Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
À l'ombre des conspirateurs

À l'ombre des conspirateurs

Titel: À l'ombre des conspirateurs Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
Vom Netzwerk:
l’aider. Les gens qui vont beaucoup au théâtre vont tout de suite s’imaginer que la nigaude profiterait de l’occasion pour me glisser un billet. Moi, je vis dans le monde réel. De plus, je suis bien placé pour vous le dire : les servantes des patriciennes glissent fort rarement des billets aux détectives privés.
    Ceci dit, j’étais donc ravi de pouvoir passer un moment par terre avec elle, car ses genoux étaient délicieusement potelés, elle possédait de grands cils noirs papillonnants, et de petites mains élégantes. Æmilia Fausta se mit à pincer sa cithare avec plus de vigueur, tandis que la servante et moi ramassions la plus grande partie des épingles.
    Quand je me relevai, la noble dame renvoya sa bonne.
    — Enfin seuls ! m’écriai-je joyeusement.
    Fausta en eut le hoquet. Je l’arrêtai au milieu d’une mesure et lui pris la cithare des mains, avec un air tendrement inquiet qui figurait dans ma panoplie de séducteur patenté. Elle parut s’alarmer, et je la regardai droit dans les yeux. Pour être franc, pas les plus beaux yeux dans lesquels j’avais tenté de me noyer.
    — Æmilia Fausta, pourquoi as-tu toujours l’air si triste ?
    Je le savais aussi bien qu’elle, sinon mieux. La sœur du magistrat passait trop de temps à rêver amèrement aux occasions perdues. Elle manquait de confiance en elle. Ce qui m’ennuyait le plus, c’est qu’à 25 ans, elle laissait ses servantes lui modeler le visage d’une femme de 40. Malgré tous les miroirs d’argent dans son boudoir, elle n’avait jamais dû s’examiner attentivement.
    — Je serais heureux de t’écouter, dis-je d’une voix compatissante, afin de l’inciter aux confidences. Ce type n’en vaut pas la peine, s’il est cause d’un tel chagrin… Tu veux en parler ?
    Mon élève s’autorisa un soupir prometteur.
    — Non, répondit-elle.
    Je restai tranquillement assis avec un air contrarié, puis lui tendis sa cithare. Elle la prit, mais sans faire mine de vouloir en jouer.
    — Ça arrive à tout le monde, affirmai-je. Ceux – ou celles ! – qui s’accrochent à toi n’en valent pas la peine, et ceux qui t’intéressent ne t’accordent pas un seul coup d’œil !
    — Exactement ce que me dit mon frère.
    — Quel est le nom de notre héros ? insistai-je.
    Elle faisait exprès durer le suspense, feignant d’avoir mal compris ma question. Elle en sourit elle-même, mais sa mélancolie si profondément enracinée l’emporta.
    — Aufidius Crispus, comme tu le sais parfaitement !
    — Qu’est-ce qui n’a pas marché ? demandai-je après lui avoir laissé le temps de se calmer.
    — Nous devions nous marier, mais il trouvait toujours des prétextes pour retarder le mariage. Jusqu’au jour où il devint évident, même pour moi, que le délai serait permanent.
    — Des choses qui arrivent. S’il n’était pas tout à fait sûr…
    — Je connais toutes ses excuses ! assena-t-elle d’une voix au débit trop rapide.
    — J’en suis certain ! Mais la vie est trop courte pour souffrir inutilement.
    Æmilia Fausta me regarda avec les yeux sombres et fatigués d’une femme inutilement malheureuse pendant une grande partie de sa vie. Je déteste voir une femme en proie à une telle tristesse.
    — Laisse-moi t’aider à apaiser ton chagrin, implorai-je en lui décochant un regard appuyé.
    Elle était bien trop imbue de sa propre supériorité pour s’autoriser une expression autre que méprisante. Je me tus quelques instants, avant de lâcher :
    — Et sais-tu où est Crispus ?
    N’importe quelle femme sensée m’eût fendu le crâne avec la cithare.
    Il ne se produisit aucun drame, mais il était clair qu’elle ignorait où se trouvait le marin de luxe.
    — J’aimerais tellement le savoir. Tu me le diras, si tu l’apprends ? implora-t-elle.
    — Non, tu as besoin de l’oublier ! Reprends plutôt ta cithare.
    Elle jouait encore, et il s’était créé une atmosphère susceptible d’induire en erreur un étranger, quand une voix allègre s’écria : « Ne vous dérangez pas, c’est moi ! » Helena Justina fit son entrée.
    J’étais justement en train d’indiquer la position des doigts pour un certain passage, la meilleure méthode consistant à passer mes bras autour d’elle, assis sur un siège à deux places.
    — Ooooh ! c’est touchant, n’arrêtez surtout pas, susurra Helena sur un ton facétieux qui me foudroya, tandis qu’Æmilia Fausta

Weitere Kostenlose Bücher