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Au Coeur Du Troisième Reich

Au Coeur Du Troisième Reich

Titel: Au Coeur Du Troisième Reich Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Lemay , Albert Speer , Michel Brottier
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nouveaux étaient apparus, des ornements pompeux n’avaient cessé d’envahir et de recouvrir les formes élémentaires toujours classiques, et finalement le « Bas-Empire » en était arrivé à un tel point qu’on ne pouvait plus guère surpasser son faste et sa richesse. Ainsi s’étaient manifestés non seulement l’aboutissement d’une évolution stylistique qui avait, sous le Consulat, commencé de façon prometteuse, mais, en même temps aussi, le passage de la Révolution à l’Empire de Napoléon. Cette évolution avait été à la fois le signal de la décadence et l’annonce de la fin de l’ère napoléonienne. On pouvait ici observer sur un raccourci de vingt ans ce qui, d’ordinaire, ne se jouait que sur des siècles, à savoir l’évolution qui avait conduit par exemple des constructions doriques de la haute Antiquité aux façades baroques et tourmentées du bas hellénisme telles qu’on pouvait les voir par exemple à Baalbek, ou des constructions romanes du début du Moyen Age à la dilapidation des formes du gothique tardif.
    Si j’étais allé au bout de ma réflexion, j’aurais dû poursuivre mon argumentation et dire, en me fondant sur l’exemple de l’Empire décadent, que les plans que j’avais conçus pour Hitler annonçaient la fin du régime et que, pour ainsi dire, mes projets laissaient présager la chute de Hitler. Mais je ne m’en rendais pas compte à l’époque. L’entourage de Napoléon n’a sans doute vu dans les salons surchargés de la fin de l’Empire qu’une manifestation de sa grandeur, seule la postérité peut y découvrir les signes précurseurs de sa chute ; de la même façon, l’entourage de Hitler voyait dans l’encrier monumental un élément du décor qui convient à un génie politique, et il concevait l’immense dôme comme l’expression de la puissance de Hitler.
    Les édifices que nous avons conçus en 1939 étaient en fait du pur néo-Empire comparable au style qui, cent vingt-cinq ans plus tôt, peu avant la chute de Napoléon, avait étalé surcharges, excès de dorure, amour du faste et décadence. Par leur style, mais aussi par leur démesure, ces édifices révélaient clairement les desseins de Hitler.
    Au début de l’été 1939, me montrant un jour l’aigle impériale qui devait, à 290 mètres de hauteur, se dresser au sommet du Grand Dôme, tenant dans ses serres l’emblème du Reich, Hitler déclara : « Il faut changer cela. Ce n’est plus la croix gammée que l’aigle doit tenir, mais le globe terrestre. Pour couronner le plus grand édifice du monde, il ne peut y avoir que l’aigle dominant le globe 16  . » Sur les photos que je fis faire des maquettes, on peut voir encore aujourd’hui la modification apportée par Hitler au projet primitif.
    Quelques mois plus tard, la Seconde Guerre mondiale commençait.

12.
    Sur la mauvaise pente
    Vers le début du mois d’août 1939, en compagnie de Hitler, nous nous rendîmes en voiture au « nid d’aigle » du Kehlstein. Nous formions un groupe insouciant. La longue colonne de voitures roulait sur la route que Bormann avait fait creuser dans le rocher. Franchissant un haut portail de bronze, nous pénétrâmes dans une galerie revêtue de marbre, où l’air était chargé de l’humidité de la montagne ; là, nous prîmes l’ascenseur de cuivre jaune, poli et brillant.
    Pendant que nous franchissions les 50 mètres, Hitler, comme plongé dans un monologue intérieur, dit brusquement : « Il va peut-être bientôt se passer quelque chose d’extraordinaire. Même si je devais y envoyer Göring… Mais si besoin est, j’irai moi-même. Je joue le tout pour le tout. » Il s’en tint à cette allusion.
    A peine trois semaines plus tard, le 21 août 1939, nous apprîmes que le ministre des Affaires étrangères allait négocier à Moscou. Au cours du dîner on remit une note à Hitler. Il la parcourut rapidement, regarda un instant devant lui en devenant tout rouge, tapa sur la table à faire tinter les verres et s’écria d’une voix de fausset : « Je les ai ! je les ai ! » Mais il reprit tout de suite contenance et, personne n’osant rien lui demander, le dîner suivit son cours.
    Après le repas, Hitler appela autour de lui les hommes de son entourage : « Nous allons conclure un pacte de non-agression avec la Russie. Tenez, lisez ! Un télégramme de Staline. » Ce télégramme était adressé au « chancelier du Reich Hitler » et

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