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Au pied de l'oubli

Au pied de l'oubli

Titel: Au pied de l'oubli Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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et aux remarques désobligeantes de sa mère
     envers sa femme. Mélanie n’avait aucun doute. Elle n’était pas à la hauteur
     comme belle-fille. C’était à bénir le ciel que Pierre ait reçu La
     Joséphine en héritage de Patrick O’Connor. Entre L’Anse-à-Beaufils et
     Chicoutimi, il y avait assez de distance pour qu’elle oublie jusqu’à l’existence
     de sabelle-famille. Malgré que cela implique d’être également
     loin des siens... Normandin, son village natal du lac Saint-Jean, lui manquait
     tant. Cet ennui, elle le cachait du mieux qu’elle le pouvait à Pierre. Quelle
     joie d’habiter plus près de sa famille et de les côtoyer régulièrement ! Avec
     son mari et leur petit Dominique, ils seraient invités à partager le repas
     dominical. Ses jeunes frères et sœurs la taquineraient. Elle aiderait sa mère à
     cuisiner...
    — Mélanie, tu m’écoutes ? demanda Miss Harrington.
    — Oui, oui, excusez-moi.
    — Tu te ronges les sangs pour rien, lui répéta son amie. Tout est
     parfait.
    Mélanie regarda autour d’elle. Non, elle n’avait pas à rougir de son intérieur.
     Pas un coin qui ne brillait de propreté. Elle était particulièrement fière des
     housses qu’elle avait confectionnées à la main, ne possédant pas de machine à
     coudre, et dont elle avait recouvert les vieux fauteuils. Elle avait également
     refait les rideaux. Quant à sa robe, elle portait sa plus jolie.
    — La mère de mon mari est... si parfaite, reprit-elle en s’asseyant à son tour.
     Toujours bien mise, bien coiffée. Vous comprendrez, Miss Harrington, quand vous
     la rencontrerez. Pierre dit que sa mère a été éduquée dans un milieu très aisé.
     De là viendrait son côté bourgeois. Elle avait un piano à queue, elle chantait
     de l’opéra, elle écrit dans un journal ! C’est vraiment pas n’importe qui ! Ce
     qui est très loin de moi... se plaignit Mélanie.
    — L’herbe est toujours plus verte chez les autres. Mélanie, you are
     perfect  !
    Le cri d’un enfant retentit.
    — Ah, Dominique se réveille enfin ! Je monte le chercher, dit Mélanie en se
     levant.
    Soudain Mélanie s’immobilisa, le visage perdant toute couleur,
     se tenant le ventre.
    — Mélanie, what’s happening  ?
    À la vue des larmes qui se mirent à couler sur les joues de sa jeune voisine,
     l’Américaine se douta de ce qui se passait.
    —  Oh no, my God, souffla-t-elle.

    — Julianna, je suis désolé...
    François-Xavier ne savait quoi dire. Furibonde, sa femme se tenait devant lui,
     son fameux petit nez retroussé en l’air. Avec douceur, du bout du doigt, il
     effaça une trace de boue qui maculait la joue de Julianna.
    — Ça me rappelle notre première rencontre. Quand t’es tombée à l’eau en
     débarquant du bateau...
    À ce souvenir, Julianna s’attendrit. Elle esquissa un demi-sourire.
    — François-Xavier...
    Son mari pencha la tête et l’embrassa, timidement comme s’il s’attendait à se
     voir repousser. Il chercha dans le regard de son épouse ce qu’il espérait de
     tout son cœur retrouver.
    Oui, la flamme brillait encore ; non, le feu n’était pas éteint.
    — Descendons te laver un peu.
    Il l’entraîna sur le bord de la mer. Il trempa son mouchoir dans l’eau salée et
     tendit le bout de coton à sa femme. Il ne la quitta pas des yeux tandis qu’elle
     se débarbouillait le visage et les mains. Consciente du désir que son mari
     éprouvait, elle ne résista pas quand il lui demanda de le suivre dans un coin
     tranquille.
    — Viens, lui dit-il en la prenant par la main.
    Il avait remarqué une petite enclave, avec de folles herbes qui
     firent une couche moelleuse, une dune qui les abrita du regard, le bruit des
     vagues qui couvrit leurs gémissements. Même l’océan, sous son rideau de brume
     qui s’était levé, laissa de l’intimité à ce couple qui se retrouvait
     enfin.
    — T’es si belle, Julianna... dit François-Xavier après l’amour.
    — Le corps déformé par mes grossesses, les cheveux blancs...
    — Ça te rend encore plus belle.
    — Certain que je vais te croire...
    — Je te l’ai pas assez prouvé ? On peut recommencer !
    Julianna eut un petit rire.
    — Si quelqu’un nous trouvait, on nous traiterait de vieux fous.
    Quelques minutes passèrent. Détendu, à nouveau heureux, le couple semblait
     somnoler. François-Xavier brisa le silence.
    — Julianna... tu m’aimes-tu encore ?
    Elle

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