Alias Caracalla
AMST
[Armée secrète] notamment Morinaud, St Jacques
et Pelabon — aucune décision n’a été prise ce
qui rend la situation dramatique — insistons
personnellement auprès du général de Gaulle
sur responsabilité très grave prise par France
Combattante en s’abstenant de fournir cadres
nécessaires.
Parmi les papiers dont je demande une copie
pour Paris se trouve le compte rendu du comité
directeur de zone sud que * Rex a présidé le 31 mai.
Dès le début de la séance, il revient sur un projet
de Frenay — qui attend à ce moment sur un terrain
son départ pour Londres. Lors du précédent comité
directeur, ce projet n’avait pas été mis aux voix.
*Rex propose de le réexaminer. Je souris en lisant le
début, qui marque le style inimitable du patron.
*Rex demande que la séance ne soit pas consacrée
uniquement à résoudre les conflits entre les membres
du Comité directeur et le représentant de « Charles »
ou entre les différents représentants du Comité,
mais également à « donner son avis sur les très graves questions engageant l’avenir de la Résistance ».
L’absence des trois fondateurs des mouvements
l’inspire visiblement.
À 11 heures je sonne chez * Rex. Je l’interroge immédiatement pour obtenir la réponse attendue par tous :
« Quand revenez-vous à Paris ? »
Il me regarde surpris : « Mais je viens d’en partir !
N’ont-ils pas l’habitude de traiter leurs affaires entreeux. » Que dire ? Je me hasarde : « Vous avez créé il
y a quelques jours un organisme central, le Conseil
de la Résistance, dont tous les représentants attendent beaucoup : les syndicats, parce que vous les
avez mis au pouvoir ; les anciens partis, parce qu’ils
souhaitent partager la direction de la Résistance ;
les résistants, parce qu’ils veulent prendre le pouvoir pour le garder. »
*Rex semble agacé par ces remarques, sans fondement à ses yeux. « Mais ce sont les résistants qui
ont voulu cette situation sans issue. Ils ont refusé
de créer un “Comité directeur” destiné à diriger
l’action de la Résistance au sein du Conseil. »
Je m’entête : « C’est précisément ce qu’ils ne supportent pas. Ils ont découvert après la première
réunion du Conseil que tout devait se faire avec eux
à Paris. »
*Rex ne répond pas, sans doute préoccupé par le
contrôle des mouvements de la zone sud, les manœuvres des deux chefs à Londres et le départ prochain
de Frenay, dont il ne dit mot.
De nouveau dans le train vers Paris l’après-midi,
je pense aux messages oraux que j’emporte pour les
uns et les autres. Mais sur la question que tout de
monde me pose, je suis aussi ignorant qu’en arrivant. Je m’accuse de faiblesse. Certes, c’est moi qui
lui ai posé les questions, mais, quand il m’a rabroué,
j’ai cessé de l’interroger, me persuadant qu’il ne
répondrait pas : sans doute ignore-t-il lui-même la
date de son retour.
Ma seule certitude est celle de l’expérience : jusqu’à
présent ses absences ont duré une huitaine de jours. Il
devrait donc rentrer vers le 8 ou le 10 juin. C’est ce
que je répondrai.
Samedi 5 juin 1943
Les hostilités reprennent
Après avoir annoncé mon retour à Lyon par le
biais de Van Dievort et être passé au secrétariat,
j’arrive place Raspail, comme d’habitude, à 11 heures.
Je soumets à * Rex le courrier puis lui transmets
de vive voix ce que * Morlaix, Kaan et quelques autres
responsables des mouvements refusent d’écrire.
Kaan m’a demandé de communiquer au patron la
dernière toquade de * Maxime, chef de l’OCM. Il a
déjeuné avec lui et recueilli ses critiques féroces à
l’égard du CGE, dont il refuse la composition actuelle,
faite de résistants de la zone sud, tous « fonctionnaires ».
À l’occasion de la remise de son budget, * Maxime
m’a moi-même gratifié d’une longue diatribe contre
*Rex. Il conteste la pertinence des projets qu’il a
présentés, qui n’expriment pas, selon lui, ceux des
résistants. Il a même écrit à * Brumaire pour lui
demander de revenir de Londres afin de prendre la
tête du comité de coordination de la zone nord. Enfin,
il dénonce comme une erreur le fait d’avoir offert à
la CGT un siège au Conseil de la Résistance.
L’agressivité de * Maxime envers * Rex inquiète Kaan.
Avec ce dernier, nous communions dans l’antipathie
pour ce personnage suffisant et
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