Amy, ma fille
choses commençaient bien. Raye avait convié des amis à elle pour lui remonter le moral. Sans Blake, le changement d’atmosphère était notable.
Avant le début du concert, je suis allé la voir dans sa loge pour l’encourager. Elle avait l’air d’aller bien même si elle était stressée, comme à son habitude avant de monter sur scène. Malgré les triomphes de l’année passée, elle n’avait pas réussi à vaincre son trac. Une demi-heure plus tard elle était sur scène et c’était une tout autre histoire : elle titubait et peinait à articuler les paroles de ses chansons. Elle était complètement ivre et le public furieux. Les spectateurs l’ont huée mais au lieu de quitter la scène, elle s’en est prise à eux.
— C’est vous qui êtes nuls d’être venus à ce concert ! Et puis, attendez de voir quand mon mari va sortir de prison… Je blague pas !
Debout dans les coulisses, je n’en revenais pas de ce qui se passait. Amy paraissait si différente. Je n’ai pas pu retenir mes larmes.
J’ai dit à Raye qu’il valait peut-être mieux annuler la tournée. C’était le pire concert d’Amy auquel il avait assisté, et moi aussi. Il préférait attendre qu’elle soit dégrisée pour lui demander ce qu’elle avait l’intention de faire au sujet des concerts suivants. Plus de cinquante mille billets avaient été vendus et la tournée devait rapporter au moins un million deux cent cinquante mille livres. Si Amy annulait, elle aurait une sacrée somme à rembourser.
Quand je l’ai retrouvée dans sa loge, elle était en train d’offrir une montre d’une valeur de vingt mille livres à la mère d’une amie. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’elle était ivre. J’ai demandé à tout le monde de partir. Amy était dans un état lamentable. Elle s’est mise à pleurer avant de s’excuser d’avoir insulté son public.
— Fais-moi un câlin, papa, a-t-elle gémi sur le ton d’une petite fille, comme si ça pouvait arranger les choses.
Je l’ai serrée dans mes bras et elle m’a dit :
— J’ai vraiment de la chance d’avoir une famille comme la mienne, vraiment.
Je ne savais pas comment réagir. Lui faire la leçon n’aurait servi à rien. Elle avait besoin de soutien et j’ai donc continué de la serrer contre moi.
Le lendemain vers seize heures, j’ai reçu un appel de la BBC qui souhaitait savoir si les rumeurs concernant l’annulation du concert de Glasgow était fondées. J’ai téléphoné à Raye qui a démenti : Amy avait simplement déploré la présence de paparazzis à l’aéroport. Le concert s’est déroulé comme prévu et Raye m’a appelé à la fin de la première session pour me faire entendre la réaction très positive du public, qui scandait son nom.
À la fin du concert, Raye m’a rappelé et j’ai pu de nouveau entendre l’enthousiasme du public. Non seulement ç’a avait été un très bon concert mais Amy n’avait consommé ni drogue ni alcool. Elle n’avait pas interprété « Wake Up Alone », « Unholy War » et « Back to Black » parce qu’elle les trouvait trop difficiles à chanter avec Blake en prison ; pourtant elle se portait mieux depuis qu’il s’y trouvait. Je lui ai dit que j’étais fier d’elle, que c’était une battante, et elle m’a remercié.
Quelques jours plus tard, elle a donné un autre très bon concert, à Newcastle cette fois. Là encore, le public a scandé son nom entre les chansons. Raye m’a appelé ce jour-là pour me dire qu’Amy avait décidé d’arrêter la drogue et de se rendre dans une clinique une fois la tournée achevée. Il espérait, quant à lui, qu’elle s’y rende au plus tôt.
Quand j’ai parlé avec elle, elle était en pleine forme. Les concerts l’avaient transformée et lui avaient permis de se concentrer sur de nouveaux projets. Cependant, elle ne pouvait pas s’empêcher de parler de Blake et restait persuadée qu’il allait être libéré sous caution. Selon moi, elle se faisait des illusions.
Si c’était difficile d’être avec Amy à cette époque-là, c’est parce qu’elle changeait sans cesse d’attitude. Elle m’avait dit qu’elle avait arrêté de prendre du Subutex parce que ça la faisait vomir. Deux jours plus tard, elle avait perdu de sa lucidité. Elle m’a téléphoné depuis son appartement, manifestement sous l’emprise de je ne sais quelle drogue, pour me réclamer « des câlins et des bisous », comme quand elle
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