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À l'ombre des conspirateurs

À l'ombre des conspirateurs

Titel: À l'ombre des conspirateurs Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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disposer un bouquet sur un piédestal de marbre gris, avec des gestes fermes et précis. En reconnaissant l’adorable courbe de son cou, mes yeux s’étaient à moitié fermés. Je m’étais longtemps entraîné pour que mon visage ne trahisse jamais mes sentiments. Cette fois-ci, néanmoins, je ne pus empêcher un sourire de craqueler la peau sèche de mes lèvres. Elle se retourna. C’était Helena Justina.
    Nous avions exactement la même taille. Sans bouger le moindre muscle, je pouvais plonger mon regard dans ses yeux qui trahissaient une surprise irritée. Depuis notre dernière rencontre, l’air de la campagne avait donné une teinte plus foncée à sa peau, tandis que ses cheveux tiraient davantage sur le roux. Elle les avait attachés avec un ruban, dans un style tout simple… qui avait dû demander deux heures de travail à trois servantes. Sa robe blanche paraissait aussi éclatante qu’un lis juste ouvert au soleil du matin. La dame enclose dans cette robe captivait mon attention comme le pollen attire les abeilles.
    — Junon et Minerve ! ragea-t-elle en s’adressant au consul. C’est quoi, ça ? Le tueur de rat local, ou bien un rat qui passait par là ?

31
    Je me retrouvais vraiment coincé. Quand Helena Justina se laissait emporter par ses sentiments, son visage s’animait d’une telle fougue qu’elle dépassait en attrait bien des femmes célèbres pour leur beauté. Mon cœur battait la chamade.
    — Cet intrus a prétendu que tu répondrais de lui, précisa Marcellus du ton de quelqu’un qui en doutait.
    — Oh ! elle va le faire !
    Ses yeux marron foncé me fixèrent avec mépris. Je souris d’un air épanoui, prêt à me rouler à ses pieds comme un chien chatouilleux qui mendie des caresses.
    Aux yeux d’une fille de sénateur, je ne me présentais pas sous mon meilleur jour. Pour vendre le plomb avec Larius, je portais une tunique d’ouvrier : rouge, à une manche. En outre, j’avais attaché autour de ma taille une vieille sacoche de cuir souple pour y conserver la lettre de Vespasien destinée à Crispus. Aujourd’hui, Silvia nous avait expédiés au travail avec des pommes : comme elles se trouvaient à la hauteur de mon aine, cela créait une drôle d’impression. En outre, à chacun de mes mouvements, une règle métallique graduée et une équerre fixées à ma ceinture produisaient un bruit ridicule. Mon torse était rouge de coups de soleil, et je n’arrivais pas à me rappeler quand je m’étais rasé pour la dernière fois.
    — Il s’appelle Marcus Didius Falco. (Elle prononça mon nom comme si elle dénonçait un voleur devant un magistrat.) Il est capable de te raconter plus de sornettes que la pythie de Delphes. Ne l’emploie pas, si tu peux l’éviter, et en tout cas, ne lui fais surtout pas confiance !
    Personne de ma connaissance ne s’était jamais montré plus cruellement injuste avec moi. Je buvais pourtant ses paroles, sans parvenir à me débarrasser de mon sourire béat. Le consul laissa échapper un petit rire indulgent.
    Marcellus entreprit de s’installer dans une chaise longue, du modèle de celles qu’on destine aux invalides. Une bonne douzaine d’esclaves (de robustes campagnards aux pieds plats) nous avaient suivis, l’air respectueux. En voyant leur maître éprouver des difficultés à s’allonger, ils resserrèrent automatiquement leur cercle, mais ce fut Helena qui s’approcha de lui. Elle maintint fermement la chaise pour l’empêcher de bouger, tout en le laissant choisir seul sa position.
    Un homme pouvait envisager de vieillir au côté d’Helena : il se mettrait à écrire ses mémoires, tandis qu’elle se chargerait de le faire manger d’une façon raisonnable, et s’assurerait que personne ne viendrait troubler sa sieste… Sans me regarder, elle s’empara de la gourde de vin et la porta à l’extérieur.
    — Quelle merveilleuse créature ! croassai-je à l’intention du vieillard.
    Un sourire complaisant creusa ses rides. Un artisan à moitié nu pouvait se permettre d’admirer cette grande dame. Il était si évident que leurs chemins ne pourraient jamais se croiser…
    — C’est ce que nous pensons tous. (Il paraissait heureux d’entendre louer ses charmes.) J’ai connu Helena Justina alors qu’elle était encore enfant. Ce fut un jour béni pour ma famille quand elle a épousé mon fils…
    Étant donné qu’elle avait voulu divorcer de Pertinax, qui ensuite s’était fait assassiner,

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