Alias Caracalla
résistance française.
Comme exemple de la traque de la police et de
la Gestapo, il annonce : « Mon courrier personnel
Claudie arrêté. » Je lui avais annoncé que, trois
jours avant son arrivée, * Claudie n’était pas venu à
notre rendez-vous quotidien et que ni sa famille ni
celle de Delestraint n’avaient eu de sesnouvelles 26 .
Le deuxième télégramme est plus curieux : il ne
souffle mot de la conduite de * Brumaire et de * Passy,
ni de son jugement péjoratif à leur égard. Il réclame
simplement leur retour à Londres à la lune d’avril,
sous prétexte que leur présence est indispensable
pour que l’état-major du BCRA « soit au complet »
et que * Passy et * Brumaire soient à leur poste pour
poursuivre les négociations avec les Anglais afin
d’obtenir l’aide indispensable.
Quant au troisième télégramme, il me surprend :
Documents saisis chez Mechin ne semblent
pas devoir toucher organisation AS.
Comment peut-il défendre une telle contre-vérité
et transformer les comptes rendus de Copeau ? Il m’a
détaillé le contenu des valises saisies chez la secrétaire
de * Mechin, chef d’état-major : elles contenaient tous
les rapports de Frenay à Londres, aux Américains
et aux chefs de régions. Les problèmes des mouvements y étaient exposés en détail ainsi que l’organisation de l’AS, avec les noms et la quantité des
troupes.
Ce n’est pas la première fois que j’observe que la
politique exige une présentation des faits qui n’est
pas toujours celle de la vérité. Mais pourquoi * Rex
se livre-t-il à cette manipulation ? En y réfléchissant, je comprends que les premiers informés des
télégrammes sont les Anglais. Après les conversations de Delestraint avec le chef d’état-major allié,au cours desquelles il l’a convaincu de la force potentielle des cinquante mille paramilitaires en puissance,
comment lui annoncer trois jours plus tard que l’AS
de zone sud est totalement désorganisée par la
Gestapo et sur le point d’être anéantie ?
Mercredi 24 mars 1943
Adieux à Lyon
Je trouve les deux câbles promis par Bidault dans
ma boîte avant de me rendre à mon premier rendez-vous du matin avec * Rex. Il me demande de venir le
voir ce soir à 6 heures rue Sala pour les dernières
consignes.
Je n’ai pas trop de toute la journée pour préparer
mon départ. En milieu de matinée, je passe voir
M. Moret pour lui dire ma reconnaissance pour ce
que sa femme et lui ont fait depuis mon arrivée.
A-t-il des nouvelles de Mme Moret ? « Elle semble
pour l’instant protégée par les relations de son père
avec Pétain », me dit-il.
Je ne pose pas de question : sans eux, ma mission
aurait été un échec. « Ne me remerciez pas : c’est
pour la cause. » Décidément, c’est le mot de passe,
même de ceux qui proclament ne pas être des résistants.
Après l’avoir quitté, je file voir Mme Bedat-Gerbaut.
Je monte chez elle à l’heure du déjeuner, où je suis
sûr que ses leçons sont achevées. Elle aussi refuse
mes remerciements : « Ma récompense est de pouvoir continuer à aider la Résistance. Vous savez que
votre successeur est le bienvenu, autant qu’il le souhaite. » Je l’ai déjà dit à * Grammont, tant je suis sûr
du dévouement de cette femme au courage modeste.
Mon équipe a quitté Lyon hier soir. Je déjeune
avec * Grammont, à qui je fournis une dernière fois
les détails de mon réseau de restaurants et de lieux
de rendez-vous. Après ses premiers contacts, il me
pose quelques questions.
Je garde pour la fin les difficultés du patron avec
les chefs, un roman qu’il aura tout le temps de
compléter au jour le jour… Après le déjeuner, nous
enchaînons sur les derniers rendez-vous de présentation aux responsables des mouvements et du CGE.
Nous allons ensemble montée des Capucins, où
Hélène travaille déjà.
À 6 heures, je suis rue Sala, dans le bureau de
France d’abord.
*Rex me donne ses ordres ultimes : l’attendre à la
gare de Lyon le 30 au soir, au train de 6 heures ; trouver une chambre pour la nuit ; fixer rendez-vous à
*Morlaix et*Champion 27 pour dîner tous les quatre ;
organiser un rendez-vous avec * Passy et * Brumaire
au bois de Boulogne le 31 au matin.
« Bon voyage ! » sont ses derniers mots avant que
je rentre chez moi, à cent mètres de là, pour finir
mes bagages. Ce n’est pas le voyage qui m’inquiète,
mais la
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