Au Fond Des Ténèbres
détenaient à Glasenbach l’ancien Kommandant de Sobibor et de Treblinka.
Il est tout à fait possible que si Stangl n’avait pas été nommé d’abord à Schloss-Hartheim, il n’aurait jamais attiré l’attention (et cela bien qu’en 1947, le nom de Treblinka soit déjà revenu à maintes reprises aux procès de Nuremberg). Les Autrichiens ont commencé leur enquête sur le Programme d’euthanasie à Schloss-Hartheim et ont découvert grâce à une circulaire adressée aux camps de prisonniers de guerre des Alliés que Stangl était à Glasenbach. À la fin de l’été 1947, ils ont demandé qu’il leur soit remis pour être jugé et il a été transféré à la prison civile de Linz.
6
« À cette époque, dit Frau Stangl, notre situation à Linz s’était un peu améliorée. Les autorités d’occupation avaient installé chez nous depuis quelques mois une jeune fille hongroise, Maritza Rubinstein. [Frau Stangl m’a écrit plus tard pour rectifier : « Le nom de Maritza était Lebovitch ou quelque chose d’approchant. C’est sa mère dont le nom de jeune fille était Rubinstein, je m’en suis souvenue après votre passage. »]
« On devait d’abord m’envoyer un rabbin, mais je suis allée supplier le curé d’intercéder en ma faveur ; j’étais prête à loger autant de femmes qu’on voulait, mais un homme avec nous quatre, dans ce petit appartement, ça me semblait vraiment impossible. D’ailleurs ils ont cédé et m’ont envoyé Maritza – je crois qu’elle nous a sauvé la vie. Elle travaillait à la bibliothèque américaine de Wels et touchait les tickets de rationnement de l’UNRRA ; elle nous les donnait et mangeait, elle, au mess des officiers US ; c’est ainsi que j’ai pu nourrir mes enfants durant cette année terrible. Et même avec ça les deux aînées sont devenues tuberculeuses ; la plus petite, grâce à Dieu est passée à travers tout. Un peu plus tard, je l’ai mise au jardin d’enfants ; Maritza – je voudrais bien savoir ce qu’elle est devenue, elle m’appelait Muttilein [90] était une jeune fille adorable, adorable. Oui, je lui ai dit que mon mari avait été SS dans un camp. Elle avait été internée à Mauthausen je crois. Quand je le lui ai appris, elle a dit : “Montrez-moi donc sa photo, alors je verrai si je le connais. « Mais non, elle ne le connaissait pas. Et nous sommes devenues des amies…”
[Le fait que Maritza Lebovitch, que les autorités avaient logée chez Frau Stangl, travaillait à la bibliothèque américaine, présente un certain intérêt car il éclaircit l’origine d’une information erronée parue sur Frau Stangl. À la page 313 de l’édition française du livre de Simon Wiesenthal, Les assassins sont parmi nous il est dit : « Après l’évasion de son mari, Frau Stangl avait trouvé du travail à la bibliothèque américaine locale. »
Commentant ce passage, Frau Stangl a déclaré : « Je n’ai jamais travaillé dans une bibliothèque américaine. Comment l’aurais-je pu ? Je ne sais pas l’anglais. »]
« Mais au bout d’une année environ, Maritza n’a pas pu demeurer chez nous ; dès lors que je continuais à travailler – et il le fallait bien – j’avais besoin d’une aide pour les enfants. J’ai donc pris une domestique et Maritza est partie.
« C’est peu de temps après qu’a commencé à Linz le procès de Hartheim. Et un jour j’ai lu dans le journal qu’on avait dit au procès que Franz Stangl avait été le chef des policiers de Hartheim, et naturellement on racontait aussi ce qui s’était passé. Je suis allé voir Paul avec le journal. Il avait été transféré dans une prison ouverte et il travaillait dans une équipe de construction. Beaucoup de prisonniers – dont Paul – avaient dans cette prison leur chambre personnelle et je pouvais y rester seule avec lui aussi longtemps que nous le désirions. C’était une vraie prison ouverte – nous pouvions aller nous promener. Il aurait pu en sortir quand il voulait. Mais enfin je lui ai dit en lui montrant le journal : “Est-ce que c’est vrai ? Alors, pourquoi ne m’en as-tu pas parlé ? Tu sais bien que je suis avec toi ?” Il a répondu : “Je ne voulais pas t’accabler avec ça.”
« Pour tout dire, alors que j’étais horrifiée par tous les morts de Treblinka et de Sobibor, je n’arrivais pas à éprouver la même chose pour Hartheim. Il m’a tout raconté là-dessus ce
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