Au Coeur Du Troisième Reich
alors prévus, en un vaste ensemble ? Jusqu’à ce jour, je n’avais jamais osé prendre d’initiatives dans ce domaine, car Hitler s’en était toujours réservé le droit. C’est pourquoi je n’entrepris que très timidement l’établissement de ce projet.
A Weimar, Hitler me montra le projet d’un « forum du parti » conçu par le professeur Paul Schultze-Naumburg. « Ça ressemble, me dit-il, à la place du marché d’une ville de province en beaucoup plus grand. Ça n’a rien de typique, ne se différencie pas des époques précédentes. Si on construit un forum du parti, il faut qu’on voie plus tard qu’il a été construit à l’époque et dans le style du national-socialisme, comme par exemple la Königsplatz de Munich. » Schultze-Naumburg, qui était une personnalité influente de « la ligue combattante pour la culture allemande », n’eut pas la possibilité de se justifier ; il n’avait pas été convié à cette critique. Hitler, sans aucun égard pour la réputation de cet homme, décida d’organiser un nouveau concours ouvert à des architectes de son choix.
Nous allâmes ensuite à la maison de Nietzsche, dont la sœur, M me Förster-Nietzsche, attendait Hitler. De toute évidence, aucun contact n’était possible entre cette femme excentrique et bizarre et Hitler. Une conversation s’engagea, plate, toute de travers. Pourtant le but principal de cette entrevue fut atteint, à la satisfaction de tous : Hitler prit à sa charge le financement d’un bâtiment attenant à la vieille maison de Nietzsche et M me Förster-Nietzsche accepta d’en confier la réalisation à Schultze-Naumburg. « S’adapter au style de l’ancienne construction est plus dans ses possibilités », me déclara Hitler, visiblement content de pouvoir offrir à l’architecte un petit dédommagement.
Le lendemain matin, nous partîmes en auto pour Nuremberg, bien que Hitler, pour des raisons que j’allais apprendre le jour même, ait préféré à cette époque-là prendre le train. Comme toujours, il était assis à côté de son chauffeur dans sa grosse décapotable bleu foncé, une Mercedes sept litres à compresseur. J’occupais derrière lui l’un des sièges d’appoint, son domestique occupait l’autre, tirant d’un sac des cartes routières, des sandwiches, des pilules ou des lunettes, au gré de son maître ; sur le siège arrière, son aide de camp Brückner et le chef du Service de presse, le D r Dietrich ; une voiture d’escorte de la même taille et de la même couleur que la nôtre transportait cinq gardes du corps vigoureux et le médecin attaché au service de Hitler, le Dr Brandt.
A peine arrivés sur l’autre versant de la forêt de Thuringe, aux campagnes plus peuplées, les difficultés commencèrent. En traversant une localité, nous fûmes reconnus, mais avant que la population revienne de sa surprise, nous étions loin. « Maintenant, vous allez voir, déclara Hitler, ça ne va plus être aussi facile. Le groupe local du parti a certainement déjà prévenu par téléphone celui de la prochaine localité. » Effectivement, quand nous arrivâmes, les rues étaient pleines d’une foule en liesse, le policier du village faisait de son mieux, mais l’auto ne pouvait avancer qu’au pas. A peine nous étions-nous frayé un passage que nous étions arrêtés à nouveau, en rase campagne cette fois, à un passage à niveau dont quelques enthousiastes avaient baissé la barrière pour pouvoir saluer Hitler.
De cette manière, notre progression fut très lente. Lorsque vint l’heure du déjeuner, nous nous arrêtâmes dans une petite auberge à Hildburgshausen. C’est dans cette bourgade que Hitler s’était autrefois fait nommer commissaire de gendarmerie afin d’acquérir la nationalité allemande. Mais personne n’en parla. Notre arrivée avait mis toute l’auberge en émoi et l’aide de camp eut toutes les peines du monde à obtenir des aubergistes qu’ils lui proposent un menu : des spaghetti avec des œufs. Après une longue attente, l’aide de camp finit par aller voir à la cuisine ce qui se passait : « Les femmes sont tellement énervées, revint-il nous dire, qu’elles ne savent plus si les spaghetti sont cuits ou non. »
Pendant ce temps, dehors, des milliers d’hommes et de femmes se rassemblaient et réclamaient Hitler en scandant son nom en chœur. « Si seulement nous pouvions être déjà tirés d’affaire », soupirait
Weitere Kostenlose Bücher