Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
abstenir. Il inclina la tête un instant
puis quitta la salle et s'engagea dans le couloir parrni les pleurs et les gémissements des femmes de Darius. Blême, Philippe s~rtait sans mot dire de l'antichambre de la reine morte.
Le lendemain, Alexandre donna l'ordre de célébrer des funérailles solennelles, d'enterrer la reine avec le faste et les honneurs dus à son rang, et de dresser sur sa tombe un gigan tesque tumulus, selon les coutumes de sa tribu natale. Tandis qu'On la mettait en terre, il ne parvint pas à retenir ses larmes en songeant à la beauté et à la délicatesse de la jeune femme t à ce bébé qui ne verrait jamais la lumière du soleil.
Cette nuit-là, l'eunuque s'enfuit. Il chevaucha des journées t des nuits entières pour atteindre les avant-postçs perses aux nvirOns du fleuve Tigre. Il demanda à être conduit au ca~n ement du roi Darius, situé de l'autre côté du fleuve. Un roupe de cavaliers mèdes l'escorta sur dix parasanges à tra ers le désert, et le lendemain, au coucher du soleil, l'amena ~evant le Grand Roi.
Darius tenait conseil avec ses généraux, vêtu comme un L i
simple soldat d'un pantalon de lin brut et d'une tunique en antilope.
Seules sa tiare rigide et sa dague d'or massif, l'étin celante akinaké qui pendait à son côté, témoignaient de sa royauté.
L'eunuque se jeta à terre et, le front dans la poussière raconta en sanglotant ce qui s'était produit à Tyr: le long et douloureux travail de la reine, sa mort, ses funérailles. Il men tionna même les larmes d'Alexandre.
Profondément troublé par cette nouvelle, Darius ordonna à l'eunuque de le suivre dans la partie centrale de sa tente.
" Pardonne-moi, Grand Roi, de t'avoir apporté des nou velles si tristes, pardonne-moi, répétait l'eunuque.
--Ne pleure pas, le réconforta Darius. Tu as fait ton devoir et je t'en suis reconnaissant. Mon épouse a-t-elle beaucoup souffert ? demanda-t-il.
--Elle a souffert, Majesté, avec la dignité et la force d'une reine perse. "
Darius le regarda sans mot dire. Il était facile de deviner les sentiments contraires qui occupaient son coeur et son esprit aux rides profondes qui marquaient son front, à la lumière vacillante de son regard.
" Es-tu certain, l'interrogea-t-il au bout d'un moment, qu'Alexandre a pleuré ?
--Oui, mon roi. J'étais si proche de lui que je pouvais voir les larmes couler sur ses joues. "
Darius s'effondra en soupirant sur un siège à haut dossier. " Mais alors... il y avait quelque chose entre eux: on ne pleure que la mort d'un être cher.
--Majesté, je ne crois pas que...
--C'était peut-être son fils...
--Non, non ! protesta l'eunuque.
--Tais-toi ! s'écria Darius. Oses-tu me contredire ? "
L'eunuque s'agenouilla en tremblant et en sangl~tant " Majesté, je t'en prie, laisse-moi parler, l'implorait-il.
--Tu en as déjà trop dit. que pourrais-tu ajouter ?
--qu'Alexandre n'a jamais touché ton épouse. Il l'a entou rée de tous les égards et de toutes les attentions. Il ne lui a jamais rendu visite sans lui en demander au préalable l'aut
risation. et il l'a toujours fait en présence de ses dam~s de mpagnie. Il s'est comporté de la même façon, sinon mieux core, à l'égard de ta mère.
--Ne serais-tu pas en train de me mentir ?
--Je ne le ferais pour rien au monde, Grand Roi. Je t'ai dit pure vérité.
Je te le jure au nom d'Ahura-Mazda.
--Ahura-Mazda... ", murmura Darius. Il se leva et écarta le ~ap qui fermait l'entrée de son pavillon. Le ciel fourmillait toiles au-dessus du désert, et la Voie lactée s'étendait d'un rizon à l'autre en diffusant sa clarté
diaphane. Des milliers
bivouacs scintillaient dans le camp. ~ Ahura-Mazda, sei eur du feu céleste, notre dieu, pria-t-il, donne-moi la vic re, permets-moi de sauver l'empire de mes aÔeux. Je te omets que si je gagne, je traiterai mon adversaire avec clé ence et respect, car si le hasard de la guerre ne m'avait pas essé contre lui, j'aurais aimé lui demander sincèrement son mitié. "
L'eunuque quitta le pavillon en laissant le roi à ses pensées, ais tandis qu'il s'éloignait, il entendit un grand bruit s'élever une des portes du camp. Il s'arrêta. Des cavaliers assyriens prochaient, ils escortaient un magnifique adolescent qui, en assant devant lui, sembla le reconnaître.
N'en croyant pas ses eux, il le suivit un moment. Le petit cortège avait atteint le pavillon royal, et quand le visage du jeune homme entra dans 1~
lumière des
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