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Au pied de l'oubli

Au pied de l'oubli

Titel: Au pied de l'oubli Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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il pleut,
     c’est pas ben ben accueillant.
    — J’espère que tes parents regretteront pas leur voyage.
    — Maman dit que c’est son cadeau d’anniversaire de mariage de venir nous voir.
     Ils doivent s’arrêter toutes les cinq minutes pour se bécoter.

    Sur le bord de la route serpentant le long de la mer, dans une voiture enlisée
     dans la boue, un homme et une femme gardaient un silence rageur. Les mains sur
     le volant, François-Xavier réfléchissait à leur fâcheuse situation. Il avait
     éteint le moteur et ne savait plus trop quoi faire. Par trois fois, il avait
     essayé de pousser son automobile tandis que Julianna se tenait au volant. Mais
     il n’avait réussi qu’à s’embourber encore plus.
    — Il fallait pas donner trop de gaz, marmonna-t-il.
    La colère de Julianna explosa.
    — Quoi, c’est de ma faute en plus ! Je t’avais dit de conduire comme du monde,
     que tu roulais trop sur le bord du chemin !
    François-Xavier rétorqua sur un ton aussi hargneux :
    — Ça faisait vingt fois que tu trouvais que j’étais trop dans le milieu de la
     route !
    — Mets tout sur mon dos, envoye, j’ai l’habitude. Je suppose que c’est de ma
     faute aussi s’il pleut sans arrêt.
    — Non, mais si t’arrêtais un peu de chialer, ça rendrait notre voyage en
     Gaspésie un peu plus agréable !
    — C’est toi qui as la face de carême depuis qu’on est partis de
     Chicoutimi !
    — On peut retourner de bord si tu veux, marmonna François-Xavier.
    — Maudite bonne idée, encore faudrait-il que tu nous sortes de
     ce trou. Si t’avais pas conduit si proche du bas-côté aussi...
    Exaspéré, François-Xavier s’extirpa rageusement de l’habitacle. Déjà détrempé
     par la pluie, il ne se souciait même plus d’essayer de s’en protéger. D’un pas
     vif, il traversa la route de terre et dévala le talus en direction de la mer. Ne
     comprenant pas le manège de son mari, Julianna sortit à son tour de
     l’automobile. Nouant autour de sa tête un drôle de chapeau de plastique, elle
     cria :
    — Tu vas où ? Reviens ! Tu me laisseras pas toute seule ici ?
    Il poursuivit sa descente.
    — François-Xavier Rousseau ! Maudit de maudit… Je... je te hais ! hurla-t-elle
     dans la pluie.

    — Trente-cinq ans ensemble... J’espère qu’on s’aimera fort comme tes parents
     quand on sera vieux, nous aussi.
    Pierre sourit en imaginant Mélanie en femme âgée.
    — Tu vas être jolie comme un cœur avec tes cheveux blancs. J’vas être encore
     plus amoureux de toi…
    Toujours enlacé devant la fenêtre, le couple profitait de ce moment de
     tendresse.
    Hésitant à gâcher la joie de Mélanie, mais ne pouvant plus tergiverser, Pierre
     se décida à lui annoncer la mauvaise nouvelle.
    —  La Joséphine reprendra pas la mer... lâcha-t-il.
    — T’as pas réussi à la réparer ?
    — Non. Je pense que cette fois, c’est fini.
    — Qu’est-ce qu’on va devenir ? s’alarma Mélanie.
    — Je le sais pas, je le sais ben pas pantoute...

    En maugréant, Julianna remonta dans l’automobile. Boudeuse,
     elle attendit anxieusement le retour de son mari. C’était le comble.
     François-Xavier l’avait abandonnée sur une route déserte, sans se soucier
     d’elle ! Rien n’allait comme elle l’avait espéré. Que s’était-elle imaginé,
     aussi ? Qu’un vieux couple comme le sien revivrait des jours du premier temps,
     quand juste être ensemble est ce qu’il y a de plus important ? Oui, c’était ce
     qu’elle avait rêvé, ce pour quoi elle avait prié... Elle désirait retrouver le
     bonheur d’être dans les bras de François-Xavier, redevenir sa princesse, lui
     jurer qu’elle l’aime pour la vie... Depuis que François-Xavier avait surpris
     Yves en train d’essayer de l’embrasser, son mari n’était plus le même. Julianna
     avait tenté de clarifier la situation. François-Xavier était resté impénétrable.
     Entre eux, la tension était si vive, prête à exploser ! Julianna aurait donné
     n’importe quoi pour revenir en arrière. Elle n’aurait jamais dû laisser les
     choses aller si loin entre son patron et elle. Jetant un œil de l’autre côté de
     la route, elle regarda son mari qui, face à la mer, semblait perdu dans ses
     pensées. Julianna fouilla dans son sac à main, prit son poudrier et entreprit de
     rectifier son maquillage. Elle n’en pouvait plus ! Ce voyage était
     interminable ! Elle rêvait

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