Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
ferait sans doute plaisir à notre père. "
Cléop‚tre sembla se calmer, et ils commencèrent à se racon ter comment ils avaient passé cette année en l'absence l'un de l'al~tre. La princesse tremblait chaque fois que son frère lui relatait une aventure particulièrement captivante ou lui par lait des dangereuses poursuites effectuées le long des gorges sauvages des monts illyriens.
De temps à autre, Alexandre s'interrompait: il voulait savoir comment elle s'habillerait pour ses noces, comment elle comptait mener son existence dans le palais royal de Boutrotos. Mais il lui arrivait aussi de la contempler en silence, d'une façon qui lui était particulière: en souriant légèrement et en penchant la tête vers la droite.
" Pauvre Perdiccas, dit-il bientôt, comme frappé par une pensée subite.
Il est éperdument amoureux de toi, et quand il a appris que tu allais te marier, il a sombré dans le désespoir.
--J'en suis désolée. C'est un gentil garçon.
--Plus que ça. Mon expérience me dit qu'il deviendra un jour l'un des meilleurs généraux de Macédoine. Mais il n'y a rien à faire: chacun de nous suit son destin.
--Oui ", acquiesça Cléop‚tre.
Le silence s'abattit soudain sur les deux jeunes gens, qui avaient pris tant de plaisir à se retrouver après leur longue séparation: ils écoutaient maintenant l'un et l'autre la voix de leurs sentiments.
" Je crois que tu seras heureuse avec ton époux, reprit iAlexandre. C'est un jeune homme intelligent et courageux, et il est capable de rêver. Tu seras pour lui comme une fleur ;caressée par la rosée, comme le sourire du printemps, comme
une perle ench‚ssée dans l'or. "
Cléop‚tre posa sur lui ses yeux luisants. " Est-ce ainsi que tu me vois, mon frère ?
--Oui. Et c'est ainsi qu'il te verra, lui aussi, j'en suis certain. "
Il lui effleura la joue d'un baiser et la quitta.
Il était tard quand il regagna ses appartements, après son année d'absence: le parfum des fleurs qui l'ornaient et l'odeur de son bain caressèrent bientôt ses narines.
Les lanternes diffusaient une clarté intime et chaude; son strigfle~ son peigne et son rasoir étaient bien alignés près de la baignoireJ et Leptine était assise sur un tabouret, seulement vêtue d'un court chiton.
Elle se précipita vers lui dès qu'elle l'aperçut et se jeta à
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ses pieds, refermant ses bras sur ses genoux et le couvrant de baisers et de larmes.
" Ne veux-tu pas m'aider à prendre mon bain ? lui demanda Alexandre.
--Si, si, bien s˚r, mon seigneur. Tout de suite. "
Elle le déshabilla et attendit qu'il s'immerge dans la grande baignoire, puis elle commença à le caresser doucement avec une éponge. Elle lava ses cheveux doux et lisses, les sécha et versa sur sa tête une huile précieuse, provenant de la lointaine Arabie.
quand il sortit de l'eau, elle le couvrit d'un drap et le condui sit à
son lit. Puis elle se déshabilla à son tour et le massa lon guement pour détendre ses membres; mais elle ne le parfuma pas, car rien n'était plus-beau et plus agréable à ses yeux que l'odeur naturelle de sa peau.
Lorsqu'elle vit qu'il se laissait aller et qu'il fermait les yeux à demi, elle s'allongea auprès de lui, nue et tiède, et parsema son corps de baisers.
Eurydice accoucha d'un garçon à la fin du printemps, peu avant la date fixée pour les noces de Cléop‚tre et d'Alexandre d'…pire, et cet événement refroidit à nouveau les relations du prince et de son père.
Incompréhensions et désaccords se multiplièrent. Ils furent aggravés par la décision de Philippe d'éloigner de la cour les amis les plus intimes de son fils, en particulier Héphestion, Perdiccas, Ptolémée et Séleucos.
Philotas, qui se trouvait alors en Asie, s'était montré en revanche relativement tiède à l'égard d'Alexandre après son retour. Il commença même à fréquenter ouvertement Amyntas, qui avait été l'héritier du trône avant la naissance de son cousin.
Tous ces éléments, doublés d'une familiarité perdue avec la cour et d'une sensation aiguÎ d'isolement, ne firent qu'ac croître, chez Alexandre, un manque d'assurance qui le pous sait à prendre des initiatives maladroites et à adopter des comportements injustifiés.
quand il apprit que Philippe avait proposé son demi-frère Arrhidée, à
moitié débile, au satrape de Carie qui cherchait un mari pour sa fille, il ne sut que penser. Craignant que
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