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Au Coeur Du Troisième Reich

Au Coeur Du Troisième Reich

Titel: Au Coeur Du Troisième Reich Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Lemay , Albert Speer , Michel Brottier
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d’instruction de Werneuchen, à l’est de Berlin, le commandant m’expliqua que chaque élève pilote ne pouvait effectuer qu’une heure de vol d’entraînement par semaine, l’unité ne recevant qu’une partie du carburant dont elle avait besoin.
    L’armée de terre était elle aussi presque immobilisée par la pénurie de carburant. A la fin du mois d’octobre, je racontai à Hitler un voyage de nuit que j’avais fait pour inspecter la X e armée au sud du Pô. J’y avais rencontré « une colonne de 150 camions dont chacun était tiré par quatre bœufs ; un grand nombre de camions étaient remorqués par des blindés et des tracteurs ». Au début décembre, j’étais préoccupé par le fait « que l’instruction des conducteurs de chars [laissait] beaucoup à désirer en raison d’un entraînement insuffisant faute de carburant  18   ». Le général Jodl savait naturellement encore mieux que moi quelle était notre détresse en ce domaine. Pour dégager 17 500 tonnes de carburant, jadis la production de deux jours et demi, en vue de l’offensive des Ardennes, il dut suspendre le 10 novembre 1944 l’approvisionnement en carburant d’autres groupes d’armées 19  .
    Entre-temps, l’effet des bombardements sur les usines d’hydrocarbures synthétiques s’était répercuté indirectement sur l’ensemble de la production chimique. Je dus informer Hitler « que nous devions mélanger les explosifs avec du sel pour remplir les douilles existantes et que nous allions à la limite des possibilités ». De fait, les explosifs contenaient à partir d’octobre 1944, 20 % de sel gemme, ce qui diminuait d’autant leur efficacité 20  .
     
    Dans cette situation désespérée, Hitler gâcha le dernier atout qu’il possédait encore au plan des moyens techniques. Il était grotesque de constater que nous produisions dans ces mois-là de plus en plus de chasseurs ; durant les six derniers mois de la dernière phase de la guerre, 12 720 chasseurs furent livrés à l’aviation, alors qu’elle avait commencé la guerre en 1939 avec 771 chasseurs seulement  21  . A la fin du mois de juillet, Hitler avait donné pour la seconde fois son accord à un projet consistant à rassembler 2 000 pilotes pour leur faire subir un entraînement spécial, car nous espérions toujours causer des pertes sensibles à la flotte aérienne américaine grâce à notre aviation de chasse, et contraindre l’ennemi à cesser les bombardements. En effet, lors des vols aller et retour, ces formations de bombardiers offraient généralement un flanc qui s’étirait sur plus de mille kilomètres.
    Adolf Galland, le général de l’aviation de chasse et moi avions calculé que nous perdrions en moyenne un chasseur allemand par bombardier ennemi abattu dans le ciel de l’Allemagne ; nous estimions par ailleurs que les pertes en matériel seraient dans le rapport de 1 à 6, les pertes en pilotes dans le rapport de 1 à 2. Mais comme la moitié de nos pilotes abattus pouvaient se tirer d’affaire en sautant en parachute et que les équipages ennemis seraient nécessairement faits prisonniers sur le sol allemand, nous pensions, malgré la supériorité des Alliés en hommes, en matériel et en possibilité d’instruction de nouveaux pilotes, que l’avantage pencherait indubitablement de notre côté 22  .
    Vers le 10 août, Galland, très agité, me demanda de l’accompagner en avion au quartier général : dans une de ses décisions subites et arbitraires, Hitler avait ordonné d’engager la flotte aérienne « Reich », qui devait être bientôt prête avec ses 2 000 chasseurs, sur le front Ouest. Notre expérience nous conduisait à penser qu’elle y serait anéantie en peu de temps. Hitler se doutait naturellement du motif de notre visite. Il savait qu’il n’avait pas tenu la promesse qu’il m’avait faite en juillet d’affecter des chasseurs à la protection des usines d’hydrocarbures. Mais il évita toute confrontation pendant la conférence d’état-major et décida de nous recevoir seuls immédiatement après la conférence.
    Je commençai par exprimer très prudemment des réserves sur l’opportunité de sa décision, et lui exposai le plus calmement possible, en dépit de mon agitation, la situation catastrophique de l’armement, en lui citant des chiffres et en lui décrivant les conséquences qui s’ensuivraient si les bombardements continuaient. Il donna aussitôt des signes

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