Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Au Fond Des Ténèbres

Au Fond Des Ténèbres

Titel: Au Fond Des Ténèbres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gitta Sereny
Vom Netzwerk:
le détail de l’affaire de l’Adler  – cette médaille de l’Aigle qu’il avait reçue avant l’Anschluss et au sujet de laquelle, selon ce qu’il m’avait dit, il se reprochait tant ce qu’il avait fait et concédé par la suite. Il semble aussi qu’elle ignorait son inscription sur une « liste noire de policiers à exécuter » dont il m’avait parlé.
    « Il m’a dit ce jour-là, poursuivit-elle, que son ami Ludwig Werner s’était “arrangé” avec le D r  Bruno Wille pour que le nom de Werner et celui de Paul figurent sur une liste de membres du parti nazi illégal. Je me rappelle très bien que ce Dr. Wille était un ami de Werner. »
    Mais elle n’avait pas cru à cette histoire. « Ç’a été un coup terrible pour moi, dit-elle. Comme si cet homme que j’avais tant admiré et respecté tombait tout à coup du piédestal sur lequel je l’avais placé. Je lui ai dit : « Tu m’as trahie pour ces cochons, ces gangsters… Toi que je prenais pour un homme honorable et dévoué à son pays. « C’étaient les paroles mêmes dont Stangl s’était servi en me racontant l’incident. Et ils n’avaient sûrement pas communiqué au sujet de cette affaire précise entre le moment où il m’avait fait son récit à la prison de Düsseldorf et le moment de sa mort, dix-neuf heures après mon dernier entretien avec lui. Car en fait, il n’imaginait pas que j’irais voir sa femme au Brésil.
    Je demandai à Frau Stangl pourquoi elle lui avait parlé ainsi, pourquoi elle n’avait pas cru à son histoire. « J’ai toujours eu des intuitions, dit-elle, une sorte de flair si vous préférez, même pour les faits à venir. Je n’ai su qu’une chose ce jour-là, c’est qu’il ne me disait pas la vérité. Et la pensée qu’il m’avait menti tout ce temps, lui que je croyais incapable de mentir, a été un choc terrible. Il y avait tant de choses en cause : comment dire ? Je suis autrichienne de tout mon cœur, de toute mon âme, vous comprenez. Et je suis pieuse aussi, je l’ai toujours été. Ma foi va à l’Église catholique ; c’était l’Église de mon pays et c’est dans cette foi que j’ai été élevée.
    Mais avant tout, je croyais en Dieu. Et penser que… quel choc affreux. Vraiment un coup terrible ! Mon homme… un nazi… Ce fut notre premier grand heurt – pire qu’une dispute. C’était profond. Pendant des semaines je n’ai pas pu… vous voyez ce que je veux dire… avoir un contact, nous qui avions toujours été si proches ; pour qui ça avait tant compté. Notre vie ensemble est devenue très difficile. »
    Et sans doute le fait que son mari m’avait dit la même chose à moi aussi, l’a ébranlée un moment en ma présence, mais il est clair qu’elle a eu beau l’entendre maintes fois raconter cette histoire et protester de sa sincérité, elle n’a jamais cru réellement ce qu’il lui disait. Néanmoins, elle me dit aussi qu’il ne lui avait jamais donné l’impression d’être un nazi, qu’il n’avait jamais montré la moindre sympathie pour eux. « Et il n’a jamais dit de mal des Juifs, dit-elle. Je ne l’ai jamais entendu dire un mot de ce genre. Toujours il venait à la maison des gens qui savaient qu’il était dans la police, pour lui demander son aide. Je lui ai même dit une fois : « Tu ne pourrais pas les voir ailleurs, au café par exemple ? « Mais il a dit, comment aurait-il pu… » (Il n’est pas du tout prouvé que des Juifs soient venus chez Stangl, et lui-même ne s’en est jamais vanté.)
    Elle se souvenait de ses paroles sur le président de la communauté juive de Linz, Herr Hirschfeld.
    « Il a dit qu’il était content que Hirschfeld lui-même puisse partir. Et un soir, en rentrant, il m’a raconté que Hirschfeld lui avait dit quelque chose d’extraordinaire. Il a dit que s’il le pouvait, il irait jusqu’en Australie ; parce que dans tout autre pays plus proche comme les U.S.A., il y aurait des Juifs et partout où il y aurait des groupes de Juifs, il y aurait des pogroms. Il dit encore qu’Hirschfeld avait dit que c’était le caractère et la personnalité des Juifs en groupe qui rendaient ces choses presque inévitables. J’entends encore Paul disant : « Ce n’est pas extraordinaire qu’il dise ça de son propre peuple ? »
    « Très peu de temps après, toute la section a été transférée à Linz, mais il continuait à rentrer à Wels toutes les nuits – oh ! il

Weitere Kostenlose Bücher