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Au Pays Des Bayous

Au Pays Des Bayous

Titel: Au Pays Des Bayous Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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Biloxi, « se prétendent déjà comme indépendants d'aucun souverain ».

    Ursulines, jésuites, capucins et esclaves
    Le plan de La Nouvelle-Orléans dressé vers 1725 montre une ville en expansion. Centre administratif de la colonie, celle-ci est en passe de devenir, grâce aux travaux qui ont rendu le Mississippi navigable, un port qui commence à accueillir les navires de fort tonnage. Autour de la place d'Armes, dont l'église, le presbytère, le corps de garde et la prison occupent le fond qui fait face au fleuve par-delà l'esplanade, on trouve, dès 1726, la maison du commandant général, les résidences des directeurs et les magasins de la Compagnie des Indes. Dans les rues voisines, les logements des officiers de la garnison et des médecins, les casernes et l'hôpital dressent leurs façades dessinées par Adrien de Pauger, ou Broutin son successeur. L'arsenal a été prudemment isolé à l'est de la ville, à l'abri d'un redan des remparts. L'artère principale, la rue Royale, a une lieue de long. Fâcheusement poussiéreuse par temps sec, elle devient, comme toutes les autres, un bourbier gluant dès qu'il pleut, ce qui arrive souvent. Les autorités tentent d'imposer aux habitants de désherber devant leur demeure et de faucarder régulièrement les canaux creusés pour l'écoulement des eaux.
    Plus de trois cents maisons particulières sont déjà construites ou en cours d'achèvement. Chaque jour, les quatre-vingts ouvriers de la cité sont sollicités par de nouveaux propriétaires pressés de s'installer. La population atteint, d'après le recensement de 1726, six cent deux chefs de famille, quarante-sept engagés, quatre-vingt-un esclaves noirs, vingt-cinq esclaves indiens. Les militaires, qui n'entrent pas dans cette statistique, sont au moins deux cents. De chaque bateau pris en charge à la Balise par un pilote débarquent de nouveaux émigrants et aussi des Noirs, réclamés par les sociétés qui exploitent une soixantaine de concessions entre La Nouvelle-Orléans et le pays des Natchez comme par les petits propriétaires.
    Les malheureux Noirs enlevés sur les côtes d'Afrique qui survivent au voyage, effectué dans les pires conditions, arrivent malades, apeurés et, l'hiver, transis de froid. Ainsi, la Mutine touche terre le 17 mars 1726 avec deux cent vingt-huit Noirs à bord et, quelques jours plus tard, l' Aurore en débarque deux cent cinquante. « Ce qui ne suffira pas, à beaucoup près, pour en donner à tous ceux qui en ont indispensablement besoin », écrit un des directeurs de la Compagnie des Indes, soucieux de fournir rapidement de la main-d'œuvre servile aux colons les plus modestes. L'importation d'esclaves se poursuivra pendant des années, sans que soient atténuées les rigueurs des négriers et améliorées les conditions de transport. Celles-ci causent cependant des ravages parmi ces prisonniers entassés dans les cales. Le rapport concernant l'arrivée à La Nouvelle-Orléans du Duc-de-Noailles est tristement significatif. De ce bateau débarquent, le 9 avril 1728, deux cent soixante-deux Noirs. Des trois cent quarante-sept qui avaient été embarqués au Sénégal, soixante-quatre sont morts pendant la traversée et leurs corps ont été jetés à la mer. Dix-huit ont été laissés à Caye, port de Saint-Domingue, parce que trop malades pour continuer le voyage, et trois ont été vendus aux habitants de ce comptoir. On constate, à l'arrivée à la Balise, que tous les rescapés souffrent du scorbut. Vingt meurent avant que le bateau atteigne La Nouvelle-Orléans où cent dix, trop épuisés pour pouvoir être mis sur le marché, sont hébergés dans un hôpital spécial pour scorbutiques. Et le rapporteur de conclure ce martyrologe : « Plus de vingt-cinq sont morts encore, malgré les soins, les couvertures, le pain et la viande fraîche qu'on leur a donnés. Les habitants ont acheté les autres en payant comptant ou à terme. » Les religieux, s'ils admettent comme tout le monde l'importation des Africains, s'insurgent, quand la pratique de la religion et le respect des bonnes mœurs sont en cause, contre les méthodes des propriétaires d'esclaves. « Il est à souhaiter pour le bien de la religion que les ordonnances du Code noir contre les maîtres qui abusent de leurs esclaves et qu'ils font travailler les dimanches et fêtes fussent mises en exécution, car quoique le nombre de ceux qui entretiennent de jeunes Sauvagesses ou négresses pour

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