Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
épais, puis il étendit son manteau sur le sol.
" Mets-toi à l'aise, maman. Ce soir, c'est moi qui prépare le ; dîner "
Olympias s'assit devant les flammes dansantes qu'elle observa d'un air fasciné, dans la solitude de la forêt. Alexandre ouvrit les sacoches, en tira du pain et le fit griller sur le feu.
Puis il coupa un morceau de fromage et le lui tendit. ; Ils mangèrent en silence.
" Le meilleur dîner depuis de nombreuses années, observa Olympias, et dans un lieu plus beau que n'importe quel palais. J'ai l'impression d'être redevenue enfant, dans mes mon tagnes. "
Alexandre remplit un gobelet de buis à la source et le lui donna. " Et pourtant, cela ne te convient pas non plus. Tu aurais vite la nostalgie de la politique, de tes relations et de tes intrigues, ne crois-tu pas ?
--Peut-être. Mais pour l'instant, laisse-moi rêver. La der nière fois que j'ai dormi avec toi, tu venais juste d'apprendre à marcher. Et ton père m'aimait. "
Ils discutèrent à voix basse en écoutant le bruissement du vent dans les branches de chêne et le crépitement des flammes de leur bivouac solitaire.
…puisés par cette longue journée riche en émotions, ils finirent par s'endormir.
Une profonde mélancolie s'était abattue sur eux: ils étaient désormais des exilés et des fuyards, sans toit ni amis. Tous deux mesuraient l'amère absence d'un homme dur, violent et despotique, capable toutefois, et mieux que quiconque, de se faire aimer.
Réveillé au milieu de la nuit par un bruit imperceptible Alexandre ouvrit les yeux et s'aperçut que sa mère n'était plus à ses côtés. En se retournant, il entrevit une ombre sur le sen tier qui serpentait au milieu des troncs séculaires, à la lueur de la lune. C'était Olympias. Debout devant un gros arbre au tronc creux, elle semblait parler à quelqu un. Il avança pru
demInent en rampant sur la mousse et l'entendit murmurer quelques mots dans une langue inconnue. Elle se taisait un instant, comme si elle écoutait une réponse, puis poursuivait à voix basse.
Alexandre l'observa un moment, caché sous le feuillage d'un chêne. Il la vit emprunter un sentier marbré par les ombres étirées des branchages tendus sous la lueur diaphane de la lune. Il la suivit discrètement, d'un pas feutré. Sa mère s'im mobilisa devant les ruines d'un vieux sanctuaire dont la statue ,de culte, en bois sculpté, altérée par le temps et par les intem péries, était difficilement reconnaissable. Mais il put distin guer l'image archaÔque de Dionysos, le dieu de la fureur orgiaque et de l'ivresse, éclairée par la lumière tremblante de quelques lanternes, témoignant que ce lieu était encore visité.
Olympias s'approcha de la statue aussi légèrement que si elle esquissait un pas de danse, et posa la main sur son socle. Soudain, une fl˚te de roseau surgit entre ses doigts. La reine en tira bientôt une note intense et ondoyante, une mélodie magique et mystérieuse qu'elle confia au vent, et qui s'éleva au-dessus des voix nocturnes de la forêt.
quelques instants s'écoulèrent. Une musique parut lui répondre en s'échappant de la forêt, un air indéfinissable qui se confondait tantôt avec le bruissement des feuilles, tantôt avec le chant lointain du rossignol, se faisant de plus en plus nette et de plus en plus distincte.
D'abord, une cas cade de notes aussi graves que le gargouillis d'une source au fond d'une grotte, puis d'autres, plus aiguÎs et plus lim pides.
C'étaient encore les notes d'une fl˚te, ou de nombreuses fl˚tes de roseau qui émettaient un son primitif, long et sus pendu, pareil au son modulé du vent.
Olympias déposa son instrument sur le sol, se dépouilla de son manteau et commença à danser au rythme de cette mélodie. Bientôt, des hommes et des femmes aux visages couverts de masques de bêtes, à l'aspect de satyres et de ménades, sortirent du bois. Certains soufflaient dans des pipeaux de roseau, d'autres clansaient autour de l'idole et de la reine, comme s'ils reconnaissaient en elle une seconde divinité.
Au fur et à mesure que leurs mouvements s'intensifiaient d'autres êtres surgirent avec des tambours et des timbales imprimant à la danse un rythme de plus en plus frénétique. Rendus méconnaissables par leurs masques et en raison de l'obscurité, ils se déshabillaient doucement et s'enlaçaient debout, puis au sol, autour de la statue, dans les spasmes et les contorsions de leurs étreintes sauvages.
Au milieu de ce
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