Au Coeur Du Troisième Reich
était trahison ! Il y a longtemps que nous serions vainqueurs sans ces traîtres ! Voilà ma justification devant l’histoire ! Il faut maintenant absolument chercher à savoir si Fellgiebel disposait d’une ligne directe avec la Suisse, grâce à laquelle il aurait transmis tous mes plans aux Russes. Il faut employer tous les moyens pour l’interroger… Encore une fois c’est moi qui ai eu raison. Qui est-ce qui me croyait lorsque je m’opposais à toute unification du commandement de la Wehrmacht ? Regroupée dans une seule main, la Wehrmacht constitue un danger ! Pensez-vous aujourd’hui encore que c’est un hasard si j’ai fait mettre sur pied le plus grand nombre possible de divisions de Waffen-SS ? Je savais pourquoi je donnais ces ordres en dépit de toutes les résistances… l’inspecteur général des blindés : j’ai créé tout cela pour diviser l’armée de terre une fois de plus ! »
Puis Hitler laissa de nouveau libre cours à sa fureur contre les conjurés ; il allait tous les « supprimer et les exterminer ». Il pensa à des noms qui étaient apparus à un moment ou à un autre et qu’il rangeait maintenant au nombre des conjurés : Schacht avait toujours été un saboteur de l’armement. Malheureusement, il avait toujours été trop faible, déclara Hitler. Il ordonna l’arrestation immédiate de Schacht, et ajouta : « Hess aussi seraimpitoyablement pendu, tout comme ces salauds, ces officiers criminels. C’est lui qui a commencé en donnant l’exemple de la trahison. »
Après de tels accès, Hitler se calmait ; soulagé comme un homme qui vient tout juste d’échapper à un grand danger, il raconta comment l’attentat s’était produit, il parla du tournant qu’il avait provoqué, de la victoire qui paraissait à nouveau à portée de la main. Nageant dans l’euphorie, il puisait dans l’échec du putsch une confiance nouvelle et nous aussi, nous nous laissâmes gagner trop docilement par son optimisme.
Peu de temps après le 20 juillet, le bunker que Hitler avait dû quitter à cause des travaux pour aller travailler dans mon baraquement le jour de l’attentat fut prêt. S’il est possible de voir dans une construction le symbole d’une situation, alors ce bunker est tout indiqué : ressemblant extérieurement à une sépulture de l’Égypte antique, ce n’était à proprement parler qu’un gros bloc de béton dépourvu de fenêtres et d’arrivée d’air directe. Vu en coupe, c’était une construction où le volume du béton dépassait plusieurs fois l’espace utile. C’est dans cette construction funéraire que Hitler vivait, travaillait et dormait. On peut dire que ces murs de béton épais de cinq mètres le séparaient, au sens propre et au sens figuré du terme, du monde extérieur et l’enfermaient dans sa folie.
Je profitai de mon séjour à Rastenburg pour effectuer ma visite d’adieux, dans son quartier général tout proche, au chef d’état-major général Zeitzler, qui avait été relevé de ses fonctions au soir même du 20 juillet. Je ne parvins pas à dissuader Saur de m’accompagner. Pendant notre entretien, l’aide de camp de Zeitzler, le lieutenant-colonel Günther Smend, qui devait être exécuté quelques jours plus tard, vint annoncer qu’il était de retour. Saur conçut immédiatement un soupçon : « Avez-vous vu le regard de connivence qu’ils ont échangé en se saluant ? » Je réagis par un « non » irrité. Peu de temps après, lorsque nous nous retrouvâmes seuls, Zeitzler et moi, j’appris que Smend revenait de Berchtesgaden, où il était allé mettre de l’ordre dans le coffre de l’état-major. Mais en entendant Zeitzler parler de cette question sur un ton tout à fait anodin, je fus confirmé dans mon impression qu’il n’avait pas été mis au courant par les conjurés. Je n’ai jamais su si Saur avait fait part à Hitler de ce qu’il avait remarqué.
Au bout de trois jours passés au quartier général du Führer, je repris l’avion le 24 juillet pour rentrer à Berlin.
L’Obergruppenführer SS Kaltenbrunner, le chef de la Gestapo, venait de se faire annoncer. Je le reçus couché, ma jambe me faisant à nouveau souffrir. Tout en me témoignant une cordialité inquiétante, comme le soir du 20 juillet, Kaltenbrunner semblait me scruter d’un regard perçant. Il aborda directement le sujet qui motivait sa visite : « Nous avons trouvé dans le coffre-fort de la
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