Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
colportés sur le refus du roi de venger Pausanias en ont-ils ? Pausanias était un garde du corps robuste, habile dans l'art de manier les armes: il n'avait besoin de personne pour se venger.
--C'est vrai, admit Aristote en songeant au forrnidable physique de son voiturier. Alors, comment expliques-tu ce geste ? S'il était le jeune homme loyal que tu m'as décrit, pour quoi aurait-il assassiné son roi ?
--Je n'arrive pas à le comprendre, mais s'il avait vraiment voulu tuer le roi, ne crois-tu pas qu'il disposait d~occasions beaucoup plus favorables, étant son garde du corps ? Il aurait
très bien pu le tuer dans son sommeil. I
C~ ~
~ C'est ce que j'ai toujours pensé. Mais il me semble que ni toi ni moi ne sommes en mesure de trouver une réponse à nos interrogations. Connais-tu quelqu'un qui pourrait détenir des informations à ce sujet ? -On dit que Pausanias avait des com plices, ou tout au moins une couverture: un groupe d'hommes l~attendait avec un cheval près du bosquet de chênes o˘ nous nous sommes rencontrés tout à l'heure.
--On dit aussi que l'un d'eux a été identifié, observa la jeune fille en plongeant brusquement ses yeux dans ceux de son interlocuteur.
--Et o˘ se trouverait ce survivant ?
--Dans une auberge de Béroée, sur la rive de l'Haliacmon: il se fait appeler Nicandre, mais c'est certainement un nom d'emprunt.
--Et quel est son vrai nom ? demanda Aristote.
--Je l'ignore. Et si je le savais, je saurais aussi pourquoi Pausanias a fait ce qu'il a fait, et a subi ce qu'il a subi. "
Aristote s'apprêta à remplir la tasse de la jeune fille, mais elle l'arrêta d'un geste de la main et se leva.
" Il est temps que je rentre che~ moi, sinon on viendra me chercher.
--Comment puisje te remercier de ce que..., commença hristote.
--En trouvant le véritable coupable, l'interrompit-elle, et en m'apportant son nom. "
Elle ouvrit la porte et s'engagea en toute h‚te dans la rue déserte.
Aristote s'écria : " Attends, tu ne m'as même pas dit comment tu t'appelais ! " Mais la jeune fille avait déjà disparu dans le tourbillon des flocons, dans les ruelles silencieuses de la ville endormie.
40
Le régent Antipatros le reçut dans l'ancienne salle du trône, emmitouflé
dans un manteau de laine brute et vêtu d'un pan talon de feutre. Un grand feu br˚lait au milieu de la salle, mais
une bonne partie de la chaleur s'échappait, avec la fumée, par un trou ouvert au centre du plafond.
" Comment te portes-tu, général ? demanda Aristote.
--Bien, quand je suis loin de Pella. La seule vue de la reine me donne la migraine. Et toi, comment vas-tu, maître ?
--Je vais bien, moi aussi, mais le poids des ans commence à se faire sentir. Et je n'ai jamais supporté le froid.
--quelles sont les raisons de ta visite ?
--Je désirais faire une offrande sur la tombe du roi avant de regagner Athènes.
--Cela t'honore, mais c'est également très dangereux. Si tu te débarrasses des gardes que je t'assigne, comme puisje te protéger?
Attention, Aristote, la reine est une véritable tigresse.
--J'ai toujours entretenu de bons rapports avec Olympias.
-- Cela ne suffit pas, commenta Antipatros en se levant et en s'approchant du feu, devant lequel il tendit les paumes de ses mains. Je te jure que cela ne suffit pas. " Il s'empara d'un pot sur le bord du foyer, et prit deux coupes de bonne céra mique attique. " Un peu de vin chaud ? "
Aristote acquiesça.
" Des nouvelles d'Alexandre ?
--D'après le dernier message de Parménion, il traversait la Lycie.
--Tout se passe donc bien.
--Pas tout, hélas.
--qu'y-a-t-il?
--Alexandre attend des renforts. Les jeunes gens auxquels il a accordé
une permission et les nouvelles recrues sont déjà dans les Détroits, mais ils sont bloqués par la flotte de Memnon. Si mes calculs sont justes, à
l'heure qu'il est Alexandre pourrait se trouver dans la grande Phrygie, du côté de Sagallassos ou Célènes. Il doit certainement s'inquiéter en constatant que personne n'arrive.
--Ne peut-on donc rien faire ?
-- La supériorité de Memnon sur mer est écrasante: si je donnais à ma flotte l'ordre d'appareiller, il la coulerait avant même qu'elle ne puisse prendre le large. Nous sommes dans le pétrin, Aristote. Mon seul espoir est que Memnon tent~n dharquement sur le territoire macédonien: dans ce cas, je pourrais espérer le battre. Mais l'homme est rusé, et il ne se hasardera certainement pas à faire un mouvement erroné.
--Alors,
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