Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Alias Caracalla

Alias Caracalla

Titel: Alias Caracalla Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Daniel Cordier
Vom Netzwerk:
rencontre d’urgence pour
négocier avec lui. »

    Je lui fixe rendez-vous pour lundi matin, à 9 heures : « Pas avant ?

    — Impossible : * Rex est occupé demain soir. »
C’est à demi vrai : il n’a qu’un dîner avec Bidault.

    Lorsque les événements ou les affaires en coursl’exigent, la soirée se prolonge fort tard. Je suis
d’autant plus ferme dans ma réponse qu’à mesure
que * Lorrain se confie, son « tuyau » me semble peu
sérieux. Depuis mon arrivée en France, les résistants
annoncent périodiquement un grand chambardement à Vichy ou la libération prochaine de la
France. Sur bien d’autres sujets, aussi, j’ai découvert que les résistants rêvent à voix haute.

    Je file rejoindre Cheveigné chez Colette . J’y arrive
très tard : « J’étais inquiet : toi, si ponctuel ! » Ce
n’est pas * Germain, victime de mes retards accumulés, qui me ferait un tel compliment.

    Après ma rencontre avec * Lorrain, j’admire comment, en changeant d’interlocuteur, je change d’univers : avec lui, je me débats dans le magma des
mouvements ; avec Cheveigné, je suis à Oxford,
Thame Park, à une époque vécue dans l’impatience
du départ. Aujourd’hui, elle a la valeur mythique du
temps passé, le bonheur des affres oubliées.

    Et puis je suis sûr de me divertir. Mon attachement
à lui me rend d’autant plus malheureux ce jour-là
de ne pouvoir lui communiquer la « grande nouvelle »
que je viens d’apprendre. Mais est-ce vraiment une
grande nouvelle ?

    Dimanche 8 novembre 1942

     

    Déjeuner de fête

    L’absence de * Rex autorise une grasse matinée :
je me lève à 7 heures ! Volupté de la paresse… Pourle reste, je travaille comme à l’ordinaire : la Résistance
ne connaît aucune vacance. Toutefois, délivré de la
pression du patron, je me consacre paisiblement à
la mise à jour des comptes et de mon travail, tout
en expédiant quelques rendez-vous de routine.

    Une des tâches les plus délicates du secrétariat
est la distribution des fonds. Comme elle devient
quotidienne et que les montants sont de plus en
plus élevés, j’ai décidé, en dépit de l’interdiction du
BCRA, de constituer une réserve d’argent liquide
dans ma chambre : elle m’évitera la perte de temps
d’un « ravitaillement » quotidien.

    J’ai puisé hier soir chez les Moret une semaine
d’avance dans leur Mirus. Je peux préparer ce
dimanche la répartition entre les mouvements, les
syndicats, l’armée, les services, la zone occupée, etc.
Comme * Rex me l’a prescrit, je note — pour Londres — sur une feuille de papier dates et initiales
des bénéficiaires. Les lieux de rendez-vous ne sont
pas mentionnés afin d’éviter une catastrophe, en cas
de saisie despapiers 1 .

    À 1 heure, je rejoins Cheveigné devant un restaurant près de la place de la République. Nous y
déjeunons les jours de fermeture du bistrot de la
place Gailleton. Au moment où j’approche, il arrive
au loin. Lorsqu’il m’aperçoit, il se met à danser, faisant un V avec les doigts. Ce n’est guère rassurant.
Bien que la rue soit déserte, je suis alarmé par sa
conduite excentrique : les Boches l’ont-ils repéré de
nouveau en cours d’émission ?

    « Ils ont débarqué ! crie-t-il en s’esclaffant.

    — Chez Mme Bedat-Gerbaut ?

    — Mais non, patate : en Afrique du Nord, les
Américains !

    — Quand ?

    — Cette nuit. »

    Stupéfaction ! Moi qui, par ma fonction, suis au
centre de toutes les liaisons, premier informé des
télégrammes et rapports qui circulent entre Londres
et les mouvements, je suis peut-être, ce matin, le
seul à Lyon à ignorer une information que nous
attendons tous depuis juin 1940. Il est vrai que, par
prudence, je n’ai pas de poste de TSF chez moi,
comme * Rex me l’a prescrit. Cheveigné a plus de
chance : sa logeuse, qui ignore son activité clandestine, est venue le réveiller aux aurores pour lui
annoncer l’événement, l’invitant dans son salon
pour écouter les informations de la radio nationale.

    Mais alors, * Lorrain a raison : le rendez-vous est
urgent ! N’ai-je pas commis une énorme bévue en
ne me rendant pas en Avignon avertir * Rex ? Mais
pourquoi les télégrammes que j’ai reçus n’annoncent-ils pas ce débarquement, assorti des directives du
Général ? Pourquoi la seule information connue en
France l’est-elle par le canal des sbires de Giraud ?

    La joie est cependant

Weitere Kostenlose Bücher