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Apocalypse

Apocalypse

Titel: Apocalypse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eric Giacometti
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gamin inconséquent. Dieu seul sait où il s’était fait couturer le visage, mais il était finalement plus sensé que sa réputation le faisait penser. Et son plan était diabolique.
    L’évêque commença une nouvelle prière et se concentra sur la situation. Depuis qu’elle avait été conduite à Rouen et interrogée sans relâche par ses juges, pas une fois la Pucelle n’était tombée dans l’un des nombreux pièges que lui avaient tendus les inquisiteurs. À chaque question ambiguë dont la réponse risquait de la faire condamner pour hérésie, elle s’en était tirée en invoquant la parole de Dieu et les commandements de la sainte Église. Pour certains juges, cette facilité de Jeanne à éviter les pièges les plus subtils des théologiens était l’aveu même de la protection divine qui s’exerçait sur elle. Pour d’autres, dont Cauchon, c’était la démonstration qu’elle était l’instrument et la chose du Malin.
    Il fallait donc une preuve décisive pour emporter la conviction. Et cette preuve, d’Arbrissol venait de la lui apporter sur un plateau d’argent.
    Depuis le début de son épopée, Jeanne prétendait entendre des voix qui la guidaient dans sa mission. Principalement celle de l’archange saint Michel. Des voix auxquelles elle faisait une confiance absolue, des voix qui lui parlaient, surtout pendant la nuit, et lui inspiraient les réponses aux questions à venir de ses juges.
    Des voix qu’elle était seule à entendre et qui désormais pourraient bien venir de derrière un mur. Il suffirait de dégager la coursive qui longeait la cellule, d’ouvrir une brèche en hauteur, de prévenir les hommes de garde pour qu’ils ne manifestent aucune surprise… Et là…
    L’évêque se frotta les mains. C’est lui qui élaborait, avec les inquisiteurs, les questions qui étaient posées à Jeanne. La voix conseillerait à la malheureuse une réponse qui ferait d’elle une hérétique. Saint Michel allait souffler à la Pucelle sa propre condamnation à mort sans qu’elle en ait conscience.
    De joie, l’évêque se prosterna devant la Crucifixion et remercia Dieu d’avoir envoyé au chevalier pareille inspiration. Une fois levé, il fit appeler le chef des gardes du château. Un sergent d’armes qui avait traversé bien des campagnes et savait se rendre utile.
    L’homme, vêtu d’une cotte de mailles, la dague au côté, entra et se figea. Depuis des années, il commandait la garnison de Castel Vieux et connaissait la ville comme sa poche.
    — Officier, j’aurai besoin de faire des travaux de déblaiement dans le château. Des travaux qui doivent demeurer discrets, très discrets. Que me conseillez-vous ?
    Le chef des gardes prit son temps pour répondre. Il savait qu’avec les puissants une affirmation inconsidérée était souvent fatale.
    — Monseigneur, si cet ouvrage doit demeurer secret, je vous conseille de ne le faire réaliser ni par mes hommes ni par la valetaille du château, c’est le plus sûr moyen de l’ébruiter au-dehors.
    — Alors par qui ?
    — Je vais aller rencontrer maître Roncelin qui dirige les travaux de la cathédrale et lui demander s’il n’a pas un compagnon qui ait déjà travaillé sur un chantier militaire.
    — Pourquoi un compagnon et pas un maître ? s’étonna Cauchon.
    — Parce que les compagnons voyagent, monseigneur. Si Roncelin me fournit un de ses ouvriers, sitôt le travail terminé au château, il partira pour un autre chantier. Cela évitera le risque d’indiscrétions.
    L’évêque parut réfléchir. Sa décision pourtant était prise. S’il parvenait à faire entendre à la Pucelle la voix qui la mènerait à sa perte, il sauverait l’Église.
    — Faites donc ainsi, et d’un geste il congédia le soldat.
    Ses prières n’avaient pas été vaines. Enfin Dieu l’avait inspiré. Bientôt, ce qu’il avait appris ne serait plus qu’un horrible cauchemar. Il revoyait le visage de la matrone, celle qu’il avait mandatée pour vérifier que Jeanne était bien vierge. L’évêque se signa et demanda à Dieu son pardon. Il n’avait pas eu le choix : on avait retrouvé le cadavre de la matrone, violée et tuée, sur un banc de sable de la Seine. Un crime de rôdeur, avaient conclu les autorités.
    Après son examen, il avait convoqué la matrone. Elle s’était jetée à ses pieds, toute tremblante. Ils étaient seuls dans la petite salle attenante à la cellule. Il avait pris la précaution

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