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Au Fond Des Ténèbres

Au Fond Des Ténèbres

Titel: Au Fond Des Ténèbres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gitta Sereny
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catholiques des pays de l’Est. Il s’occupe manifestement beaucoup des réfugiés de l’Europe de l’Est et il est très informé sur tout l’éventail des œuvres d’aide aux réfugiés.
    Il m’a expliqué que l’aide apportée à Rome aux réfugiés s’était déployée en quatre « vagues » successives.
    « La première vague – était constituée de Juifs [venus d’Allemagne] de 1933 à 1936. La Société Raphaël – le père Weber [dont il sera question plus loin] et M gr  Hudal étaient tous deux déjà engagés dans ces œuvres. La seconde vague a déferlé en 1939 quand l’antisémitisme a commencé à élever la voix en Italie. C’est au début de la guerre européenne que la banque du Vatican a commencé à disposer de devises en faveur des réfugiés. En septembre 1943, est arrivée la troisième vague, alors que l’Italie “cessait” les hostilités et que les fascistes italiens commençaient à fuir. Quant à la quatrième vague (la plus importante certainement) elle se situe après avril-mai 1945. Elle comprenait des ressortissants de nombreux pays qui se trouvaient alors en Italie, dans les camps de prisonniers ou ailleurs, et qui ne voulaient pas regagner leur patrie devenue communiste ; prisonniers de guerre allemands, dont quelques-uns souhaitaient rentrer éventuellement au pays, mais dont beaucoup, à cette époque ne le désiraient pas ; l’armée polonaise d’Anders [119] , l’armée russe de Vlasov [120]  [qui comprenait 10 000 à 15 000 Ukrainiens] ; quantité de gens qui fuyaient la Yougoslavie, la Roumanie, la Hongrie, l’Autriche ; et puis, naturellement, le groupe relativement restreint des membres de la SS auquel vous vous intéressez spécialement.
    « Durant tout ce temps, poursuivit-il, l’aide fournie par l’Église ou par des organismes rattachés à l’Église a suivi deux “filières”, l’une financière, l’autre plus ou moins indirecte. L’argent, c’est certain, venait du Vatican. Mais d’autre part, beaucoup d’ecclésiastiques et d’officiels ont secouru personnellement les gens de diverses façons et pas nécessairement au moyen d’argent. J’ai le souvenir d’un cas – une certaine Frau Muschadek, dont le mari, théologien, avait enseigné en Allemagne le droit canon. Il avait quitté l’Allemagne en 1936, car il n’était que demi-aryen et était venu à Rome pour trouver de l’aide. Eh bien, on ne savait trop que faire au juste pour lui, mais le bon cardinal Mercati [121] , lui, a découvert que les Muschadek étaient tout disposés à émigrer au Brésil. Il leur a donc donné un laissez-passer [122] du Vatican et une lettre de recommandation pour les évêques brésiliens. Je ne sais ce que les évêques ont pu faire pour lui là-bas, mais les choses n’ont pas très bien tourné car il est mort. Il paraît qu’après sa mort Frau Muschadek les a plutôt embêtés ; et pour finir, les Brésiliens ont dû en avoir assez et ils l’ont rapatriée au seul lieu dont elle avait un papier d’identité, le Vatican. Elle est arrivée un jour dans mon bureau avec une lettre signée par le président du Brésil, Vargas, pas moins ; je me souviens que ça a fait toute une histoire. Elle n’en finissait pas de raconter qu’on l’avait laissée en plan, à cause de ces méchants nazis et tout ça. Je n’arrive plus à me rappeler ce que nous avons fait pour elle. Je crois qu’on lui a trouvé un emploi de bureau ou quelque chose de ce genre – en tout cas, on s’est occupé d’elle… »
    À propos de détails tirés de Flucht vor Nürnberg de Brockdorff, sur lesquels je le questionnais, M gr  Bayer a évoqué le cas de M gr  Krunoslav Draganovic, théologien croate qui fut enlevé par des agents de Tito en 1967, ramené en Yougoslavie et exécuté pour collaboration avec l’ennemi. Il était considéré comme le dirigeant de la branche génoise de la « filière d’évasion du Vatican » spécialement affectée à l’aide aux membres de l’Ustaca – cette organisation infâme qui sous le règne du gouvernement fantoche de Croatie a surpassé les Allemands en tuant non seulement les Juifs (elle était d’un antisémitisme féroce) mais aussi, avec plus d’enthousiasme encore, des milliers de Serbes et de Croates orthodoxes [qui refusaient de se convertir au catholicisme].
    « Oui, c’est tout à fait exact, dit M gr  Bayer, après la guerre divers groupes se sont mis à aider leurs propres

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