laquelle le collier avait été fabriqué et qui l’avait fait acheter en sous-main par le prélat. Un flot de libelles odieux ou obscènes circula dans Paris et les grandes villes, tels que Les Amours de Charlot et d’Antoinette (Charlot étant le comte d’Artois). Les libertins s’empressèrent de voir dans l’affaire du collier la corruption d’une aristocratie qu’il fallait chasser, alors que les principales victimes, le roi et la reine, avaient été d’une probité irréprochable et avaient d’emblée rejeté tout intérêt pour le collier. Mais l’escroquerie de Jeanne de La Motte avait déclenché une perversion des faits qui perdure jusqu’à nos jours.
    La France était alors à quatre ans de 1789. C’était déjà le ressentiment qui rendait la justice. De nos jours, cela s’appelle de l’intox, nom pasteurisé de la calomnie. On peut accuser n’importe qui de n’importe quoi, pourvu qu’il, ou elle, ait le « profil ». La mystification devient meurtrière.

1794
    Les fours crématoires de Vendée
    La Révolution française de 1789, modèle de toutes celles qui suivirent, dont la révolution bolchevique de 1917, est l’une des chasses les plus soigneusement gardées de toutes les générations d’historiens qui suivirent. Elle est l’événement sacré, la scène capitale où la volonté du peuple renversa la tyrannie et instaura l’égalité entre tous les citoyens, la liberté et la fraternité, fondant ainsi la démocratie moderne. Elle illumina le monde et lui montra le chemin du progrès historique.
    Telle est du moins la rhétorique en vigueur près de deux siècles et demi plus tard, mais surtout en France. Des milliers de pages inspirées ont ensuite exalté cette illustration du sens de l’histoire. On peine cependant à discerner comment, onze ans après la décapitation de Louis XVI, Napoléon était sacré empereur et imposait au pays un régime bien plus tyrannique que celui du Bourbon. La succession de monarchies qui vinrent après lui montra, elle, que le sens de l’histoire n’était peut-être pas celui que l’on croyait.
    Toujours fut-il qu’un soin jaloux fut dispensé aux récits de la Révolution. On concéda, pour la vraisemblance, quelques images à la Terreur, vite réprimée assura-t-on, par la Réaction thermidorienne. Mais rien de plus : il ne convenait pas de s’attarder sur quelques horreurs,

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