Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Au bord de la rivière T4 - Constant

Au bord de la rivière T4 - Constant

Titel: Au bord de la rivière T4 - Constant Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
Vom Netzwerk:
les nuages. En ce 27 décembre, il faisait particulièrement froid et les lisses du berlot crissaient sur la neige durcie du chemin. Les nombreuses pentes et les courbes de la route étroite qui conduisait à Sainte-Monique rendaient le trajet un peu périlleux.
    Quand les deux jeunes hommes arrivèrent au village, ils avaient une heure d’avance sur leur rendez-vous avec le notaire. Les voyageurs avaient les pieds gelés malgré les briques chaudes déposées au fond du berlot au départ de Saint-Bernard-Abbé. La grosse couverture de fourrure n’avait pas suffi à les protéger du froid.
    — On va s’arrêter chez mon oncle Armand, déclara Hubert. Là, je suis gelé comme un coton de blé d’Inde.
    Son compagnon ne se fit pas prier et le berlot vint s’immobiliser près de la maison du frère de Baptiste Beauchemin. Le gros sexagénaire accueillit les visiteurs avec une bonne humeur qui tranchait sur l’air maussade de sa femme, guère reconnue pour son sens de l’hospitalité. Armand parvint à faire servir à son neveu et au meunier un bol de soupe bouillante et deux tranches épaisses de pain de ménage au beurre.
    Lorsque les Beauchemin apprirent que leur neveu venait signer un contrat chez le notaire Letendre lui permettant d’entrer en possession d’une ferme à Saint-Bernard-Abbé, ils s’en réjouirent et l’oncle tint à souligner l’événement en versant aux visiteurs un verre de caribou.
    — Sais-tu, mon neveu, que tu manques de peu ta tante Mathilde, fit-il. Elle est venue passer Noël avec nous autres et elle nous a dit qu’elle entendait passer le jour de l’An chez vous pour pas faire de jaloux.
    — Ça va faire ben plaisir à ma mère, affirma Hubert d’une voix qui laissait entendre qu’il n’en croyait pas un mot.
    Quelques minutes plus tard, les visiteurs prirent congé de leurs hôtes et se dirigèrent la maison en pierre du notaire Letendre. Tancrède Bélanger les attendait déjà dans la petite salle d’attente de l’étude de l’homme de loi.
    — Bonjour, monsieur Aubé, salua le notaire. Et vous, vous êtes l’un des fils de Baptiste Beauchemin, pas vrai ? demanda-t-il à Hubert à qui il n’avait jamais eu affaire.
    — En plein ça, monsieur Letendre, répondit Hubert en entrant dans la maison derrière Constant.
    L’homme de loi, toujours aussi affable, introduisit les deux visiteurs dans la petite pièce où était assis Tancrède Bélanger. Il s’excusa auprès de ce dernier de le faire attendre encore quelques minutes, le temps de régler certains détails avec les nouveaux venus.
    Cela dit, le notaire entraîna les deux jeunes hommes dans son étude et il referma la porte derrière lui. Il les invita à s’asseoir avant de se glisser derrière son bureau. Il tira de la poche de poitrine de sa redingote son lorgnon qu’il mit sur son nez avant de s’emparer de l’un des deux documents déposés sur son bureau.
    — J’ai ici un contrat dans lequel il est stipulé, monsieur Aubé, que vous prêtez la somme de trois cent quarante dollars à monsieur Hubert Beauchemin ici présent.
    — Il y a une erreur, monsieur, ne put s’empêcher de dire Hubert en entendant le montant. Il me prête trois cent vingt piastres, pas trois cent quarante.
    — Écoute, Hubert, intervint Constant, en se tournant vers lui, c’est ben beau acheter la terre de Bélanger, mais tu vas avoir besoin d’un peu d’argent pour acheter ce qu’il te faut pour partir ta fromagerie.
    — Acceptez-vous le montant écrit dans le contrat ? demanda l’homme de loi à Hubert.
    — Oui, mais ça me gêne pas mal, consentit Hubert.
    — Là, j’ai laissé en blanc le taux d’intérêt sur le document parce que vous avez oublié de me le préciser, dit le notaire à Constant.
    — C’était pas un oubli, monsieur Letendre, le corrigea le prêteur. C’est un prêt sans intérêts.
    — Une telle somme sans intérêts ? demanda l’homme de loi, sidéré.
    — C’est normal, répliqua Constant. Je suis pas pour étrangler mon futur beau-frère.
    — C’est très généreux de votre part, ne put s’empêcher de dire l’homme de loi.
    Omer Letendre se leva et alla ouvrir un antique coffre-fort installé dans un coin de son étude, derrière son bureau. Il revint un instant plus tard en tenant une grosse enveloppe d’où il tira une liasse impressionnante de dollars. Il compta trois cent vingt dollars qu’il remit dans l’enveloppe et en mit vingt dans une autre

Weitere Kostenlose Bücher