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Apocalypse

Apocalypse

Titel: Apocalypse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eric Giacometti
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entendu des cris. Un coup de feu a éclaté. Ma mère a supplié notre servante de nous cacher dans la grange. C’était une femme très énergique. Mais elle n’a pas eu le temps de prendre ma sœur. C’est…
    Elle avait la gorge nouée, et sa langue passait par à-coups sur ses lèvres sèches. Marcas se leva et passa une main sur son épaule.
    — Vous n’êtes pas obligée d’en parler, Hannah.
    — Non… Ce sont désormais des fantômes et, moi, je ne vais plus tarder à les rejoindre.
    Elle réajusta ses lunettes et mit de l’ordre dans ses cheveux. Antoine se sentait mal à l’aise, n’osant plus lui poser de questions de peur de raviver le passé. Elle reprit d’une voix lasse :
    — La suite, vous devez la connaître. Ma famille a été internée en France avant de disparaître à Auschwitz. Quant aux policiers français, en fait des types de la Gestapo, ils ont pillé le domaine, emportant le dessin de Poussin. Moi, j’ai été cachée et recueillie par notre servante et je suis partie en Israël cinq ans après la Libération. Je n’ai plus jamais mis les pieds en France depuis. La maison de campagne était administrée par un notaire qui m’envoyait les loyers jusqu’à il y a quelques années. Désormais je vis à Jérusalem, au milieu de mes souvenirs.
    Une question brûlait les lèvres de Marcas :
    — Le dessin de Poussin avait-il une signification particulière pour votre père ?
    Elle le regarda fixement sans répondre. Seul le ronronnement de la climatisation trouait le silence. Antoine ne savait plus s’il devait reposer la question, de peur de paraître impoli. Elle opina.
    — Oui. Il nous avait dit que c’était notre bien le plus précieux.
    — Faisait-il référence à la valeur marchande du tableau ?
    Hannah se racla la gorge.
    — Monsieur Marcas, le commandant Steiner m’a appris que… comment dire… vous faisiez partie d’une association… enfin…
    La voix du commissaire trahit un début de raideur.
    — Si vous faites allusion à mon engagement en tant que franc-maçon…
    Un sourire illumina le visage tout ridé d’Hannah.
    — Alors vous aussi, vous êtes un fils de la Veuve  ?
    Ébahi, Antoine se contenta de hocher la tête.
    — Comme mon pauvre père ! Vous saviez qu’il y avait une loge à Quillan ? Elle a fonctionné jusqu’à l’invasion de la zone sud. Mon père l’a fréquentée toute sa vie. Je crois même qu’il y a été initié avant de partir faire ses études de médecine à Paris. Une tradition, mon grand-père aussi était un frère.
    L’esprit du commissaire enregistrait toutes ces informations à plein régime. Subitement un soupçon le saisit, une question qui commençait à le tarauder.
    — Ne me dites pas qu’il y a un rapport entre ce dessin et la franc-maçonnerie ?
    — Sincèrement, je n’en sais rien. Mais un jour, mon père a dit que…
    Une toux sèche arrêta la vieille dame. Antoine lui saisit la main droite qui tremblait. Son impatience était à son comble.
    — Hannah, votre père a dit quoi ?
    — … que le dessin donnait, à celui qui savait voir, la clé…
    Une nouvelle toux lui déchira la gorge.
    — La clé…
    — … du paradis ou bien de l’enfer.

30
     
    Rouen
    Le Castel Vieux
    9 mars 1430
     
    L’évêque venait de renvoyer son conseil. Un à un les abbés, les chanoines, les juristes quittaient la salle d’audience en s’inclinant devant Cauchon. Une fois encore, la réunion avait échoué : ni les religieux ni les hommes de loi n’avaient trouvé le moyen légal de faire condamner Jeanne à mort.
    C’était là l’obsession de l’évêque, que la Pucelle finisse sur le bûcher. Sinon le scandale serait trop grand.
    Cauchon jeta un œil sur la porte derrière laquelle venait de disparaître le dernier des conseillers. Il se leva de sa cathèdre et vint lui-même donner un tour de clé dans la serrure. Il avait besoin d’être seul pour réfléchir. Réfléchir aux conséquences si jamais Jeanne ne mourait pas.
    Il traversa la salle du conseil et regagna la Tour noire. Il n’y avait que là qu’il se sentait en sécurité. Partout en ville, la colère montait, sourde et anonyme. Les espions pullulaient à la solde du roi de France. Il n’était entouré que d’ennemis et de traîtres, des chiens qui rêvaient de voir son cadavre traîné comme une ordure par les rues de la cité.
    Arrivé dans sa chambre, il s’assit à sa table de travail. Devant lui, en une pile

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