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Apocalypse

Apocalypse

Titel: Apocalypse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eric Giacometti
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l’accolade fraternelle. Le jeune maître ignorait ce que Roncelin faisait de ses informations. Les gardait-il pour lui ou les faisait-il passer par un de ces compagnons qui parcouraient le pays de chantier en chantier ? En tout cas, depuis le début du mois, maître Roncelin avait le front plus plissé lorsqu’il écoutait Geoffroy et, un matin, après son rapport, il lui avait fait signe de l’écouter.
    — Tu te rappelles que je t’avais demandé de veiller sur notre frère Aymon ?
    Geoffroy s’inclina. Dès que le nouveau frère était arrivé, il l’avait pris en charge.
    — Oui, vénéré maître, je l’ai affecté à la taille des gargouilles. Il voit peu de nos frères et descend rarement au sol. Il préfère rester dans les hauteurs de la cathédrale. C’est un solitaire.
    — Est-il déjà allé à la taverne ?
    — Une fois ou deux, pas plus.
    Roncelin croisa les mains sur la poitrine, signe d’une décision d’importance.
    — À partir de demain, je ne veux plus qu’il descende. Tu lui porteras toi-même la nourriture. Fais-le travailler à l’intérieur. Qu’il taille la pierre brute au dernier niveau. Et surtout que nos frères ne le voient plus.
    D’un discret mouvement de tête, Geoffroy indiqua qu’il avait compris, mais une question le préoccupait.
    — Et si l’un d’eux demande où est Aymon ?
    — Dis-leur qu’il est parti pour un autre chantier. Un pont fortifié. Sur la Loire.
    Geoffroy avait posé la main droite sur son cœur en signe d’obéissance et s’était dirigé vers la porte de l’atelier. La voix grave de Roncelin le rattrapa.
    — Un dernier point. Sois plus attentif que jamais à la taverne. Ne néglige rien. Ni homme ni signe. Et surtout, si un nouveau venu fait son apparition, mémorise son visage et rends-moi compte aussitôt.
    Depuis, Geoffroy avait scrupuleusement appliqué les nouvelles directives. Aymon vivait confiné dans un des ateliers de la cathédrale et passait ses journées à tailler des balustres de pierre. Aux frères qui s’inquiétaient de ne plus le voir, le jeune maître avait expliqué qu’Aymon avait fini son temps et qu’il était parti continuer son tour du royaume. Nul n’avait été surpris et tous avaient oublié ce compagnon qui, seul, sous les combles de la cathédrale, attendait son destin.
     
    Ce soir-là, Geoffroy semblait succomber aux charmes conjoints de la chaleur du feu et d’un gobelet de cidre. Il était tard et les habitués se faisaient peu nombreux. L’un d’eux pourtant méritait une attention particulière. Le passé maître l’avait déjà observé à plusieurs reprises. Les commerçants lui parlaient avec déférence et n’hésitaient pas à lui payer à boire. Au fil des conversations, le maître maçon avait fini par comprendre que ce personnage, qui répondait au nom de Le Normand, était l’officier chargé de l’approvisionnement du Castel Vieux. C’était lui qui achetait victuailles, bois et chandelles, tout ce qui était nécessaire au tribunal qui jugeait la Pucelle. L’homme parlait peu, mais buvait sec. Il ne refusait jamais un gobelet et pouvait rester des heures à vider pichet sur pichet. Pourtant son ivrognerie restait contrôlée : jamais il n’élevait la voix ou ne sortait titubant de l’auberge. Il tient drôlement l’alcool, songea Geoffroy. Lorsqu’il avait parlé de Le Normand à Roncelin, le vieux maître avait levé un sourcil broussailleux et dévoilé un œil brillant, Geoffroy en avait conclu qu’il devait se concentrer sur cet officier du château.
    Un à un les habitués quittaient leur table pour aller dormir quand la porte de l’auberge s’ouvrit sur un inconnu qui balaya la salle du regard. Dès qu’il aperçut Le Normand, un sourire traversa sa joue jusqu’à l’oreille. Geoffroy tressaillit : une cicatrice en forme de faucille zébrait tout un côté de son visage. Le Normand posa précipitamment son gobelet et se leva pour accueillir l’hôte imprévu.
    Aucun des deux ne regardait dans la direction des maçons installés près de la cheminée. Discrètement, Geoffroy quitta sa place et vint se couler entre deux apprentis qui jouaient une partie acharnée de dés. D’un geste, il leur fit signe de se taire et tendit l’oreille. Le Normand et l’homme à la cicatrice étaient juste à la table voisine.
     
    — Alors, Guy, tu as vu l’évêque ? interrogea l’officier en se versant une nouvelle rasade de vin, on dit que le procès

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