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Au bord de la rivière T4 - Constant

Au bord de la rivière T4 - Constant

Titel: Au bord de la rivière T4 - Constant Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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la banquette arrière, qu’il y ait du monde ou pas, moi, je vous laisse là avec vos affaires et je m’en retourne chez nous. J’ai une vache qui va vêler aujourd’hui et j’ai pas envie pantoute de la perdre ou de perdre son veau.
    Sœur Sainte-Anne frappa un peu plus fort et sonda même la porte qui s’entrouvrit. Confuse, elle la referma doucement.
    — Le crochet est pas sur la porte, expliqua-t-elle un ton plus bas en s’avançant vers Armand et sa consœur.
    Armand Beauchemin s’empressa de saisir l’occasion. Il descendit de voiture, empoigna les deux petites valises sur le siège avant et les déposa sur la galerie sans plus de cérémonie. Sœur Marie du Rosaire comprit qu’elle n’avait plus le choix de descendre à son tour.
    — Bon, tu diras à Marie que j’avais pas le temps d’attendre qu’elle revienne et tu l’embrasseras pour moi, dit-il en déposant un rapide baiser sur la joue de sa sœur.
    Comme d’habitude, il n’eut droit qu’à un très tiède remerciement de Mathide qui croyait depuis de nombreuses années qu’elle comblait ses deux frères en venant s’installer chez eux une semaine ou deux chaque année en compagnie évidemment d’une consœur. Économe à l’orphelinat de Sorel, elle avait une personnalité envahissante. Maladivement curieuse, l’imposante religieuse était, de plus, une bavarde impénitente et autoritaire qu’aucune rebuffade ne faisait reculer. Marie avait cru que le décès de Baptiste inciterait sa belle-sœur à espacer ses séjours, mais tout indiquait que l’idée ne l’avait même pas effleurée.
    Armand, trop content d’être débarrassé de ses encombrantes visiteuses, ne se formalisa pas des maigres remerciements de sa sœur. Il salua sœur Sainte-Anne et quitta la cour de la ferme de son défunt frère.
    Dans la maison, Bernadette avait été réveillée en sursaut par la voix de son oncle, même si la fenêtre ouverte de sa chambre n’ouvrait pas sur la cour de la ferme. Elle s’assit dans son lit, encore incertaine de n’avoir pas rêvé.
    En entendant le « En tout cas, ça a pas l’air de bouger ben gros dans la maison » d’Armand Beauchemin, elle se décida à descendre accueillir son oncle et sa tante Amanda. Au passage, elle jeta un coup d’œil à la fenêtre de la cuisine d’été donnant sur la cour de la ferme. Elle s’immobilisa brusquement en reconnaissant sa tante Mathilde, assise, l’air altier, sur la banquette arrière du boghei de son oncle.
    — C’est pas vrai ! s’exclama-t-elle à mi-voix. Pas elle ! Ah ben là, nous v’là bien arrangés.
    Quand elle entendit sœur Sainte-Anne déclarer que la porte n’était pas crochetée, la jeune femme se demanda si elle devait s’avancer tout de suite pour aller accueillir ces visiteuses indésirables ou retourner dans sa chambre et feindre ne pas les avoir entendues arriver.
    Pendant un court moment, elle demeura dissimulée près de la fenêtre de la cuisine d’hiver, soulevant à peine un coin du rideau pour épier ce qui allait se passer. Elle souhaitait de tout son cœur que son oncle décide de ramener à Sainte-Monique les deux religieuses. Elle dut se rendre à l’évidence qu’elle n’aurait pas cette chance quand le gros homme descendit de voiture pour déposer sur la galerie les valises de ses passagères.
    — Maudit ! il nous les laisse, gémit-elle en le voyant remonter dans son boghei et partir. Si c’est comme ça, qu’elles sèchent sur la galerie en attendant que Donat et m’man reviennent de chez Xavier. Moi, je remonte me coucher.
    Toute hésitation disparut sur la conduite à tenir quand elle entendit la voix tonnante de sa tante déclarer à sa timide compagne :
    — Si le crochet est pas sur la porte, c’est qu’ils doivent pas être bien loin. Nous autres, on n’est pas pour rester comme deux belles dindes sur la galerie à les attendre. On va entrer et en profiter pour s’installer. Envoyez, ma sœur, prenez votre valise et suivez-moi.
    Sur ces mots, sœur Marie du Rosaire empoigna sa petite valise et pénétra dans la cuisine d’été, suivie par sœur Sainte-Anne, d’un pas beaucoup moins assuré que le sien.
    Dès qu’elle entendit la porte s’ouvrir, Bernadette traversa la cuisine d’hiver en catimini et s’empressa de remonter à l’étage, le cœur battant. Elle referma derrière elle et sans bruit la porte de sa chambre avant de se jeter sur son lit pour feindre le sommeil. Les yeux fermés, elle

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