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Au Coeur Du Troisième Reich

Au Coeur Du Troisième Reich

Titel: Au Coeur Du Troisième Reich Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Lemay , Albert Speer , Michel Brottier
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début, je rappelai comme un fait établi que « si Hitler avait eu des amis, j’aurais certainement été l’un de ses amis les plus intimes », allant en cela au-delà même de ce que l’accusation avait retenu. On discuta une foule de détails se rapportant à des documents produits. Je rétablissais chaque fois mes faits sans chercher aucunement à biaiser ou à trouver des excuses 4  . En quelques phrases, je pris sur moi la responsabilité de tous les ordres de Hitler exécutés par moi. Je défendis le point de vue que, certes, dans tout État, un ordre doit rester un ordre pour les subalternes, mais qu’à tous les échelons, la direction devait examiner et soupeser les ordres reçus et ne pouvait donc être déchargée d’aucune responsabilité, même si on cherchait à lui imposer l’exécution de l’ordre par la menace. Mais ce qui, à mes yeux, avait encore plus d’importance, c’était la responsabilité collective qui, à partir de 1942, nous engageait tous, pour toutes les mesures prises par Hitler, crimes y compris, où et par qui qu’ils aient été commis. « Dans la vie d’un État, déclarai-je, chacun a son propre secteur, dont il est tout naturellement pleinement responsable. Mais, au-delà de cette responsabilité limitée, il faut qu’il existe une responsabilité collective pour les choses essentielles dès que l’on est un des principaux dirigeants. Car qui d’autre que les plus proches collaborateurs du chef de l’État pourrait porter la responsabilité du déroulement des événements ? Mais cette responsabilité collective ne peut exister que pour les principes et non pour les détails… Même dans un régime autoritaire, cette responsabilité collective des dirigeants doit exister ; il est exclu qu’on puisse, après la catastrophe, échapper à cette responsabilité collective. Car, si la guerre avait été gagnée, ces mêmes dirigeants auraient vraisemblablement revendiqué cette responsabilité collective… C’est là d’autant plus mon devoir que le chef du gouvernement s’est soustrait à ses responsabilités devant le peuple allemand et le monde 5  . »
    A Seyss-Inquart, je dis les choses plus crûment : « Qu’arriverait-il si la scène changeait brusquement et que nous agissions tous comme si nous avions gagné la guerre ? Vous verriez alors chacun faire état de ses mérites et de ses hauts faits. Mais maintenant, les rôles sont inversés car, au lieu de décorations, d’honneurs, et de dotations, c’est à des condamnations à mort qu’il faut s’attendre. »
    Flächsner avait vainement tenté, durant les dernières semaines, de me faire revenir sur ma décision de revendiquer la responsabilité de faits qui s’étaient passés en dehors de mon ministère car, à son avis, cela pouvait avoir des conséquences funestes. Mais après ma profession de foi, je me sentis soulagé et satisfait enmême temps de ne pas avoir succombé à la tentation des échappatoires. Cela dit, je pouvais, à ce que je croyais, entamer avec une justification intérieure la deuxième partie de ma déposition qui concernait le dernier stade de la guerre. Je partais du principe que la révélation des desseins de Hitler, jusque-là ignorés de tous, de détruire, une fois la guerre perdue, les conditions d’existence du peuple allemand ne pourrait que permettre à ce peuple de se détourner plus facilement de ce passé  6 et constituerait en outre l’argument le plus efficace pour lutter contre la naissance d’une légende hitlérienne. Cette partie de ma déposition se heurta à la très vive désapprobation de Göring et d’autres accusés  7  .
    Je ne voulais, en revanche, mentionner que brièvement devant le tribunal mon projet d’attentat, et ce rappel devait surtout servir à monter à l’évidence quels dangers me semblaient comporter les desseins destructeurs de Hitler. Mais quand, l’ayant mentionné, je coupai en concluant : « Je ne voudrais pas entrer plus avant dans les détails de cette affaire », les juges se concertèrent et le président du tribunal, se tournant vers moi, me dit : « Le tribunal aimerait entendre ces détails. La séance est suspendue. » J’envisageai sans plaisir de devoir continuer sur ce sujet, car je voulais précisément éviter de me glorifier de cette affaire. Aussi n’accédai-je qu’à contrecœur à cette demande, convenant avec mon défenseur qu’if ne reviendrait pas sur cette partie de ma

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