Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
la libération d'Halicarnasse, notre entreprise sera achevée.
--C'est ce que tu crois ? demanda Alexandre avec un léger ressentiment.
Je n'ai jamais rien affirmé de tel, je n'ai jamais posé de limites ou de frontières à notre campagne. Mais si elle te paraît insurmontable, tu peux toujours rentrer chez toi,~ Parménion. "
Le général baissa la tête et se mordit la lèvre.
" Mon père n'entendait pas..., commença Philotas.
--Je sais très bien ce que ton père voulait dire, rétorqua Alexandre, et je n'avais nullement l'intention d'humilier le grand soldat qu'il est. Mais le général a traversé de nom breuses batailles, de nombreux sièges, de nombreuses veillées nocturnes, et il n'est plus tout jeune. Personne ne le bl‚merait s'il décidait de regagner notre patrie pour y jouir d'un repos amplement mérité. "
Parménion leva la tête et balaya l'assistance du regard, comme un vieux lion entouré de lionceaux soudain trop arro gants.
" Je n'ai besoin d'aucun repos, dit-il, et je suis enCore capable d'apprendre à n'importe lequel d'entre vous, à l'ex ception du roi (il était facile de deviner qu'il voulait dire "y compris au roi"), l'art de manier l'épée. Si je devais rentrer chez moi avant la fin de l'expédition, quel que soit son but, ce serait à l'état de cendres dans une urne funéraire. "
Cette déclaration fut suivie d'un nouveau silence. Puis Alexandre finit par reprendre: " Tu as dit ce que j'espérais entendre. Le général Parménion restera parmi nous pour nous soutenir par son courage et son expérience, nous 1 en remercions de tout coeur. Mais je dois vous faire part d'une décision, fruit d'une longue méditation, qui m'a occupé au cours de ces dernières heures. Celle de licencier la flotte. "
Ces mots suscitèrent un murmure dans le pavillon royal. " Tu as décidé de licencier la flotte ? répéta Néarque sur un ton incrédule.
--Oui, confirma le roi impassible. Nos dernières opéra tions m'ont prouvé
que nous n'en avons pas besoin. Vingt navires suffisent à transporter les machines de guerre. Nous poursuivrons notre route par voie terrestre, et ferons la conquête de la côte et des ports. De cette façon, la flotte perse n'aura plus de points d'abordage ni de lieux de ravitaillement.
--Ils peuvent toujours débarquer en Macédoine, lui fit remarquer Néarque.
-- J'ai déjà envoyé une lettre à Antipatros pour le prier d'être vigilant. quoi qu'il en soit, je ne crois pas qu'ils oseraient.
--Ce choix nous permettrait d'économiser plus de cent cinquante talents par jour, intervint Eumène, mais je ne veux pas en faire une histoire d'argent.
--En outre, ajouta le souverain, le fait de ne posséder aucune issue du côté de la mer sera une motivation supplé mentaire pour nos hommes. Demain, je communiquerai ma décision à Charylaos. Toi, Néarque, tu prendras le comman dement de la flotte réduite. Elle n'est pas énorme, mais son rôle sera important.
--Comme tu le souhaites, sire, se résigna l'amiral. Et j'es père que tu auras raison.
--Il a certainement raison, répliqua Héphestion. Il ne s'est jamais trompé depuis que je le connais. Je suis avec Alexandre.
-- Moi aussi, affirma Ptolémée. Nous n'avons pas besoin des Athéniens. Et puis, je suis s˚r qu'ils nous présenteront bien vite la note de leur collaboration, et qu'elle sera très salée.
--Alors, vous êtes tous d'accord ? " demanda le roi.
Tout le monde acquiesça, à l'exception de Parménion et du Noir.
" Cleitos et moi désapprouvons ce choix, dit Parménion mais cela ne signifie rien. Le roi a montré qu'il n'avait pas besoin de nos conseils. Il n'ignore pas qu'il peut cornpter sur notre dévouement et notre appui.
--Un appui indispensable, affirma Alexandre. Si le Noir n avait pas été
là, mon aventure en Asie serait déjà terminée C'est lui qui a tranché le bras qui s'apprêtait à me couper la tête, sur le Granique, je ne l'oublierai pas. Maintenant, man geons, je meurs de faim. Demain, je réunirai l'assemblée de l'armée et lui apprendrai cette nouvelle. "
La réunion fut levée et Eumène fit envoyer aux officiers athéniens, à
Callisthène, Apelle et Campaspé, des invitations à dîner. Ils y répondirent avec enthousiasme. Il convia aussi des " compagnes " fort habiles dans l'art d'égayer les jeunes gens. Elégantes, raffinées, dotées de la beauté
brune et mystérieuse des divinités orientales, elles étaient toutes milésiennes. Leurs ancêtres
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