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Au Pays Des Bayous

Au Pays Des Bayous

Titel: Au Pays Des Bayous Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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cinquante-quatre canons, prit l'un des deux autres, et l'autre démâté se sauva à la faveur de la nuit. Le sieur de Bienville fut dangereusement blessé à la tête. » Après avoir ainsi rappelé ses états de service à la mer, l'officier s'étend sur l'exploration du Mississippi et ses méthodes d'administration de la colonie qui lui a été confiée. En concluant son mémoire, l'ex-commandant de la Louisiane apprécie lui-même son action sans fausse modestie. « Le sieur de Bienville ose dire que l'établissement de la colonie est dû à la conscience avec laquelle il s'y est attaché pendant vingt-sept ans sans en sortir, après en avoir fait la découverte, avec son frère d'Iberville. Cet attachement lui a fait discontinuer son service dans la marine où sa famille est bien connue, son père ayant été tué par les Sauvages du Canada et sept de ses frères étant morts aussi dans le service de la marine, où il reste encore le sieur de Longueuil, gouverneur de Montréal au Canada, le sieur de Sérigny, capitaine de vaisseau, et le sieur de Châteaugué 9 , enseigne de vaisseau, lieutenant du Roi à la Louisiane. » Mais les rapports circonstanciés, expédiés par M. de La Chaise, s'ils ne niaient pas la valeur militaire de Bienville et de ses frères, vivants ou morts, démontraient sans doute, avec suffisamment de force et de clarté, que les Le Moyne, Normands âpres au gain, s'étaient toujours servis… en servant !
    Le 11 juillet 1726, le conseil de Marine admit que M. de Bienville n'avait jamais failli à l'honneur et lui accorda une pension de trois mille livres, mais il confirma aussi sa destitution. Et, comme La Chaise entendait se débarrasser, dans le même temps, de toute la tribu très encombrante des Le Moyne, Châteauguay fut relevé de son commandement qui échut à Bernard Diron d'Artaguiette, frère de l'ancien commissaire ordonnateur. Deux neveux de Bienville, Gilles-Augustin de Noyan et Pierre-Benoît de Noyan, chevalier de Chavoy, respectivement enseigne et capitaine, furent cassés et rappelés en France, comme M. de Boisbriant, cousin du destitué, qui, resté en Louisiane, assurait encore le commandement. Seul membre de la famille à échapper à la purge, Joseph Le Moyne de Sérigny conserva son grade dans la marine. En revanche, deux membres du Conseil supérieur de la colonie, qui s'étaient souvent opposés à l'inquisiteur, MM. Perrault et Perry, furent destitués et expulsés ; un troisième, M. Fazende, fut autorisé à demeurer en Louisiane comme simple colon. L'ingénieur Adrien de Pauger, à qui La Nouvelle-Orléans devait sa destinée de ville coloniale, reçut un blâme et le procureur du roi, M. Fleuriau, fut sermonné. La Chaise profita du vent favorable pour faire aussitôt nommer un gouverneur titulaire à son goût. Il choisit Étienne Périer, lieutenant de vaisseau, qui s'était distingué pendant la guerre de Succession d'Espagne, homme de commerce agréable. Avant qu'il ne rejoigne son poste en Amérique, on le mit en garde et l'on fixa ses devoirs et sa politique, comme en témoignent les instructions que lui adressèrent des directeurs de la Compagnie des Indes. « Il est bon de prévenir M. Périer qu'il trouvera tout le corps des officiers, le génie et une partie des gens de plume et des habitants prêts à déclamer contre M. de La Chaise. Ces gens-là, accoutumés à tirer des magasins de la Compagnie ce qui ne leur était point dû, ou à mener une vie qui ne convenait ni au bien public ni à celui du service, ont regardé avec horreur un homme qui a eu le courage de s'opposer au désordre. La cause de leur haine ne pouvait manquer de lui attirer la confiance de la Compagnie. Mais il n'en pourrait faire aucun usage si M. Périer ne sentait pas, comme la Compagnie, l'importance d'imposer silence aux ennemis de M. de La Chaise, qui ne peuvent être regardés que comme ceux de la Compagnie. Pour couper les principales racines de ces divisions si dangereuses, la Compagnie remet à M. Périer une ordonnance qui renferme la manière dont elle entend que les auteurs de l'inexécution de son règlement du 11 juillet 1725 soient punis. Il s'y conformera en prenant avec M. de La Chaise les mesures convenables. » L'inquisiteur de la Compagnie des Indes et le gouverneur, représentant du roi à la dévotion de la grande entreprise commerciale, allaient avoir fort à faire pour imposer le respect à des colons qui, d'après le commandant de

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