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Au Fond Des Ténèbres

Au Fond Des Ténèbres

Titel: Au Fond Des Ténèbres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gitta Sereny
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vous assure, avec intérêt.
    « Une affaire secrète ? Grand Dieu, ça n’avait rien de secret, Treblinka ; depuis le camp jusqu’à Varsovie tous les Polonais ont dû en connaître l’existence et ils en ont vécu. Tous les paysans venaient y faire du troc, les putains de Varsovie y faire leur boulot avec les Ukrainiens – c’était un vrai cirque pour tous ceux-là. » [Zabecki et Berek Rojzman m’avaient déjà parlé des paysans qui cultivaient leurs champs autour du camp. « Et beaucoup d’autres, a dit Rojzman, venaient à la barrière faire du troc, le plus souvent avec les Ukrainiens. Mais aussi avec nous. » Stangl lui aussi devait m’en parler.]
    À ce propos Suchomel a également parlé des « putains » dont Stangl avait dit qu’elles étaient rassemblées autour du camp. « Ce n’étaient pas des putains à proprement parler, nous les appelions Spekulantinnen (les trafiquantes). C’étaient des femmes venues de partout – même de Varsovie je suppose – pour faire affaire avec les Ukrainiens. Elles ont pu se faire foutre – je suppose qu’elles l’ont fait – mais elles étaient là surtout pour « faire du commerce ». Après l’arrivée de Wirth, il en a piqué une douzaine au hasard, les a amenées dans le camp et les a fait fouetter. Puis il les a expédiées au camp de travail. » [Camp de travail polonais situé près d’une carrière de pierres à environ deux kilomètres du camp d’extermination et dont Zabecki a précisé qu’il avait été construit le premier.] Suchomel a marqué un temps. « Savez-vous, a-t-il repris d’un ton empreint d’intérêt scientifique, que toutes les Juives ont des fossettes aux fesses ? C’est confirmé par les ethnologues. »
    « Non je ne savais pas, ai-je répliqué. Qu’est-ce que ça a à voir avec votre histoire de “trafiquantes”. Elles n’étaient pas juives n’est-ce pas ? »
    « Non », a-t-il répondu, sans saisir mon insinuation, ni sa propre inconséquence.
    « Vous ne pouvez quand même pas croire cette baliverne, n’est-ce pas ? lui ai-je demandé. Vous n’avez jamais vu le derrière d’une chrétienne grasse ? D’une Allemande, par exemple ? » Il n’a pas répondu.
    J’ai demandé à Richard Glazar s’il y avait des filles parmi les « travailleurs juifs » et il m’a dit : « Oui. Il y en avait. Elles travaillaient à la cuisine et à la buanderie, dans les deux camps. Bien entendu, quiconque était envoyé dans le camp d’en haut, homme ou femme, savait qu’il ne redescendrait jamais. » [Le seul cas connu de quelqu’un qui ait travaillé dans les deux parties de Treblinka est le charpentier Yankiel Wiernik. Lors de la révolte du mois d’août, il y a eu un certain nombre de survivants qui venaient du camp d’en haut. Mais on n’a connaissance d’aucune évasion authentique, c’est considéré comme impossible.]
    « Oui, dit Richard, les quelques filles qui étaient là vivaient la plupart en ménage avec quelqu’un. De l’amour ? Difficile à dire ; relations amicales, profondes amitiés, oui et oui, peut-être de l’amour ; le Kapo Kuba était amoureux d’une fille, ou vivait avec si vous préférez, Sabina. Toutes les filles qui se trouvaient là étaient jeunes et jolies ; ils ne gardaient que les filles jeunes et belles, généralement blondes ou rousses. Bref, on a trouvé un jour Sabina au lit, avec Kuba je crois, et Kuttner, un des pires SS a dit : “On ne peut pas tolérer ce bordel ici”, et il l’a envoyée travailler à la buanderie du camp de la mort. Alors le Kapo Kuba s’est porté volontaire pour y aller aussi, pour être avec elle. Ils ne l’ont pas permis… que dites-vous de ça ? C’est pas de l’amour ? [Kuba est mort ; “Sabina” est une des deux filles survivantes et elle est en Israël [69] .] « Puis il y a eu Tchechia. Elle était amoureuse de Rakowski, le précédent “chef” du camp. Et lui, disait-on, était amoureux d’elle. Stadie l’a descendu quand il a découvert (par un mouchard) qu’il avait un plan d’évasion pour lui et Tchechia et qu’il a trouvé de l’or sur lui. Peut-être que Tchechia après a couché avec d’autres hommes. Mais est-ce étonnant ? Est-ce que ça avait de l’importance ? »
    [« Tchechia Mandel était la seule véritable blonde à reflets roux du camp », a dit Suchomel, dont la mémoire fidèle des individus et des événements est remarquable. « C’était une

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