Au Coeur Du Troisième Reich
rétablie. Du reste, j’étais prêt à céder sur la question des grands bunkers ; elle n’avait plus d’importance. Dès le lendemain Hitler signa un texte que j’avais rédigé dans la nuit et qui lui donnait satisfaction sur un point : Dorsch devait construire dorénavant ces bunkers sous ma responsabilité et par priorité expresse 1 5 .
Certes, trois jours plus tard, je me rendis compte que j’avais pris une décision inconsidérée. En conséquence de quoi je me décidai à écrire une nouvelle lettre à Hitler. Car je m’étais aperçu que je ne pouvais qu’aboutir à une impasse sur la base du compromis conclu. Si en effet je soutenais Dorsch dans la construction de ces grandes installations en lui fournissant le matériel et la main-d’œuvre, c’est à moi que reviendrait la tâche ingrate d’enregistrer et de désamorcer les plaintes des instances du Reich dont je limiterais les programmes. Mais si je ne satisfaisais pas les exigences de Dorsch, ce serait entre nous un échange perpétuel de lettres de doléances et de « lettres de couverture ». J’expliquais à Hitler qu’il était plus logique de charger Dorsch également de la responsabilité des autres projets de constructions « dont la réalisation serait compromise par celle des grands bunkers ». Tout bien pesé, affirmais-je en conclusion, la séparation du domaine de la construction de celui de l’armement et de la production de guerre me paraissait être, dans les circonstances actuelles, la meilleure solution. Je proposais en conséquence de nommer Dorsch « inspecteur général de la construction » et de le placer directement sous les ordres de Hitler. Tout autre arrangement serait grevé du poids de mes relations difficiles avec Dorsch.
J’interrompis là ce projet, car en l’écrivant, j’avais pris la décision d’interrompre mon congé de convalescence et d’aller voir Hitler à l’Obersalzberg. Ce qui entraîna à nouveau des difficultés. Gebhardt invoqua les pleins pouvoirs qui lui avaient été conférés par Hitler et prétexta mon état de santé pour me dissuader de partir. Le professeur Koch, en revanche, m’avait informé quelques jours auparavant que je pouvais prendre l’avion sans crainte 16 . Finalement Gebhardt appela Himmler au téléphone, celui-ci se déclara d’accord avec mon intention de venir à l’Obersalzberg en avion, à condition que je lui rende visite avant mon entrevue avec Hitler.
Himmler parla avec franchise, ce qui facilite bien les choses dans de telles situations. La séparation du secteur de la construction du ministère de l’Armement et le transfert de la responsabilité de ce département à Dorsch avaient déjà été décidés depuis longtemps au cours de conversations avec Hitler en présence de Göring. Himmler me demanda de ne plus faire désormais de difficultés. Certes, tout ce qu’il disait n’était que présomption, mais cela correspondait si bien à mes intentions, que la conversation se déroula dans un climat de parfaite compréhension.
J’étais à peine arrivé dans ma maison de l’Obersalzberg, que l’aide de camp de Hitler m’invita à participer au thé pris en commun. Cependant je voulais parler avec Hitler dans le cadre d’entretiens officiels ; l’intimité du thé aurait sans doute aplani les difficultés qui s’étaient accumulées entre nous, mais c’est précisément ce que je voulais éviter. Je tenais à rencontrer Hitler dans le cadre d’entretiens officiels. Je déclinai donc l’invitation. Hitler comprit le sens de ce geste inhabituel et, peu de temps après, un rendez-vous me fut fixé pour un entretien au Berghof.
Coiffé de sa casquette et les gants à la main, Hitler était venu m’accueillir officiellement devant l’entrée du Berghof et m’introduisit dans sa demeure avec toutes les formalités réservées à un hôte. J’étais fortement impressionné, parce que j’ignorais l’intention psychologique que cachait cet accueil. A partir de cet instant mes rapports avec lui devinrent tout à fait ambigus. D’un côté il m’honorait en me témoignant des marques de faveur particulières qui ne me laissaient pas indifférent, attitude que contrebalançait d’autre part son action de plus en plus funeste pour le peuple allemand et dont je commençais peu à peu à prendre conscience. Et bien que l’ancien charme continuât à agir et que Hitler continuât à faire preuve de son habileté
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