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Alias Caracalla

Alias Caracalla

Titel: Alias Caracalla Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Daniel Cordier
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pourtant un autre aspect de cette
information qu’il commente : « J’espère qu’ils n’ont
pas entortillé le Général. »

    Le document le plus décisif à ses yeux est le message expédié par Frenay à * Lorrain concernant les
événements en cours. Après l’arrivée de Giraud en
Algérie, Frenay est partisan de l’entente entre Giraud
et de Gaulle, parce que ce dernier « a donné toutes
les garanties démocratiques ». Il ajoute : « La position morale prise par de Gaulle de refuser l’armistice
et l’acceptation tacite de cet armistice par Girauddonnent droit à de Gaulle d’assurer la direction
d’ensemble. » * Rex commente : « Il est divertissant
d’entendre * Charvet [Frenay] juger les autres à
l’aune de la démocratie. Il semble que Londres lui
ait imposé une cure de gaullisme. »

    Pour finir, je lui remets le texte qu’il a demandé
de taper en dix exemplaires. Comme toujours il le
relit soigneusement. Après que * Mado me l’eut
remis, j’avais admiré la simplicité et la force de ces
quelques paragraphes. Dans le dernier d’entre eux,
*Rex affirme aux Anglais et aux Américains l’exigence
de toute la Résistance : « Nous demandons instamment que les destins nouveaux de l’Afrique du Nord
libérée soient au plus tôt remis entre les mains du
général deGaulle 5 . »

    *Rex me demande d’expédier le texte aux neuf
groupes qu’il a choisis : les trois mouvements de résistance de la zone sud ; le Mouvement ouvrier français (MOF) et cinq partis politiques : la SFIO, le Parti
démocrate populaire, la Fédération républicaine,
le Parti radical et le parti communiste. Il ajoute :
« Distribuez-les en toute priorité. Je les ai prévenus. »

    Nous sortons  : « Gardez un contact permanent avec
*Salm.W. Il faudra expédier les résultats de la manifestation dès ce soir pour que Schumann les annonce
demain. Après le débarquement en Afrique, les
Français doivent prendre leur destin en main. »

    Depuis mon retour en France, je n’ai assisté à
aucune manifestation organisée par la BBC. YvonMorandat m’a décrit celle du 1 er  mai 1942 comme
« une émeute ayant submergé la France ». Il est
vrai qu’au moment des grèves d’octobre, il a prédit
« une insurrection générale ». Sa suite en quenouille
m’a appris la valeur toute relative de ses pronostics.

    *Rex m’a prescrit d’éviter les lieux prévus pour les
manifestations : la consigne est valable pour tous
ses collaborateurs. Intérieurement, je regimbe :
notre sécurité mérite-t-elle cette punition ?

    Au cours de la matinée, je transmets l’ordre à
Cheveigné, qui me répond : « Je m’en fous, je veux
voir ça. Je ne vais quand même pas rater la libération de la France !

    — C’est le patron qui l’ordonne.

    — Il n’en saura rien. Je te raconterai tout, et toi
tu ne diras rien parce que tu es mon ami.

    — Et les télégrammes ?

    — Ne t’inquiète pas, ils arriveront avant toi. »

    Quoi qu’il dise ou fasse, je suis désarmé par son
insolence. Certes, je commets moi-même journellement des imprudences, mais elles sont imposées par
la pression de ma charge. Aujourd’hui, il me serait
impossible de transgresser un ordre de * Rex, même
s’il n’en savait rien. Je considérerais une telle insubordination comme une trahison ; cet homme qui
ignore tout de moi ne m’a-t-il pas manifesté depuis
le premier jour une confiance sansréserve 6  ?

    Après notre matinée studieuse, nous sortons pour
nous restaurer. Un bruit inusité, sorte de grondement suivi d’un bruit de pas cadencés, hache soudain notre conversation. Des chars suivis d’un bloc
de soldats débouchent devant nous : à quelques
mètres, les Boches !

    Mon sang ne fait qu’un tour. * Rex regarde en
silence. Instinctivement, nous nous arrêtons au bord
du trottoir. Cette armée victorieuse, dont j’ai vu
d’innombrables photographies en Angleterre, est tout
à coup sous mes yeux, triomphante. Je suis saisi
d’une haine aussi irrépressible qu’impuissante.

    Je pense à mon travail : j’ai l’impression physique
qu’un piège se referme. Depuis un mois, les voitures
gonio allemandes et la police de Vichy nous pourchassent. J’ai cru que c’était le pire, mais aujourd’hui,
ce n’est plus au milieu des Français — indifférents
ou hostiles, mais français — que nous allons opérer, mais des Boches, cruels et implacables.

    Les conséquences de

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