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Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Titel: Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain-Gilles Minella
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l’arrivée de leur nouveau souverain, ils comprennent vite que les choses vont changer du tout au tout. Pierre de Blois, qui fut au service d’Henri pendant plusieurs années, nous a laissé une description pleine d’humour et très édifiante sur la manière dont le Plantagenêt pratiquait l’exercice du pouvoir : « Si le prince a dit qu’on partirait de bon matin pour telle ville, on peut être sûr que ce jour-là il dormira jusqu’à midi. S’il fait publier partout qu’il a l’intention de résider plusieurs jours à Oxford ou ailleurs, il se mettra en chemin dès l’aube. » S’ensuit une description pleine de verve des hommes assoupis un peu partout dans la cour du château, au milieu des chevaux harnachés et des chariots chargés, attendant l’apparition du roi qui déclenchait immédiatement une agitation brouillonne, les garçons d’écurie courant dans tous les sens, les chevaux piaffant… Pierre de Blois raconte comment, d’autres jours, le souverain ayant décidé de se lever à l’aurore, il fallait réveiller tout le monde en hâte, domestiques, palefreniers, chevaliers, clercs, étriller rapidement les chevaux, charger tant bien que mal les chariots, les atteler, le tout dans une cohue indescriptible. « Je crois réellement qu’il prenait plaisir à voir l’embarras dans lequel il nous mettait. Après avoir erré durant trois ou quatre miles dans un bois inexploré, et souvent en pleine nuit, nous nous estimions heureux si, par hasard, nous trouvions une vilaine petite cabane. Il y avait souvent d’opiniâtres et amères querelles à propos d’une cahute, et l’on tirait des épées pour obtenir un logement que les cochons eux-mêmes n’auraient pas jugé digne d’une dispute… » Ne nous y trompons pas, comme le remarque Pierre Aubé, une « intention politique profonde » {21} se cache derrière cette manière de vivre. Pierre de Blois à l’époque l’avait parfaitement compris : « Tandis que les autres rois se reposent dans leurs palais, il peut surprendre et déconcerter ses ennemis et tout inspecter. » Et pas seulement ses ennemis, on s’en doute. « Il inspecte tout le monde et juge spécialement ceux qu’il a institués pour juger les autres… » Bonne méthode pour maintenir tous les relais d’administration du pouvoir dans un état de veille permanent.
    Inspecter et surprendre : avec ces deux mots, la méthode de gouvernement d’Henri II est résumée. Le roi a su mettre au point son propre style d’exercice du pouvoir, totalement en accord avec sa personnalité. Ce qui, chez d’autres, aurait pu apparaître comme une instabilité chronique, voire même pathologique, chez lui devient un style de vie en harmonie avec ses fonctions. C’est à cette époque qu’il adopte de manière quasi permanente une tenue composée d’un chaperon drapé, de bottes longues, et surtout d’un manteau court pratique pour les longues chevauchées qu’il affectionne. Ce manteau lui vaudra le surnom de « Henri Court Mantel » qui ne tardera pas à se répandre dans le pays. Enfin, ce qui pour l’époque passe pour une marque d’originalité, le roi ne porte jamais de gants sauf pour la chasse au faucon.
    Le roi et la reine avaient réuni une vaste assemblée, fin décembre 1154, afin de connaître de manière précise l’état du pays. Ce qu’ils avaient appris n’était pas réjouissant. L’Angleterre se trouvait dans un état d’anarchie complète et de nombreux problèmes étaient à résoudre. Tout se présentait pêle-mêle : restaurer les relais de l’autorité royale dans les comtés en nommant de nouveaux sheriffs et de nouveaux justiciers ; restaurer la collecte de l’impôt car depuis des années l’argent ne rentrait plus et les caisses de l’État étaient vides ; se débarrasser des milliers de mercenaires flamands appelés dans le pays par Étienne de Blois qui, d’une part avaient obtenu de celui-ci de nombreuses possessions territoriales prises sur le domaine royal, et d’autre part ruinaient les campagnes ; rétablir la sécurité aussi bien dans les villes que dans les campagnes ; mettre au pas les barons qui avaient profité de la guerre civile pour faire construire nombre de châteaux dits « adultérins », spolier bon nombre de familles et installer des zones de pouvoir personnel, totalement indépendantes du pouvoir royal, et où certains entretenaient de petites armées… La tâche est particulièrement rude

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