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Abdallah le cruel

Abdallah le cruel

Titel: Abdallah le cruel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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faisait
cadeau de son ancien secrétaire, Mutarrif protesta pour la forme. Il affirma
qu’il avait toujours considéré l’ancien moine comme un homme libre et que ce
serait l’insulter gravement que de l’accepter au même titre que les destriers
et les étoffes dont le seigneur de Bobastro lui avait fait don. En fait, le
principal intéressé n’était nullement offensé. Visiblement, il était ravi
d’aller à Kurtuba où il pourrait faire fructifier ses affaires. Mutarrif
repartit donc avec ce curieux compagnon auquel, dès son arrivée dans la
capitale, il octroya son affranchissement à condition qu’il se convertisse à
l’islam. Valério s’empressa de devenir Musulman et adopta le nom d’Abd
al-Rahman Ibn al-Mutarrif, se désignant de la sorte comme le mawla, le
client du prince.
    Celui-ci n’eut qu’à se louer de ses
services. Quand Mutarrif se mit d’accord avec les Banu Khaldun et les Banu
Hadjdjadj pour provoquer la perte du wali d’Ishbiliyah et qu’ils durent prouver
à l’émir que ce dernier avait comploté contre lui avec Omar Ibn Hafsun,
l’ancien moine se chargea de forger, de toutes pièces, une correspondance entre
les deux hommes. C’est en admirant le travail de son complice que le prince se
résolut à franchir un pas supplémentaire dans l’ignominie. Jusque-là, son père
était resté insensible aux violentes critiques qu’il avait formulées contre son
demi-frère et ne manquait jamais une occasion de lui rappeler que c’était à Mohammad
qu’il devait d’avoir obtenu la possibilité de reparaître à la cour. En fait,
Abdallah avait pris conscience de la terrible rivalité qui opposait ses deux
fils et il y trouvait avantage. La modération dont l’aîné avait fait preuve à
Ishbiliyah lui avait permis de donner des gages aux turbulents et influents
muwalladun de Kurtuba soucieux du sort de leurs frères. Lorsqu’il avait reçu
leurs chefs en audience, il avait écouté avec attention leurs arguments et
leurs doléances et avait feint de leur donner raison en affirmant d’un ton
ému : « Je vous considère comme mes loyaux sujets et vous n’ignorez
pas les risques qu’encourt, pour défendre les vôtres, la prunelle de mes yeux,
le prince héritier. Parce qu’il a pris le parti de vos parents, il a dû se
réfugier chez l’évêque d’Ishbiliyah et risque à tout moment de périr sous le
poignard d’un Arabe fanatique. Cessez donc de vous comporter en lâches et
imitez mon exemple. Chaque jour, je tremble pour la vie de Mohammad et je tais
mes craintes car elles sont indignes d’un monarque. Allah le Tout-Puissant et
le Miséricordieux me viendra en aide et punira les félons comme il se
doit. »
    Il en avait profité pour extorquer à
ses interlocuteurs de grosses sommes d’argent sous prétexte de lever une armée
qui partirait sous peu rétablir l’ordre à Ishbiliyah. Flattés de cet honneur,
les muwalladun de Kurtuba avaient rivalisé de générosité et les plus naïfs
avaient intrigué auprès du hadjib afin que leurs fils soient nommés officiers
et accompagnent lors de l’expédition l’oncle de l’émir, Hisham, nommé à la tête
des troupes. Dans le même temps, par l’intermédiaire de Mutarrif, Abdallah
avait reçu secrètement les émissaires des Banu Khaldun et des Banu Hadjdjadj et
les avait assurés de sa bonne volonté. Il avait déploré devant eux l’indulgence
coupable de Mohammad envers les muwalladun. Son fils, avait-il dit, s’était
laissé abuser par le wali Umaiya Ibn Abd al-Ghafir al-Khalidi et avait désobéi
à ses ordres. Il attendait le moment propice pour l’obliger à changer
d’attitude.
    Des semaines durant, Abdallah avait
joué sur les deux tableaux jusqu’à ce que Mutarrif lui apporte la
« preuve » de la trahison de Mohammad : deux lettres envoyées
par le prince héritier à Omar Ibn Hafsun. C’est dans ces circonstances que l’émir
avait dépêché Hisham à Ishbiliyah et avait ordonné l’arrestation de son aîné,
en dépit des protestations et des supplications de l’Umm Wallad Durr. La
culpabilité de son aîné ne faisait aucun doute à ses yeux. Quand l’un de ses
conseillers, Ibrahim al-Sarakusti, lui avait fait remarquer que Mutarrif était
bien mal placé pour accuser son demi-frère de relations avec Omar Ibn Hafsun,
lui qui s’était jadis réfugié à Bobastro, il avait paru être ébranlé par
l’argument mais s’était vite repris :
    — Mutarrif était et est

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