Alias Caracalla
impression rassurante m’est confirmée par
le début de son câble du jour : il donne son accord
au départ du général Doyen et de Herriot et confirme
que Manuel et Massigli « insistent » pour la venue
de Dautry à Londres.
Si * Rex est d’accord pour le versement effectif aux
montagnards, il me prescrit une rétention dans ladistribution des fonds : « Pour mouvements même
somme que janvier. » Il ne dit rien de son retour,
mais je l’attends d’un jour à l’autre pour s’expliquer
avec les chefs des mouvements.
Jeudi 25 février 1943
Maquis en formation
Depuis le départ de * Rex, les événements connaissent une accélération foudroyante. Une foule de
garçons requis par la loi du 16 février 1943 sur le
travail obligatoire en Allemagne désertent et fuient
les villes pour se cacher dans les montagnes. Mon
espoir fou est en train de seréaliser 5 !
C’est le sujet de conversation de tous les résistants :
grâce à eux, l’insurrection approche. Enfin ! Tous les
renseignements que je glane prouvent que le mouvement s’amplifie et que la Résistance est en train,
grâce à Vichy, de mobiliser des troupes dejeunes 6 .
Une sorte de fièvre belliqueuse s’empare de nous.
Lors de mes rendez-vous avec Fassin, Schmidt et les
responsables des mouvements, je reçois les informations par bribes. Les agents du BCRA jubilent :
le Débarquement est pour demain…
Vendredi 26 février 1943
Les montagnards à la BBC
Ma rencontre avec Farge aujourd’hui est euphorique. Il a entendu hier, à la BBC, la phrase conventionnelle annonçant l’accord de De Gaulle pour
réaliser le projet du Vercors. « Ça arrive à point : les
hommes dont nous avons besoin pour organiser le
réduit viennent à nous pour échapper au STO. Nous
avons beaucoup de chance, Laval nous envoie les
troupes que nous désespérions de rassembler. »
La réussite du Vercors me concerne au premier
chef : non seulement j’y ai ma place, mais la vraie
guerre va commencer. Mon optimisme est de courte
durée. Je reçois ce même jour un télégramme personnel m’interrogeant sur deux des postes expédiés
en novembre : Gudgeon et EEL Red.
Le BCRA est inquiet parce que je leur avais
demandé, le 6 décembre, d’écouter EEL, que j’avais
déclaré inutilisable ; même chose, le 13 février,
pour Gudgeon. Or ces deux postes émettent. Je
comprends leur inquiétude : cette contradiction ne
masque-t-elle pas un danger ? Les postes sont-ils aux
mains des Allemands ou, pire, utilisés par un radio
« retourné » ? Comme ils appartiennent à Maurice
de Cheveigné, je me promets de l’interroger.
Afin qu’il n’y ait pas d’erreur dans la distribution
du budget du mois de mars, j’informe * Rex du montant de chaque destinataire d’après les chiffres que
chacun m’a donnés ces jours derniers. Je n’ai pas
l’argent, mais l’espère par la prochaine opération.
*Frédéric m’a averti de prévoir 1,5 million pour
la zone nord. Quant à la zone sud, une augmentation considérable m’a été demandée par rapport au
budget distribué ce mois-ci : Combat, 4,2 millions ;
Libération, 2,5 millions.
Qu’en pense * Rex, lui qui m’a télégraphié il y a
quatre jours pour confirmer que je devais donner
aux mouvements « même somme que janvier » ?
Samedi 27 février 1943
L’état-major de Giraud en danger
J’ai été contacté par le commandant Henri, de
l’état-major de Giraud, qui me demande d’expédier
un télégramme au colonel de Linarès, avec lequel il
n’a aucune liaison. Il signale sa situation dramatique :
« […] impossible prolonger séjour mailles se resserrent autour Henri et Kientz provoquer enlèvement
extrême urgence. »
Il demande des ordres pour protéger leur organisation de renseignements en Alsace. C’est là un
exemple de câbles que des organismes étrangers au
BCRA, ayant perdu leur liaison avec les Anglais, les
Polonais ou Alger, me demandent d’expédier ou de
recevoir pour eux, ce qui accroît d’autant notre trafic. J’y mets une condition : les textes doivent être
donnés non codés.
J’attends toujours le retour « prochain » de * Rex.
Il est parti depuis deux semaines et m’a annoncé sonretour il y a dix jours. Je redoute de nouveaux affrontements avec les chefs des mouvements à propos de
leurs budgets.
Je suis d’autant plus déçu en décodant, parmi
d’autres, un message de *
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