Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
ennemis décochaient pour éclairer le terrain qui s'étendait devant la brèche. La flamme sillonnait le ciel comme un météore et se fichait dans le sol en grésillant.
quand l'aube survint, Alexandre demanda à Perdiccas de faire l'appel, afin de compter les morts et les absents. Seuls mille sept cents hommes, sur les deux mille qui avaient parti
458
ALEXANDRE LE GRA~Dn~ARl.F.S D'AMM('IÌ 459
cipé à l'attaque, répondirent. Les autres étaient tombés dan 1 embuscade et leurs cadavres gisaient à présent sur le sol entre la brèche et les remparts.
Le roi ordonna à un héraut de demander une entrevue à Memnon.
" Je dois négocier avec lui la restitution des cadavres ", lui expliqua-t~
Le héraut écouta les conditions qu'Alexandre proposait puis il s'empara d'un drapeau blanc, monta à cheval et se diri gea vers les lignes ennemies, précédé par trois sonneries de trompette qui réclamaient une trêve.
Trois sonneries identiques leur firent écho sur la brèche. Alors, l'homme avança lentement, au pas, jusqu'à la base du mur effondré.
Il fut bientôt rejoint par un second héraut: un Grec des colonies, doté
d'un fort :accent dorien, probablement origi
naire de Rhodes. .
" Le roi Alexandre désire négocier la restitution des dépouilles de ses soldats, dit le Macédonien. Il souhaite connaître les conditions de votre chef.
--Je n'ai pas le pouvoir de te les exposer, répondit son interlocuteur.
Cependant, le commandant Memnon est dis posé à rencontrer ton roi en personne, aussitôt après le cou cher du soleil.
-- O˘?
--Là-bas. " Le Grec indiqua un figuier sauvage qui pous sait près d'une tombe monumentale, le long de la voie menant de la porte de la ville à
Mylasa. " Mais votre armée devra pour cela reculer d'un stade: la rencontre aura lieu à mi-chemin entre les deux formations. Le commandant Memnon n'aura pas d'escorte, et nous attendons le même comportement de la part du roi Alexandre.
--Je lui rapporterai tes paroles, répliqua le héraut macé donien. Si Je ne reviens pas immédiatement, tu pourras consi dérer que le souverain a accepté ces conditions. "
Il monta à cheval et s'éloigna. Le Grec attendit un moment avant de gravir le mur en ruine et de disparaître parrni les rangs des vétérans.
Alexandre ordonna à son armée de reculer à la distance requise- Il regagna ensuite le campement et s'enferma sous sa tente en attendant que le soleil se couche. Il ne but ni ne man ea de toute la journée. Il avait l'impression d'avoir été per sonnellement vaincu, la capacité de Memnon de rendre coup pour coup avec une force terrible l'humiliait durement. Pour la première fois de son existence, il éprouvait un sentiment d'impuissance, mêlé à une profonde solitude.
Les triomphes qui avaient jusqu'alors parsemé sa route lui semblaient lointains et presque oubliés: Memnon de Rhodes était un roc qui entravait son avancée, un obstacle qui lui paraissait de plus en plus insurmontable avec le temps.
Il avait intimé à ses gardes l'ordre de ne laisser entrer per sonne. Même Leptine n'avait pas osé l'approcher. Elle était maintenant habituée à
déchiffrer son regard, à distinguer les ombres et les lumières qui obscurcissaient ou éclairaient ses yeux, comme s'il s'agissait d'un ciel d'orage.
Alexandre se préparait à rencontrer son ennemi, un peu avant que le soleil ne se couche, quand le bruit d'une alterca tion parvint à ses oreilles. Perdiccas fit bientôt irruption sous sa tente en repoussant les gardes du corps.
Sur un signe de leur souverain, les hommes se retirèrent.
" Je mérite la mort ! s'exclama Perdiccas bouleversé. J'ai causé celle de nombreux soldats, j'ai jeté le déshonneur sur
I'armée et je t'ai contraint à une négociation humiliante. Tue moi ! ", cria-t-il en lui tendant son épée.
Il avait l'air hagard, les yeux rouges et enfoncés. Alexandre ne l'avait pas vu dans un tel état depuis le siège de Thèbes. Il I'examina sans broncher, puis il lui montra une chaise. " Assieds-toi. "
Les doigts de Perdiccas tremblaient autour de la poignée de son épée.
" Je t'ai dit de t'asseoir ", ordonna de nouveau Alexandre d'une voix plus forte et plus ferme.
Perdiccas s'effondra sur la chaise en laissant tomber son épée.
" Pourquoi as-tu mené cette attaque ? lui demanda Alexandre.
--J'avais bu, ou plutôt nous avions tous bu... Une telle entreprise me semblait possible, ou plutôt certaine.
460 ALEx~NDRE LE GRAND
--Parce que
Weitere Kostenlose Bücher