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À La Grâce De Marseille

À La Grâce De Marseille

Titel: À La Grâce De Marseille Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Welch
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côté d’elle et continua à parler. Parfois elle lui répondait, parfois elle fixait ses mains croisées sur ses genoux ou encore se tournait vers le coin de la salle où jouait le pianiste. Une femme en robe longue noire et chemisier blanc s’approcha avec un plateau contenant un verre à pied rempli de ce vin pétillant pour lui et un grand verre rempli d’un liquide ambré pour la fille. Charging Elk, bien que surpris dans la mesure où il n’avait rien commandé, paya sans broncher les deux francs, puis il prit son verre, imité par la fille. Tous deux se taisaient. L’Indien but quelques gorgées qui, ajoutées au parfum de lavande qui émanait de la fille, lui firent inopinément tourner la tête, de sorte qu’il ferma un instant les yeux. Lorsqu’il les rouvrit, il vit qu’elle le regardait.
    Marie Colet, assise au bord du lit, défaisait les lacets de ses bottines. François était son cinquième client de la soirée, et il serait sans doute suivi de huit ou neuf autres, y compris les deux ou trois qui aimaient conclure une nuit de beuverie par une partie de jambes en l’air. Elle détestait cela. En général, soit ils s’écroulaient et pleurnichaient sur son épaule, soit ils se montraient agressifs parce que l’alcool les rendait impuissants. Et lorsque les filles se plaignaient auprès d’Olivier et lui demandaient de mettre ces ivrognes dehors, il se fâchait. Ces gens-là appartenaient aux meilleures familles de la ville, s’écriait-il. Et que deviendrait son affaire sans leur clientèle ? Si elles n’étaient pas contentes, elles n’avaient qu’à aller faire le trottoir rue Sainte comme les putains de bas étage. Gérard les aiderait volontiers à boucler leurs valises avant de les raccompagner jusqu’à la porte. Au revoir et bon débarras !
    Marie posa ses chaussures côte à côte entre la commode et l’armoire, mit ses bas par-dessus, puis jeta un coup d’œil sur le nommé François qui suspendait son pantalon mouillé au portemanteau. À la vue de ses robustes épaules et de ses bras musclés, elle éprouva un léger frisson de peur. Il était sobre et poli, timide même, mais si grand et fort ! Il ne portait pas de sous-vêtements longs comme la plupart des hommes, mais un simple caleçon qui lui couvrait juste les reins. Dans la pâle lumière, sa peau brune faisait paraître lumineux le blanc de l’étoffe. Marie hésita un instant, puis elle passa sa chemise par-dessus sa tête, espérant qu’il ne remarquerait pas le bleu qui marquait son sein droit, là où la semaine dernière un de ces soûlards l’avait mordue jusqu’au sang.
    Elle attendit. François se retourna. Il tenait quelque chose à la main. Il s’avança vers elle, à moitié en érection, bien loin de ce qu’il avait montré la première fois. Reconnaissant un écrin de velours marron, elle leva les yeux d’un air interrogateur.
    « Pour vous, mademoiselle. » Et, avec un sourire, il poursuivit : « En hommage à votre beauté. »
    Marie saisit le coffret, souleva le couvercle. Sur un coussin de satin bleu reposait un camée blanc. Elle le prit par le ruban d’un bleu un peu plus foncé et admira un instant le profil pur du visage sculpté dessus. Puis elle regarda de nouveau François.
    « Je ne peux pas accepter, dit-elle. C’est trop beau. » Elle caressa du pouce le profil en relief du camée niché au creux de sa paume. Comment avait-il pu savoir qu’elle rêvait depuis toujours d’en avoir un ? « Vous feriez mieux de l’offrir à votre femme. » Elle faillit ajouter avec une ombre d’amertume : « plutôt qu’à votre putain ».
    François éclata d’un rire qui jaillit comme un sourd grondement du plus profond de sa poitrine. Il s’assit à son tour au bord du lit, à côté d’elle, et lui prit le camée des mains. Elle se plaça de trois quarts et sentit sur sa peau nue le contact froid du bijou cependant que l’homme lui nouait le ruban autour du cou. Elle se tourna de nouveau. « Mais c’est destiné à une jolie femme, murmura-t-elle, gardant la tête baissée.
    — Allez vous regarder », dit-il, désignant le miroir au-dessus de la commode.
    Elle se leva et franchit les quelques pas qui la séparaient de la commode. Il la rejoignit et se tint derrière elle. La lumière de la lampe à abat-jour rouge en perles tombait juste sur le camée et le ruban bleu qui encerclait le cou de la jeune fille. Elle porta une main hésitante vers le bijou. L’homme,

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