Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
cette décision ne f˚t en rapport avec l'expédition en Asie, il finit, après une longue réflexion, par envoyer un messager à Pixodaros, afin d'informer ce dernier qu'il s'offrait lui-même en mariage. Mais le roi l'apprit par ses espions. Il fut pris d'une rage terrible et décida d'annuler le projet d'alliance matrimo niale, désormais compromis.
Eumène communiqua cette mauvaise nouvelle à Alexandre.
" Mais comment t'est venue l'idée de faire une chose pareille ? lui demanda-t-il. Pourquoi ne m'en as-tu pas parlé ? Pourquoi ne m'as-tu pas consulté ? Je t'aurais dit que.. .
--que m'aurais-tu dit ? éclata Alexandre, à la fois inquiet et irrité. Tu te contentes d'exécuter les ordres de mon père ! Tu me tiens à l'écart de tout !
--Tu n'es plus toi-même, répliqua Eumène. Comment as tu pu penser que Philippe allait g‚cher l'avenir de son héritier au trône en lui donnant pour épouse la fille d'un serviteur de son ennemi, le roi des Perses ?
--J'ignore si je suis encore l'héritier de Philippe. Il ne me le dit pas, il ne me dit rien. Il consacre tout son temps à sa nou velle épouse et à leur bébé. Et vous aussi, vous m'avez aban donné. Vous avez peur de me fréquenter parce que vous pen sez que je ne serai bientôt plus l'héritier du souverain! Considère un peu la situation: combien d'enfants a mon père ? Et puis, Amyntas pourrait trouver des appuis: au fond, il était l'héritier avant ma naissance, et ces temps derniers Philotas a passé plus de temps en sa compagnie qu'en la mienne Et Attale n'a-t-il pas affirmé que sa fille accoucherait de l'héritier légitime ? Eh bien, un garçon vient de naître. "
Eumène observa un instant de silence. Il regardait Alexandre arpenter la pièce, attendant qu'il se calme. quand il le vit s'im mobiliser devant la fenêtre, le dos tourné, il reprit la parole:
" Il faut que tu obtiennes une entrevue avec ton père, même s'il a plutôt, à l'heure qu'il est, envie de t'égorger. Et il n'a pas , nt ièrement tort.
--Tu vois ? Tu es dans son camp !
--Tais-toi ! Cesse de me traiter de cette façon ! Je me suis toujours comporté loyalement à l'égard de ta famille. J'ai tou jours essayé
d'apaiser vos querelles car je considère ton père comme un grand homme, le plus grand que l'Europe ait jamais connu depuis un siècle, et parce que j'ai de l'affection pour toi, maudit têtu ! Allez, donne-moi un exemple, un seul exemple d'action commise contre toi, de chagrin que je t'ai causé
depuis que nous nous connaissons, c'est-à-dire depuis de nombreuses années ! Vas-y, parle, j'attends. "
Alexandre ne répondit pas. Il se tordait les mains et se gar dait bien de se retourner, voulant cacher les larmes qui embuaient ses yeux. Il se sentait bouillir de rage, car il se rendait compte que la colère de son père l'effrayait encore comme au temps de son enfance.
" Il faut que tu l'affrontes. Maintenant. Maintenant qu'il est furieux de ce que tu as fait. Montre-lui que tu n'as pas peur, que tu es un homme, que tu es digne de t'asseoir un jour sur son trône. Admets ton erreur et demande-lui pardon. C'est cela, le vrai courage.
-- D'accord, accepta Alexandre. Mais rappelle-toi que Philippe s'est déjà
précipité sur moi en brandissant une épée.
--Il était so˚l.
--Pourquoi, comment est-il à présent ?
--Tu es injuste envers lui. Il a fait pour toi tout ce qui était en son pouvoir. Sais-tu combien il a investi sur ta personne ? Le sais-tu ? Eh bien moi, je le sais, parce que je tiens ses comptes et parce que je classe ses archives.
--Je ne veux pas le savoir.
--Au moins cent talents, une somme disproportionnée: un quart du trésor de la ville d'Athènes au sommet de sa splendeur.
--Je ne veux pas le savoir !
--Il a perdu un oeil au combat, et il est boiteux pour le res tant de ses jours. Il a construit pour toi le plus vaste empire qui ait jamais existé à
l'ouest des Détroits, et maintenant qu'il t'offre l'Asie, tu contrecarres ses projets, tu lui reproches les quelques plaisirs qu'un homme de son ‚ge peut encore tirer de la vie. Va le trouver, Alexandre, et parle-lui, avant qu'il en prenne lui-même l'initiative.
--D'accord ! Je vais l'affronter. "
Et il sortit en claquant la porte.
Eumène le poursuivit dans le couloir. " Attends ! Attends donc !
--quoi encore ?
--Laisse-moi d'abord lui dire un mot. "
Alexandre s'effaça devant lui et, en secouant la tête, le regarda gagner d'un pas rapide l'aile orientale du
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