Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Au Coeur Du Troisième Reich

Au Coeur Du Troisième Reich

Titel: Au Coeur Du Troisième Reich Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Lemay , Albert Speer , Michel Brottier
Vom Netzwerk:
public, se fixer une frontière en deçà de laquelle il ne pourrait plus reculer sans mettre son prestige en jeu.
    A cette époque-là, même ses collaborateurs les plus proches ne doutaient pas qu’il fût disposé à faire la guerre, car il revenait sans cesse sur le caractère inéluctable de la situation, alors que son comportement habituel consistait plutôt à ne laisser voir à personne quels étaient ses desseins. Les déclarations selon lesquelles il était prêt à faire la guerre impressionnèrent même Brückner, son aide de camp de longue date. C’était un jour de septembre 1938, pendant le Congrès de Nuremberg. Nous étions assis sur un des murs du château ; devant nous s’étendait, sous un doux soleil de septembre, la vieille ville recouverte par un voile de brume. Abattu, Brückner me déclara : « Peut-être est-ce la dernière fois que nous voyons ce spectacle si paisible. Nous allons vraisemblablement avoir la guerre bientôt. »
    C’est plus à l’attitude conciliante des puissances occidentales qui lui cédèrent, qu’à la retenue de Hitler, que nous dûmes d’éviter, une fois encore, cette guerre prophétisée par Brückner. Aux yeux du monde étonné et de ses partisans désormais totalement convaincus de l’infaillibilité de leur Führer, s’accomplit l’abandon des territoires des Sudètes à l’Allemagne.
    Les fortifications de la frontière tchèque suscitèrent l’étonnement général. Des tirs d’essai prouvèrent, à la surprise des spécialistes, que les armes que nous devions engager contre elles n’avaient pas l’efficacité attendue. Hitler alla lui-même voir l’ancienne frontière, pour se faire une idée des installations fortifiées et il revint très impressionné. Ayant constaté que les fortifications étaient d’une solidité surprenante, leur emplacement choisiavec une extraordinaire habileté et leur échelonnement très profond, grâce à un remarquable savoir-faire dans l’utilisation du terrain, il déclara : « Leur prise aurait été très dure en cas de défense résolue et nous aurait coûté beaucoup de sang. Et voilà que nous les avons eues sans verser une goutte de sang ! Mais il y a une chose de sûre : je ne permettrai plus jamais que les Tchèques bâtissent une nouvelle ligne de défense. C’est une excellente position de départ que nous avons maintenant ! La montagne est passée, nous sommes déjà dans les vallées de Bohême. »
     
    Le 10 novembre, en me rendant au bureau, je passai devant les décombres encore fumants de la synagogue de Berlin. C’était le quatrième de ces événements qui devaient marquer de leur empreinte cette dernière année de l’avant-guerre. Le souvenir de cette vision reste pour moi, aujourd’hui encore, l’une des plus pénibles expériences démon existence, car ce qui, à l’époque, me choqua, au spectacle de la Fasanenstrasse, ce fut avant tout le désordre qui régnait : poutres calcinées, parties de façades effondrées, murs détruits par le feu, images prémonitoires de celles qu’allait bientôt offrir toute l’Europe en guerre. Mais quelque chose me parut plus fâcheux : c’était le réveil politique de la « rue ». Les carreaux brisés des vitrines indisposèrent avant tout mon sens bourgeois de l’ordre.
    Je ne vis point, à cette époque-là, qu’on venait de briser plus qu’un peu de verre, et que Hitler avait, pour la quatrième fois cette année-là, franchi le Rubicon, rendant irréversible le destin de son Reich. Ai-je, un fugitif instant, senti que quelque chose venait de commencer qui se terminerait par l’extermination d’une fraction de notre peuple ? Qui changerait aussi ma substance morale ? Je ne le sais pas.
    L’événement me laissa plutôt indifférent. Attitude motivée aussi par quelques mots de Hitler regrettant ces excès, que, selon lui, il n’aurait pas voulu. Il semblait éprouver une certaine gêne. Plus tard, Goebbels laissa entendre en petit comité que c’était lui l’instigateur de cette nuit sinistre et monstrueuse. Je crois tout à fait plausible qu’il ait placé un Hitler hésitant devant le fait accompli, pour lui imposer la nécessité de l’action.
    J’ai toujours été surpris par le peu de traces qu’ont laissées en moi les remarques antisémites de Hitler. Un retour en arrière me permet de composer, à partir des éléments encore vivaces de mes souvenirs, un tableau de ce qui, à l’époque, me

Weitere Kostenlose Bücher